Ces « traders fous » qui mettent en péril la finance mondiale (1/2)

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Par Christian Brécy Modifié le 13 juillet 2012 à 15h18

Rejugé ces dernières semaines en appel, Jérôme Kerviel détient depuis janvier 2008 le record de la perte de trading boursier frauduleux.

L’ex-trader de la Société Générale est accusé d’avoir fait perdre à son établissement 4,9 milliards d’euros à la suite d’opérations spéculatives dissimulées.

Il soutient que la banque était parfaitement au courant de ses agissements et qu’elle l’a laissé s’enfoncer pour couvrir les énormes moins-values enregistrées à l’époque sur les « subprimes », les crédits hypothécaires américains à risque à l’origine de la crise financière de ces dernières années, qui ont notamment provoqué la faillite de Lehmann Brothers en octobre 2008.

La Société Générale réfute ces accusations qu’elle considère complètement farfelues. Jérôme Kerviel sera fixé sur son sort le 24 octobre prochain. En première instance, le tribunal l’avait condamné à une peine d’emprisonnement de 5 ans, dont trois ferme et au paiement de 4,9 milliards de dommages et intérêts à la banque.

Cette fois, le ministère public a réclamé 5 ans de prison ferme, alors que la défense a plaidé la relaxe. Si le mécanisme qui a conduit en prison Alexandre, le héros de la série de BD Dantès, présente des similitudes avec le parcours de Jérôme Kerviel, ce n’est pas cet événement qui a inspiré les auteurs de cette bande dessinée à succès.

La Chute d’un trader, premier volet de cette saga financière, est parue fin août 2007, près de cinq mois avant que n’éclate le scandale de la Société Générale. En fait, les auteurs se sont référés à une affaire plus ancienne, en l’occurrence la faillite de la Banque Barings en 1995, provoquée par le courtier Nick Leeson, dont Pierre Boisserie venait de lire les mémoires lorsqu’il a rencontré en novembre 2003 sur un salon de bande dessinée le journaliste Philippe Guillaume, alors spécialiste des marchés financiers aux Echos et aujourd’hui directeur de la rédaction de BDSphère.

De ce fait divers, les deux scénaristes ont imaginé en faire le nœud d’une histoire de machination et de vengeance dans la veine du Comte de Monte-Cristo d’Alexandre Dumas, mais transposée dans les eaux troubles de la finance contemporaine.

La banque de « Sa Majesté »

Retour en arrière. Fin février 1995, le monde de la finance apprend que Nick Leeson, jeune trader britannique de 28 ans, responsable des produits dérivés pour le compte de la Barings à la Bourse de Singapour, a provoqué la faillite de sa banque en spéculant de manière occulte avec l’argent de ses clients sur les marchés dérivés d’actions.

Pris à contrepied par la chute des bourses asiatiques à la suite du tremblement de terre survenu le 17 janvier précédent à Kobe au Japon, le courtier a généré pour 850 millions de livres sterling (1,3 milliard de dollars) de pertes, soit plus du double des fonds propres de l’établissement. Celui-ci doit être mis en cessation de paiement et finit racheté pour la somme symbolique d’une livre sterling par le groupe ING. Le choc est considérable. Car la banque Barings est prestigieuse. Fondée en 1762, c’est la plus ancienne du Royaume-Uni. C’est elle qui a financée en 1803 le rachat à la France de la Louisiane par les Etats-Unis. Surtout, elle gère depuis le roi George V les deniers personnels de la famille royale britannique, y compris ceux de Sa Majesté la reine Elisabeth II.

Identifié, le responsable de la catastrophe tente de rejoindre la Grande-Bretagne en compagnie de sa femme. Reconnu lors d’une escale à l’aéroport de Francfort, il est arrêté le 2 mars 1995 par les autorités allemandes qui l’extradent vers Singapour où la justice de la cité-Etat le condamne à six ans et demi de prison. Atteint d’un cancer du colon dont il parviendra à guérir, il est libéré en 1999, s’installe en Irlande où il se remarie et dirige entre 2006 et 2011 le club de football de Galway United. Aujourd’hui, il continue de donner des conférences sur son aventure qu’il a racontée dans un livre écrit en prison et dont le réalisateur James Dearden tirera un film en 1999 avec Erwan McGregor dans le rôle principal.

Lire la suite : Ces « traders fous » qui mettent en péril la finance mondiale (2/2)

Source : le magazine numérique BDSphère / prépublication du tome 6 de Dantès

Source : numéro 23, la légende du tour de France / numéro 24, la légende du tour de France

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Christian Brécy a longtemps prêté sa plume à de nombreux journaux et magazines d'information économique et financière, avant de revenir à la bande dessinée. Collaborateur de l'hebdomadaire numérique BDSphère qui l'a sollicité pour assurer l'accompagnement rédactionnel de la prépublication du sixième tome de la série Dantès, il conseille aussi plusieurs autres auteurs de bande dessinée financière en préparation.