Les 200 000 victimes des guerres de Vendée : les raisons politiques du silence

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Par Jean-Baptiste Giraud Publié le 24 mars 2023 à 14h26
Le Nouveau Roi De Vendée
Le Nouveau Roi de Vendée - © Economie Matin
200000On estime que 200 000 vendéens ont été massacrés par les colonnes infernales.

Les guerres de Vendée (1793-1796) sont un épisode tragique et méconnu de l'histoire de France. Ces guerres civiles ont opposé les forces républicaines aux royalistes vendéens, faisant près de 200 000 victimes, principalement parmi la population civile. Malgré l'ampleur de ces violences, le sujet a longtemps été occulté, victime d'une omertà persistante. Dans cet article, nous explorerons les raisons politiques de ce déni et l'importance de se souvenir de cette période sombre.

Contexte historique et déroulement des guerres de Vendée

Les guerres de Vendée ont été déclenchées par la levée en masse décidée par la Convention en février 1793. Cette mesure visait à enrôler de force les hommes pour constituer une armée capable de lutter contre les ennemis extérieurs et intérieurs de la République naissante. Dans la région de la Vendée, cette décision a été très mal perçue, exacerbant les tensions entre les habitants, attachés à leurs traditions et à leur religion, et les représentants du pouvoir central.

La révolte s'est rapidement étendue et a pris un caractère de guerre civile, opposant les "Bleus" (forces républicaines) aux "Blancs" (royalistes vendéens). Les combats ont été marqués par des atrocités de part et d'autre, les deux camps se livrant à des représailles et des massacres de civils. Les violences ont atteint leur paroxysme avec la "Terreur blanche" et la "Terreur noire" en 1794, lors desquelles des dizaines de milliers de personnes ont été tuées.

L'omertà autour des guerres de Vendée

Malgré l'ampleur des violences et le nombre de victimes, les guerres de Vendée sont restées longtemps méconnues, voire taboues, dans l'historiographie française. Plusieurs raisons politiques peuvent expliquer ce silence.

La construction d'une mémoire nationale unifiée

Après la Révolution, et surtout sous la Troisième République, la France a cherché à construire une mémoire nationale fondée sur les valeurs républicaines. Les guerres de Vendée, en tant que révolte contre la République, étaient en contradiction avec cette volonté d'unification.

La crainte d'un retour du royalisme

Au XIXe siècle, la France était encore marquée par les luttes entre monarchistes et républicains. Les guerres de Vendée étaient perçues comme un symbole du royalisme, et leur évocation pouvait être considérée comme une menace pour le régime républicain.

La minimisation des violences

Les violences commises par les forces républicaines, notamment les "colonnes infernales" menées par le général Turreau, ont été longtemps minimisées pour ne pas entacher l'image de la Révolution française. Admettre l'ampleur des massacres aurait remis en cause la légitimité du régime républicain et de ses valeurs.

La reconnaissance progressive des guerres de Vendée

Malgré l'omertà qui a longtemps entouré les guerres de Vendée, la mémoire de ces événements a progressivement refait surface à partir du XXe siècle.

Le travail des historiens

Des historiens tels que Reynald Secher et Jacques Hussenet ont contribué à mettre en lumière l'ampleur des violences et à dénoncer la vision manichéenne qui opposait les "bons" républicains aux "mauvais" royalistes. Leurs travaux ont permis de nuancer les représentations et de souligner la complexité des enjeux politiques et sociaux de l'époque.

Les commémorations et les débats publics

Au fil des années, les commémorations des guerres de Vendée se sont multipliées, contribuant à une meilleure connaissance de cette période. Des débats publics ont également émergé, notamment autour de la question de la qualification des violences en "génocide vendéen". Si cette notion reste controversée, elle témoigne de la volonté de reconnaître la spécificité et la gravité des massacres commis.

Les guerres de Vendée et le massacre de 200 000 personnes pendant la Révolution française sont un épisode tragique qui a longtemps été passé sous silence pour des raisons politiques. Il est essentiel de se souvenir de ces événements pour comprendre les enjeux de cette période, mais aussi pour rendre hommage aux victimes et préserver leur mémoire. Les travaux des historiens et les débats publics ont permis de briser l'omertà et de mettre en lumière une réalité complexe, qui doit être intégrée à notre récit national.

Les chefs vendéens : figures emblématiques de la révolte

Les chefs vendéens, souvent issus de la noblesse ou de la bourgeoisie rurale, ont joué un rôle clé dans la conduite de la révolte et sont devenus des figures emblématiques de la résistance à la République.

François-Athanase Charette de la Contrie

Officier de marine issu de la noblesse, Charette de la Contrie est l'un des chefs vendéens les plus célèbres. Il a dirigé les forces royalistes dans le Bas-Poitou et a mené plusieurs victoires contre les républicains. Capturé en 1796, il a été exécuté à Nantes.

Jean-Nicolas Stofflet

Ancien sergent-major de l'armée royale, Stofflet est devenu l'un des principaux chefs vendéens en Anjou. Il a participé à la création du Conseil supérieur royaliste de la Vendée et a été capturé puis exécuté en 1796.

Maurice Gigost d'Elbée

D'origine noble, d'Elbée a été l'un des premiers chefs vendéens à prendre les armes contre la levée en masse. Il a été élu généralissime de l'Armée catholique et royale en 1793, mais a été grièvement blessé et capturé en 1794. Il a été fusillé à Noirmoutier.

Louis-Marie de Lescure

Officier de l'armée royale, Lescure est devenu l'un des chefs vendéens les plus respectés pour son courage et son intégrité. Il a notamment participé à la célèbre Virée de Galerne, une tentative infructueuse des royalistes pour rallier d'autres régions à leur cause. Grièvement blessé lors de cette campagne, il est décédé peu après.

Henri de La Rochejaquelein

Jeune officier de l'armée royale, La Rochejaquelein est devenu le symbole de l'héroïsme vendéen en prenant la tête de l'insurrection à seulement 21 ans. Il a remporté plusieurs victoires contre les forces républicaines et a succédé à d'Elbée en tant que généralissime de l'Armée catholique et royale. Il a été tué au combat en 1794.

Ces chefs vendéens, malgré leur diversité d'origine et de parcours, ont tous incarné la résistance à la Révolution française et la défense de leurs traditions et de leur foi. Leur mémoire reste profondément ancrée dans l'histoire de la Vendée et contribue à la compréhension de cette période troublée.

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Photo Jean Baptiste Giraud

Jean-Baptiste Giraud est le fondateur et directeur de la rédaction d'Economie Matin.  Jean-Baptiste Giraud a commencé sa carrière comme journaliste reporter à Radio France, puis a passé neuf ans à BFM comme reporter, matinalier, chroniqueur et intervieweur. En parallèle, il était également journaliste pour TF1, où il réalisait des reportages et des programmes courts diffusés en prime-time.  En 2004, il fonde Economie Matin, qui devient le premier hebdomadaire économique français. Celui-ci atteint une diffusion de 600.000 exemplaires (OJD) en juin 2006. Un fonds economique espagnol prendra le contrôle de l'hebdomadaire en 2007. Après avoir créé dans la foulée plusieurs entreprises (Versailles Events, Versailles+, Les Editions Digitales), Jean-Baptiste Giraud a participé en 2010/2011 au lancement du pure player Atlantico, dont il est resté rédacteur en chef pendant un an. En 2012, soliicité par un investisseur pour créer un pure-player économique,  il décide de relancer EconomieMatin sur Internet  avec les investisseurs historiques du premier tour de Economie Matin, version papier.  Éditorialiste économique sur Sud Radio de 2016 à 2018, Il a également présenté le « Mag de l’Eco » sur RTL de 2016 à 2019, et « Questions au saut du lit » toujours sur RTL, jusqu’en septembre 2021.  Jean-Baptiste Giraud est également l'auteur de nombreux ouvrages, dont « Dernière crise avant l’Apocalypse », paru chez Ring en 2021, mais aussi de "Combien ça coute, combien ça rapporte" (Eyrolles), "Les grands esprits ont toujours tort", "Pourquoi les rayures ont-elles des zèbres", "Pourquoi les bois ont-ils des cerfs", "Histoires bêtes" (Editions du Moment) ou encore du " Guide des bécébranchés" (L'Archipel).

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