Alors que la France mise sur le nucléaire pour assurer son indépendance énergétique, un problème technique surgit sur le chantier des EPR2 à Penly. L’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection demande à EDF de justifier la qualité du béton d’une digue en construction, selon les informations de Mediapart et Reporterre.
Nucléaire : à Penly, déjà un premier couac pour EDF ?

EPR2 : un chantier déjà sous tension
À Penly, en Seine-Maritime, EDF construit deux nouveaux réacteurs EPR2, censés garantir la production d’électricité pour les décennies à venir. Pour protéger la centrale de l’érosion et des aléas climatiques, une digue de 15 000 blocs en béton est prévue. Toutefois, l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) a détecté une anomalie dans la composition du béton : la teneur en silex des granulats serait inférieure aux prévisions initiales.
Si l'ASNR ne remet pas immédiatement en cause la conformité du béton, elle exige quand meme des clarifications de la part d’EDF. L'autorité souhaite qu'EDF grandisse la robustesse de la digue face aux intempéries et à l’érosion marine.
Le projet EPR2 à Penly représente un investissement colossal. Emmanuel Macron a annoncé en 2022 la construction de six réacteurs de ce type, dont deux sur le site normand. Pourtant, alors que les travaux préparatoires avancent, avec 650 personnes sur ce chantier, les réacteurs EPR ont déjà fait parler d’eux avec les retards et les surcoûts abyssaux de Flamanville. EDF et ses partenaires doivent prouver qu’ils ont appris des erreurs passées.
Ce couac sur le béton rappelle à quel point il est difficile de s'assurer que les matériaux utilisés sont irréprochables sur un chantier de cette ampleur. Si le béton utilisé pour la digue n’est pas directement destiné aux bâtiments nucléaires, il est essentiel pour la protection du site. Un défaut de conception pourrait engendrer des réparations coûteuses, voire remettre en question la viabilité de l’ensemble du projet.
EDF doit se justifier
EDF assure que le béton utilisé est conforme aux exigences techniques et que les contrôles sont rigoureux. L’entreprise rappelle que la fabrication des blocs a débuté le 4 mars 2025 après plusieurs tests et ajustements. Pourtant, des analyses indépendantes ont relevé des écarts entre les taux de silex déclarés et ceux effectivement mesurés dans les échantillons.
EDF est déjà sous tension pour tenir les délais et maîtriser les coûts du programme nucléaire, et cette polémique ne fait qu’ajouter à la pression. Avec une mise en service prévue vers 2035, tout retard ou problème de conception pourrait avoir des répercussions économiques et politiques. L’État, principal actionnaire d’EDF, devra trancher en 2026 sur le financement du projet, un dossier épineux qui conditionnera l’avenir des EPR2 en France. Ce point sera abordé lors du Conseil de politique nucléaire prévu aujourd'hui à l'Élysée par le Président de la République.
On peut dire que la rigueur des normes de sûreté appliquées au chantier de Penly est tenace. L’Autorité de sûreté nucléaire insiste sur le principe de précaution et demande à EDF de prouver que la variabilité des granulats ne compromettra pas la solidité de la digue. Si des correctifs sont nécessaires, cela pourrait retarder les travaux et alourdir la facture.
Le nucléaire est un secteur où l’approximation n’a pas sa place. Les problèmes de béton, même mineurs, rappellent que la qualité des matériaux conditionne la fiabilité des infrastructures. Après les déboires de Flamanville, EDF joue une partie serrée. Un faux pas supplémentaire et la crédibilité du programme EPR2 pourrait être sérieusement entamée.