La loi pour la fusion de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) en une nouvelle entité, l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), a été promulguée. Cette réforme, qui a suscité de vives critiques, marque un tournant majeur pour la gouvernance de la sûreté nucléaire en France.
Nucléaire : la fusion des autorités de contrôle aura bien lieu
Un projet de fusion controversé
La fusion de l'ASN et de l'IRSN n'a pas été de tout repos. Très contestée pendant plus d'un an, cette réforme a rencontré une forte opposition de la part de nombreux experts et associations. La principale crainte réside dans la perte d'indépendance des experts, un point souligné par les parlementaires de la Nupes et de Liot. « L'organisation du système dual, qui séparait l'expertise de la décision, est remise en cause », ont-ils dénoncé. Cependant, le Conseil constitutionnel a rejeté ces arguments, affirmant que la loi maintenait une distinction entre expertise et décision.
Promulguée le 21 mai 2024 par le président de la République, cette loi vise à adapter la gouvernance de la sûreté nucléaire aux nouvelles ambitions de la France, notamment la construction de nouveaux réacteurs, dont six EPR de deuxième génération. L'exécutif souhaite « fluidifier » les décisions pour répondre au défi de la relance de la filière nucléaire. Cette volonté de simplification est inscrite dans la loi, qui laisse au futur règlement intérieur de l'ASNR le soin d'organiser précisément le rapprochement des deux organismes. Ce règlement devra fixer « les modalités de distinction » entre les agents chargés d'expertiser les dossiers et ceux chargés de prendre la décision finale.
Plusieurs étapes à venir
La loi prévoit qu'« avant le 1ᵉʳ juillet 2024, le gouvernement remet au Parlement un rapport élaboré » avec les acteurs concernés sur les moyens nécessaires à l'ASNR et au CEA en 2025. Cette évaluation est cruciale, car l'ASN et l'IRSN sont confrontés à une charge de travail inédite avec les nouveaux réacteurs, la prolongation des anciens et les projets de mini-réacteurs. Aujourd'hui, l'ASN emploie environ 530 agents et l'IRSN 1 740, dont certains partiront à la Défense et au CEA. La loi prévoit également la possibilité de nommer un « préfigurateur » pour anticiper l'organigramme de la future ASNR.
La fusion de l'ASN et de l'IRSN sera effective au 1ᵉʳ janvier 2025, avec plusieurs étapes transitoires après la promulgation. Les membres actuels de l'ASN continueront leurs mandats jusqu'à leur terme. D'ici à juillet 2024, un rapport gouvernemental doit évaluer les moyens nécessaires pour l'année 2025 et envisager la nomination d'un préfigurateur. Ce dernier serait chargé de la mise en œuvre de la réorganisation, une étape importante pour assurer la continuité des activités et répondre aux situations de crise. Comme l'a indiqué l'intersyndicale CGT-CFDT-CFE CGC de l'IRSN, un préfigurateur neutre est essentiel pour arbitrer les désaccords existants entre l'IRSN et l'ASN, garantissant ainsi une bonne transition vers l'ASNR.