Baisser les dépenses ? Ce serait la meilleure solution pour ramener la concorde. Mais l’interview de Gérald Darmanin dans le Parisien laisse peu de doutes (et d’espoirs) sur les solutions qui seront finalement choisies par le gouvernement pour sortir de l’ornière des Gilets Jaunes: on augmentera les impôts des classes moyennes sans toucher aux dépenses !
Le gouvernement ne s’est pas encore exprimé clairement sur ces sujets sensibles de fiscalité, mais par petites touches se dessine, pour sortir de la crise des Gilets Jaunes, la solution à la fois la moins imaginative, la plus facile et la plus toxique: augmenter les impôts sans toucher aux dépenses. Sur ce point, un bref tableau des quinze derniers jours permet de mesurer l’ampleur des dégâts qui se préparent.
Quand Le Drian parle de « conneries »
Dans un récent Canard Enchaîné, des propos de Le Drian au séminaire gouvernemental étaient rapportés : le ministre le plus chevronné de Macron préconisait vertement de ne pas s’attaquer à la réforme de la fonction publique. Ce faisant, il anéantissait les derniers (maigres espoirs) que les libéraux pouvaient placer dans une baisse de la dépense publique.
Philippe parle de fiscalité plus progressive
Dans ces conditions, la seule possibilité pour sortir de la crise des Gilets Jaunes par le haut sera d’offrir des cadeaux financés par les classes moyennes. Une augmentation de la pression fiscale est en vue et le ballet des euphémismes pour la camoufler a commencé.
Par exemple, Édouard Philippe a affirmé qu’il était pour une « fiscalité plus progressive ». Cette formulation châtiée peut se traduire par : « nous n’augmenterons que les impôts des classes moyennes et supérieures ».
Blanquer enterre la réforme des rectorats
Au rang des mesures enterrées au nom du « pas de vague », on compte la réforme des rectorats. En juin, le ministre Blanquer avait annoncé la réduction du nombre de ces usines à gaz qui consomment de la main-d’oeuvre et produisent du gaspillage.
On vient d’apprendre qu’il ne toucherait finalement à rien et que rien ne bougerait! La chiraquisation du régime s’accélère.
Des ministres sans aucune idée
Plus inquiétant : le gouvernement et la majorité semblent totalement dépourvus d’idées sur ce qu’il faut faire et sur ce qui est bon pour le pays. Ainsi, les députés commencent à plaider pour un report de la dangereuse réforme des retraites (dont nous pronostiquons début plusieurs semaines qu’elle sera abandonnée discrètement au printemps, ou, pudiquement, reportée à 2022…). La ministre Buzyn avoue n’avoir aucune idée sur la réforme des allocations familiales.
L’interview de Darmanin
Dans ce contexte qui ressemble quand même à une fin de règne, l’interview de Darmanin au Parisien a le mérite de clarifier la ligne conductrice du gouvernement. L’intéressé déclare notamment:
« On peut imaginer d’autres sujets qu’un retour plein de l’ISF. Les niches fiscales par exemple, c’est 14 milliards d’euros. Soit quatre fois plus que l’ISF ! Et plus de la moitié de ces 14 milliards profite aux 9 % des Français les plus riches. Eh bien, je propose que l’on revienne dessus en diminuant le plafond global des niches, ou alors qu’on les mette sous conditions de ressources pour qu’elles profitent aux classes moyennes et populaires plutôt qu’aux plus aisés. »
L’amusante dialectique de Darmanin sur les dépenses
On s’amusera de ces propos. Si Darmanin entend ne pas augmenter les impôts, il a aussi l’intention de réduire les niches... ce qui se traduira tout de même par des augmentations d’impôts pour ceux qui en bénéficient. Dans cette dialectique, l’introduction d’un « plafond de ressources » dans les niches ne devrait pas faire que des heureux.
Bientôt du shaming contre les entreprises
Dans cette ambiance anxiogène, le gouvernement, tel un tracteur qui aurait perdu son pilote, continue sur sa lancée sans tenir compte des obstacles. Le ministre Denormandie a ainsi annoncé qu’une campagne de shaming aurait lieu prochainement contre les entreprises du SBF 120 qui discrimine les enfants issus de l’immigration.
Le feuilleton Benalla continue
L’affaire Benalla ne s’arrête pas pour autant. Alors que des procureurs ont tenté de perquisitionner Mediapart pour saisir les enregistrements de Benalla, des détails fleurissent sur la soirée que Benalla a passée au Damas Café, près de l’Élysée, le soir où le Monde a révélé son intervention douteuse du 1er Mai.
Nous redisons ici aussi notre pronostic : l’affaire Benalla n’en est qu’à son début.
Article écrit par Eric Verhaeghe sur son blog