L’omertà est aussi de rigueur… surtout dans nos banques ! (1/2)

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Par Charles Sannat Modifié le 24 juillet 2012 à 18h13

La situation était grave, je pense que vous le saviez. Elle devient critique. Ce week-end j’ai reçu un mail d’une lectrice qui me disait, entre ce que vous dites et ce que me dit mon banquier, je finis par ne plus savoir quoi penser.

Entre la rédaction de deux paragraphes, je réussis à m’échapper quelques instants pour rejoindre les enfants sur la plage. On joue. On lutte tous les jours invariablement contre la marée. Evidemment notre château de sable finit inexorablement par s’effondrer face aux assauts de la mer. Les forces en présence sont beaucoup trop importantes pour imaginer que les banquiers centraux puissent éviter le pire. Les divergences d’intérêts entre les pays sont beaucoup trop importantes pour imaginer que nous nous mettions tous d’accord ensemble à chaque difficulté dans un cadre d’amour bienveillant et généralisé.

Les dettes accumulées sont trop importantes pour imaginer que l’on puisse les payer grâce à une croissance (de quoi et pourquoi?) qui ne fera jamais son retour.

Alors la seule option des autorités est de gagner du temps, acheter chaque fois de plus en plus cher (sous forme d’inflation et de nouvelles dettes). Plus nous gagnons du temps plus nous pensons que nous ne risquons rien.

C’est la célèbre histoire de la dinde de noël.

Tous les jours pendant 1000 jours, la dinde est nourrie, engraissée. Chaque jour qui passe pendant cette période renforce la dinde dans sa croyance que demain sera identique à hier et qu’elle recevra une pitance abondante. Au bout de 1000 jours, le degré de confiance éprouvée par la dinde atteint son paroxysme. Le soir même la Dinde est tuée. Le lendemain vous la mangez dans votre assiette. La Dinde est morte alors que l’indice de confiance de la dinde était au plus haut.

Madame notre lectrice, ce qui est sûr, c’est que votre banquier est un dindon… donc surtout ne devenez pas son « dindon de la farce »!!

Je souhaitais également, Madame, vous apporter un autre élément de réflexion et en faire profiter tout le monde.

N’imaginez pas que votre banquier est compétent. En fait c’est l’inverse depuis hélas bien longtemps. Les banquiers sont recrutés pour leur incompréhension de l’économie et du système (je parle des banquiers d’en bas, c’est à dire de ceux qui s’occupent de votre argent). Pourquoi ? Pour une raison simple. Imaginez une personne qui pense par elle-même, qui comprend la situation et à qui on demande de vendre à ses clients des produits qu’il sait mauvais et qui vont entrainer la perte de l’épargne de son client qu’il voit toutes les semaines. Quelle sera sa réaction ? Il ne vendra pas grand chose. Or votre agence à des objectifs. Résultat, pour avoir les meilleurs vendeurs, il faut recruter des vendeurs de raquettes de tennis de chez décathlon. Pas des économistes.

Enfin, ces collaborateurs subiront un véritable lavage de cerveau hebdomadaire et mensuel. On leur donne la bonne parole, on homogénéise les discours de tout le monde, on supprime le libre arbitre. Celui qui remet en cause est poussé vers la sortie.

Alors dernier conseil Madame, faites passer un petit test à votre banquier qui normalement à moins de 40 ans (ont s’est débarrassé des seniors qui comprenaient encore quelque chose à l’économie et à la finance et qui savaient lire et écrire en français), pour confier vote argent aux mains incultes de vendeurs de savonnettes.

Demandez-lui comment fonctionnent les CDS ?

Demandez-lui quelle est la taille du bilan de sa banque par rapport à ses fonds propres ? (là on va franchement rigoler).

Demandez-lui ce que sont les normes de Bâle 3 ou Solvency 2, il devrait y avoir un moment de flottement…

Revenons donc à l’actualité du jour encore une fois bien chargée pour un été.

Le FMI va arrêter son soutien à la Grèce.

Selon le grand quotidien allemand Der Spiegel, le Fonds Monétaire International aurait indiqué aux dirigeants de l’Union Européenne qu’il ne participerait pas à un soutien supplémentaire pour la Grèce.

Il faut dire qu’actuellement, le FMI subit des pressions de plus en plus importantes car des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent pour dénoncer le parti pris européen du Fonds. Cela a encore été le cas cette semaine avec la lettre de démission adressée au conseil d’administration de Peter Doyle, l’un des économistes britanniques du FMI.

Lorsque l’on sait que de nombreux pays européens ont conditionné leur participation au sauvetage de la Grèce notamment à l’intervention et à la surveillance du FMI, cela n’augure rien de bon pour les prochaines semaines.

Alors que le FMI n’est tout simplement plus disposé à fournir des fonds supplémentaires pour aider la Grèce, il est difficile d’imaginer que les pays européens prennent à leur charge les dizaines de milliards d’euros qui vont manquer dès septembre. Vous n’avez pas fini d’entendre parler du cas grec, vous savez, ce pays que l’on a sauvé de la catastrophe lors des différents sommets de la dernière ultime chance.

Enfin, cela en dit long sur ce que pense les anglo-saxons de la construction européenne et de l’avenir de la monnaie unique. Je vous disais il y a quelques semaines que Barack Obama et les Américains n’avaient aucun intérêt à voir émerger une Europe unie et fédérale. Si une Europe unie est un danger pour le leadership américain, une Europe désunie est une grande chance y compris pour le dollar américain…

Plus de crédibilité pour l’Espagne.

Ambrose Evans-Pritchard, mon journaliste fétiche du Telegraph à Londres, signe encore un papier digne d’intérêt. Pour lui la crédibilité de l’Espagne est nulle.

« La crédibilité financière de l’Espagne est proche de zéro.

La crédibilité budgétaire est égale à zéro.

La crédibilité politique est nulle ».

En gros l’Espagne ne pourra pas s’en sortir et le coût d’un sauvetage global par ses partenaires européens est tellement élevé qu’il est illusoire. Effectivement c’est également ce que je pense.

D’ailleurs les marchés aussi sans doute, en tout cas le marché obligataire puisque le 10 ans espagnol dépasse allègrement la barre des 7,5 %, un taux insoutenable à long terme.

Justement le marché obligataire, avec d’un côté des taux astronomiques pour de plus en plus de pays, et à l’autre bout de l’échelle, des taux négatifs pour quelques-uns, est en réalité la bulle financière ultime.

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Charles SANNAT est diplômé de l'Ecole Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d'Etudes Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information-(secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Economique d'AuCoffre.com en 2011. Il rédige quotidiennement Insolentiae, son nouveau blog disponible à l'adresse http://insolentiae.com Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.