Emploi : comment les auto-entrepreneurs changent le marché le travail ?

Les entreprises font de plus en plus appel à des non salariés pour compléter leurs équipes internes. Pascal Ferron, président de Walter France, et fondateur de la plateforme MonEntrepriZ, dédiée aux auto-entrepreneurs, explique pourquoi leur mode de fonctionnement correspond à la nouvelle tendance du travail collaboratif en éco-système, et en quoi les entreprises y trouvent-elles de nombreux avantages.

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Par Pascal Ferron Publié le 27 avril 2024 à 6h00
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Emploi : comment les auto-entrepreneurs changent le marché le travail ? - © Economie Matin

Depuis quelques années, les modes de travail évoluent. Ce qui n’était qu’un frémissement avant la pandémie s’est épanoui durant celle-ci, pour devenir depuis une tendance lourde du fonctionnement des entreprises. Comment expliquer ce phénomène ?

Davantage d’autonomie et de liberté

Rappelons que le statut d’auto-entrepreneur permet à des créateurs d’entreprise de se lancer dans l’aventure entrepreneuriale sans les lourdeurs administratives du statut de société. Selon une récente étude d’un cabinet de recrutement*, leur motivation première, pour 44 % d’entre eux, est la flexibilité d’organisation que ce statut permet. Vient ensuite la rémunération, pour 38 % : en effet, à budget équivalent qu’une entreprise est prête à octroyer pour réaliser une mission, le « net » sera plus important pour l’auto-entrepreneur, ses charges sociales étant moins lourdes, que celles d’un salarié. En troisième position, pour 29 % d’entre eux, arrive l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée. Être à son compte permet de s’organiser comme on le souhaite, en travaillant tout autant voire plus, mais avec une efficacité décuplée en termes de gestion du temps, et surtout une grande liberté d’action, sans poids hiérarchique autre que celui assumé de la relation client. Or, celle-ci va plus de soi quand on est bon techniquement et que la qualité est au rendez-vous, et le statut s’en trouve finalement moins risqué que celui de salarié qui peut toujours se retrouver à France travail pour des raisons indépendantes de la qualité de son travail (changement de politique, de stratégie, fin de projet, recentrage d’activité quand ce n’est pas fermeture…).

L’engouement pour l’auto-entrepreneuriat ne se dément pas sur le long terme : plus de 4,3 millions d’indépendants étaient décomptés en 2022, soit près de 50 % d’augmentation en dix ans, selon l’Urssaf, avec une création annuelle qui va croissante et emporte largement le nombre de créations d’entreprises, tous types confondus, à des records d’année en année.

Un statut devenu largement légitime

Si l’on revient ne serait-ce que dix ans en arrière, les auto-entrepreneurs étaient encore considérés par les entreprises comme une alternative en quelque sorte peu fiable au salariat, voire jugés largement péjorativement et avec condescendance par beaucoup, les assimilant à des « petits boulots » sans avenir. Cette époque est fort heureusement totalement révolue. Aujourd’hui, la plupart des donneurs d’ordre ont intégré et banalisé le recours à l’auto-entrepreneuriat, qui a gagné ses lettres de noblesse en équité avec les CDD ou l’intérim grâce à des entrepreneurs fiables, engagés et compétents, et surtout grâce au développement du télétravail : de manière opérationnelle, la frontière s’efface entre un salarié en télétravail et un auto-entrepreneur sans obligation de présence dans l’entreprise.

Les auto-entrepreneurs, fers de lance du travail collaboratif

Plus intéressante encore est cette tendance de fond du travail en éco-système. L’organisation hiérarchique laisse la place à une mobilisation des compétences nécessaires au sein d’équipes projets. 47 % des entreprises ont déjà recruté des ressources externes : free-lances, CDD, intérimaires. Dans cette logique, les auto-entrepreneurs ont toute leur place et leur légitimité, forts de l’expérience diversifiée également acquise auprès de leurs autres clients.

Pour les entreprises, les principaux avantages de faire appel à des collaborateurs externes sont la flexibilité et la réduction des coûts, mais aussi la meilleure précision de l’adéquation des compétences requises à un moment donné sur un sujet donné. Les collaborateurs occasionnels leur permettent d’adapter la taille de leurs équipes et leurs compétences en fonction de leurs projets. De plus en plus nombreuses sont celles qui font appel à des auto-entrepreneurs de manière récurrente.

Des interventions efficaces, dans les délais

En effet, les auto-entrepreneurs ne servent pas seulement de variable d’ajustement en termes de ressources disponibles. Ils ont bien d’autres avantages. Ils sont payés au temps passé et/ou à la mission, et une fois le travail effectué. Autant dire qu’ils ont tout intérêt à tenir les délais et à être efficaces. En effet, autant un dirigeant ne se pose pas la question de verser un salaire à la fin du mois, autant il va étudier attentivement la facture de son prestataire : les temps improductifs ne sont pas tolérés. L’auto-entrepreneur doit prouver la réalité du travail effectué, son utilité, et les résultats produits.

Pour Pascal Ferron : « Dans cette logique, l’auto-entrepreneur, en sa qualité d’intervenant externe, peut être, au sein d’une équipe, l’un des moteurs pour faire avancer le groupe et faire aboutir les projets. Les dirigeants apprécient cette culture de l’efficacité. »

A ce jour, selon cette même étude*, pour 58 % des entreprises, les collaborateurs externes ne représentent encore que moins de 5 % de leurs ressources. Mais pour 21 % d’entre elles, cette part s’élève déjà entre 6 et 15 %. Nul doute que cette tendance du travail en éco-système va encore s’amplifier dans les années à venir, dans la même lignée que l’augmentation du nombre des auto-entrepreneurs.

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Expert-comptable et commissaire aux comptes, diplômé de l’ESC Poitiers. Actuellement et depuis plus de 25 ans, il dirige les sociétés d’audit et de conseil FIMECOR Walter Allinial et FIMECO Walter France, membres du réseau Walter France dont il est vice-président en charge des grands comptes et des partenariats.Il effectue des missions pour le compte d’entrepreneurs, qu’ils soient chefs d’entreprises ou directeur de BU dans des grands groupes internationaux et de leurs filiales. Spécialisé en reprise d’entreprises depuis plus de 20 ans, il mène environ 30 à 40 missions d’audits d’acquisition ou d’évaluation par an, sur toute taille d’entreprise pour le compte de groupes en stratégie de croissance ou d’anciens cadres souhaitant devenir chefs d’entreprises, dispose d’une chronique dans la newsletter « L’Entreprise » sur la reprise d’entreprise, « coache » plusieurs dizaines de repreneurs et participe aux formations sur la reprise d’entreprises au CRA, à HEC entrepreneur, à la CCIP ainsi qu’à l’exécutive MBA d’HEC. Il dirige également des missions de restructurations administratives, financières, ou organisationnelles.

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