Vous allez me dire que je fais une fixation sur les monnaies électroniquement virtuelles. Je vous répondrais que pas du tout, que je trouve justement cette période fascinante et passionnante car elle révèle les intérêts réels de chacun et l’exorbitant pouvoir que représente celui de battre monnaie.
Les naïfs qui pensent que nos grands argentiers vont abandonner cet immense privilège à quelques geeks aussi sympathiques soient-ils se fourrent le doigt dans l’œil et très profondément.
C’est à ce niveau que les fidèles de la secte des cryptomonnaies m’expliquent, avec moult arguments aussi abscons qu’incompréhensibles, ce qui est évidemment un pléonasme répétitif, que je n’ai décidément rien compris à la magie technique des cryptobidules.
D’abord, j’ai à peu près compris, et j’ai surtout compris que personne à part quelques gus utilisent ces trucs-là, mais finalement ce n’est même pas le problème.
Non, le problème c’est ce que viennent de dire à quelques heures d’intervalle le pédégé de JP Morgan – je sais c’est une banque hideuse, beurk, caca-boudin crotte, mais cela n’empêche pas justement de prêter une oreille attentive à ce qu’ils peuvent dire vu l’énorme pouvoir financier détenu par ces immenses corporations (pas sympa) – et… le gouverneur de la BCE, à savoir le sieur Mario Draghi en personne.
Draghi a dit
Vous connaissez sans doute le jeu « Jacques a dit »… Eh bien nous allons jouer à la version économique et adulte intitulée « Draghi a dit » !
Et vous savez ce qu’il a dit Draghi ?
Il a dit, je cite : « Je ne vais pas commenter l’intention italienne, mais je vais commenter la décision estonienne : aucun État membre ne peut introduire sa propre monnaie, la monnaie de la zone euro est l’euro. »
Ceci a eu lieu lors d’une conférence de presse donnée par le gouverneur de la Banque centrale européenne la semaine dernière et faisait suite aux rumeurs d’introduction d’une monnaie parallèle en Italie et de la décision des Estoniens de lancer l’Estcoin…
Disons pudiquement qu’ils ont été bien reçus et rappelés à l’ordre. D’ailleurs, pour celles et ceux qui pourront visionner la vidéo que je vous mets juste en dessous, regardez l’intensité, la dangerosité et la méchanceté qui se dégagent du regard de Draghi lorsqu’il répond.
Au-delà des mots prononcés, prenez le temps d’analyser la communication non-verbale du gouverneur. Il ne dit pas juste que la monnaie de l’eurozone est l’euro. Sans prononcer la moindre menace, ce que vous ressentez presque physiquement quand vous le regardez, c’est qu’il est justement dans la menace. Menacez l’euro et je vous réduirai à néant. Voilà ce qui est dit dans la communication non-verbale du gouverneur.
Après, si vous voulez lutter contre la BCE et de façon générale contre une banque centrale, je vous en prie, passez le premier, je m’installe confortablement dans le canapé, et je vous regarde vous prendre une raclée mémorable.
Pour le PDG de JP Morgan, le Bitcoin est une fraude !
Jamie Dimon, le patron de JP Morgan, qui reste une référence, vient de dire sur la chaîne financière américaine CNBC que le Bitcoin était une fraude et qu’il fallait évidemment faire la distinction entre la « blockchain », qui est une technologie, et le Bitcoin, qui n’est qu’une cryptomonnaie. Il n’est pas possible de croire que chacun puisse émettre sa propre monnaie dans son coin et imaginer que cela va fonctionner comme ça !
Il a également précisé que le Bitcoin c’est un peu comme la spéculation sur les bulbes de Tulipe.
Pour celles et ceux qui ne connaîtraient pas l’histoire de cette première bulle spéculative stupide de l’histoire économique, cela fait référence au soudain engouement pour les tulipes, dans ce qui est les Pays-Bas d’aujourd’hui, au milieu du 17e siècle, qui entraîna l’augmentation démesurée puis l’effondrement des cours de l’oignon de tulipe : ce qu’on appelle la « crise de la tulipe » en histoire économique.
« Au plus fort de la tulipomanie, en février 1637, des promesses de vente pour un bulbe se négociaient pour un montant égal à dix fois le salaire annuel d’un artisan spécialisé. Certains historiens ont qualifié cette crise de ”première bulle spéculative” de l’histoire. Elle est restée dans les mémoires, tout au long de l’Histoire des bourses de valeurs… »
Croire qu’un bulbe de tulipe peut valoir aussi cher qu’une maison est à peu près aussi stupide que croire qu’une valeur en .com qui perd 500 millions d’euros par an vaut le prix d’une maison, ou qu’un Bitcoin purement virtuel et émis par personne en échange de rien puisse valoir… 5 000 dollars !
Encore une fois, je n’ai rien contre le Bitcoin !
Je n’ai rien contre le Bitcoin ou les autres cryptomonnaies, je vous dis juste ne cédez pas aux sirènes de l’argent facile, de l’appât du gain ou du lucre. Les cryptomonnaies n’ont aucune valeur. C’est du vent, et aucun État, aucune banque centrale ne laissera jamais s’installer l’anarchie sur la création de la monnaie car entendez-moi bien, même si vous êtes un amoureux des Bitcoin-coins… LA MONNAIE c’est LE POUVOIR.
Il est déjà trop tard, mais tout n’est pas perdu. Préparez-vous !
Article écrit par Charles Sannat pour Insolentiae