Alors que plusieurs banques centrales semblent se rapprocher de leur taux terminal, certaines données économiques semblent indiquer qu’un ralentissement économique se profile au deuxième trimestre.
Les marchés financiers face au ralentissement de l’économie américaine
Après le Canada il y a quelques jours, c’est au tour de l’Australie de marquer une pause dans le relèvement de son taux directeur cette semaine du 3 avril 2023. Même si ce n’est pas encore le cas pour la Reserve Fédérale ou la BCE, les dernières communications se sont un peu assouplies, notamment après le stress bancaire qui a soudainement fait irruption le mois dernier.
En attendant le début de la saison des résultats pour les entreprises d’ici quelques jours, on commence à observer quelques chiffres macroéconomiques qui pointent vers un ralentissement de l’activité.
En Europe ce sont les chiffres de la consommation qui surprennent à la baisse : en février la consommation a baissé de 0.8% en mensuel et de 4.1% en annuel. Surprise également négative du côté de l’Allemagne avec une baisse mensuelle de 1.3% en février. Premiers signes d’une « usure » des consommateurs face à une inflation élevée et à des conditions de crédit qui se dégradent ? La zone euro connaît actuellement la plus faible croissance des prêts aux ménages depuis février 2021, d’après les données de la BCE.
Du côté de la Chine, la reprise de l’activité manufacturière est irrégulière comme en témoigne le dernier indice PMI ressorti à tout juste 50.0 (zone qui marque la séparation entre expansion de l’activité et contraction) contre 51.6 le mois précédent.
Outre-Atlantique, l’indice ISM manufacturier continue non seulement d’évoluer sous 50 (contraction) pour le cinquième mois consécutif mais s’est encore dégradé en mars pour tomber à 46.3, son plus bas niveau depuis mai 2020 pendant la crise Covid. Même s’il ne s’agit « que » du secteur manufacturier, sa faiblesse soulève quand même des questions sur la trajectoire économique à venir des Etats-Unis. Et la publication hier de l’ISM Services pour le mois de mars, ressorti à 51.2 contre 55.1 le mois précédent, semble confirmer le ralentissement économique sachant que les services représentent trois quarts de l’économie américaine. La composante « nouvelles commandes » de l’ISM est tombée à 52.2 en mars contre 62.6 en février...le risque de contraction de l’économie américaine au deuxième trimestre est bien réel.
Après la publication de ces chiffres, la Fed d’Atlanta a révisé à la baisse sa prévision de croissance pour le premier trimestre à 1.5%. C’est encore un chiffre tout à fait correct mais quelques semaines auparavant, cette prévision évoluait encore à près de 3.5%.
On constate donc un net ralentissement des prévisions de croissance sur la fin du trimestre, qui correspond également au déclenchement de la phase de stress pour les banques. Ce stress bancaire devrait durcir les conditions financières aux Etats-Unis (via des taux plus élevés et moins de crédit disponible) de l’aveu même du président de la Fed lors de la dernière réunion de politique monétaire. C’est également le même son de cloche en Europe où Christine Lagarde a laissé entendre que ce stress bancaire allait faire une partie du travail, jusqu’alors réalisé par les banques centrales, en durcissant mécaniquement les conditions financières…
Alors que les soutiens budgétaires/fiscaux sont beaucoup moins présents avec la fin du « quoiqu’il en coûte » et avec la baisse des stocks d’épargne post-Covid, la fatigue des consommateurs en Europe et aux Etats-Unis devrait s’accentuer au deuxième trimestre, limitant également du coup la capacité des entreprises à relever leurs prix, contrairement à l’année dernière.
Même si cet environnement va de plus en plus limiter l’agressivité des banques centrales (Fed et BCE devraient atteindre leur taux terminal au cours de ce trimestre, la Fed l’ayant peut-être même déjà atteint), le ralentissement économique pourrait peser quelques temps sur les marchés actions et entretenir la volatilité, avant que le ton des banques centrales ne s’assouplisse réellement. Pour résumer : une phase de friction temporaire sur les marchés, entre des données économiques dégradées et des banques centrales qui ne pivotent pas encore en raison de niveaux d’inflation toujours élevés.
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