L’essence à prix d’or : une perspective qui pourrait bien devenir réalité dans les prochaines années. L’introduction de l’ETS2, un nouveau marché carbone européen, ainsi que d’autres mécanismes de taxation et de régulation, pourraient faire grimper les prix du carburant de 23 centimes par litre.
ETS2 : la nouvelle taxe européenne vous coûtera cher à la pompe
Le 1er janvier 2027, l’Union européenne mettra en place l’ETS2, un nouveau marché carbone qui imposera aux distributeurs d’énergie de payer pour chaque tonne de CO₂ émise par les carburants et le chauffage. Cette réforme, combinée à d’autres facteurs fiscaux et environnementaux, pourrait engendrer une hausse de 15 centimes par litre à elle seule, voire 23 centimes en intégrant d’autres taxes et obligations. Selon l’Ufip Énergies et Mobilités, interrogé par Les Echos, cette augmentation est comparable à celle qui avait déclenché le mouvement des Gilets jaunes en 2018.
L’ETS2 : le nouveau coup de massue sur les prix des carburants
L’ETS2 (Emissions Trading System 2) est une extension du marché carbone européen existant depuis 2005, qui oblige déjà les grandes industries polluantes à acheter des quotas d’émission de CO₂. Cette fois-ci, le dispositif s’appliquera aux carburants et au chauffage des bâtiments.
Cela signifie que les distributeurs de carburants (comme Total, Shell ou les stations-service indépendantes) devront acheter des quotas pour chaque tonne de CO₂ émise par l’essence, le diesel ou le gaz naturel. Ce coût sera répercuté sur les consommateurs, et aucun quota gratuit ne sera distribué.
Une hausse estimée à 15 centimes par litre
D’après l’Ufip et la Cour des comptes, dont l’analyse a été relayée par Les Echos, l’ETS2 pourrait entraîner une hausse des prix du carburant de 10 à 11 %, soit environ 15 centimes par litre. Si ces prévisions se confirment, faire le plein coûtera environ 11,50 euros de plus pour un réservoir de 50 litres d’ici quelques années.
Autres facteurs aggravants : entre écologie et fiscalité, un cocktail explosif
Les certificats d’économie d’énergie (CEE) : une nouvelle taxe cachée
En parallèle de l’ETS2, un autre mécanisme pourrait alourdir encore la facture : les certificats d’économie d’énergie (CEE). Ce dispositif, qui oblige les fournisseurs d’énergie à financer des projets de rénovation énergétique ou l’achat de véhicules électriques, coûte déjà 8 centimes par litre de carburant.
Or, selon l’Ufip, si l’État opte pour la fourchette haute des économies d’énergie, ce coût pourrait doubler et atteindre 16 centimes/litre d’ici 2030.
L’incorporation de biocarburants : une bonne idée qui coûte cher
Les distributeurs sont également contraints d’incorporer des biocarburants dans l’essence et le diesel, une politique qui vise à réduire l’empreinte carbone des carburants traditionnels. En 2024, cette obligation représentait 5,8 centimes par litre, contre 2,7 centimes en 2019. Si ces objectifs continuent d’augmenter, le coût des biocarburants pourrait ajouter plusieurs centimes supplémentaires au litre d’ici la fin de la décennie.
Facteur | Hausse estimée |
---|---|
ETS2 (marché carbone) | +15 centimes/litre |
Certificats d’économie d’énergie (CEE) | +8 centimes/litre (actuellement), risque de doublage à 16 centimes |
Incorporation de biocarburants | +5,8 centimes/litre |
Total potentiel | +23 centimes/litre |
Explosion du prix des carburants à cause de l’Europe : vers un retour des Gilets jaunes ?
Si l’on additionne l’ETS2, les CEE et les biocarburants, la hausse totale pourrait atteindre 23 centimes par litre dans les prochaines années. Une augmentation similaire à celle qui avait conduit aux manifestations des Gilets jaunes en 2018, lorsque la hausse de la TICPE (taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques) avait fait flamber les prix du carburant de 30 centimes/litre pour le diesel et 16 centimes pour l’essence.
Cette perspective inquiète les professionnels et les associations de consommateurs, qui redoutent un nouveau mouvement de contestation sociale. Pour Olivier Gantois, président exécutif de l’Ufip Énergies et Mobilités, il faut que la fiscalité prenne en compte la part d’énergie fossile et le bilan carbone des carburants, afin d’atténuer l’impact sur les consommateurs. « Dire que l'on va sortir du pétrole est faux. Même si l'on respecte les objectifs fixés, la France aura encore besoin de 16 millions de tonnes de pétrole en 2045. Et 45 millions de tonnes si l'on suit la trajectoire actuelle », explique ce dernier sur Les Echos. De son côté, l'UFC-Que Choisir alertait déjà en septembre 2024 estimant que l'ETS2 pourrait conduire à une hausse des factures d'énergie des ménages pouvant atteindre 650 euros par an selon les profils.
10 milliards d’euros à compenser pour l’État
Un autre problème majeur se pose pour les finances publiques : la baisse attendue des recettes fiscales issues des carburants. En effet, la transition vers l’électrique et les biocarburants va progressivement réduire la consommation de carburant fossile, privant l’État d’une manne estimée à 10 milliards d’euros d’ici 2030. Or, malgré les efforts affichés par le gouvernement, la consommation d’essence ne baisse que de 1 % par an en moyenne, loin des -6 % par an prévus par la feuille de route énergétique.
ETS2, CEE, biocarburants : vers une explosion des prix à la pompe ?
L’introduction de l’ETS2, combinée aux CEE et aux obligations sur les biocarburants, va inévitablement faire grimper les prix des carburants. Si les prévisions de l’Ufip et de la Cour des comptes se confirment, la hausse pourrait atteindre 23 centimes par litre d’ici quelques années. Une augmentation qui risque de mettre les ménages en difficulté… et alimenter une grogne sociale latente mais toujours bien présente.