Restos du Cœur : la France au bord du précipice

Les déclarations du délégué général des Restos du Cœur, Jean-Yves Troy, ont suscité une grande inquiétude au sein de la population française. Pour la première fois dans son histoire, les Restos du Cœur pourraient ne plus être en mesure d’accueillir tous les nécessiteux.

Axelle Ker
Par Axelle Ker Publié le 6 octobre 2023 à 10h30
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Restos du Cœur : la France au bord du précipice - © Economie Matin

Les Restos du Cœur vont devoir refuser du monde

« À partir de novembre, nous allons refuser du monde, pour la première fois dans l'histoire des Restos du Cœur », a déclaré Jean-Yves Troy, jeudi 5 octobre 2023 lors d'une audition à l'Assemblée nationale.  Depuis le début de l'année 2023, l'association a enregistré une augmentation de 15% de nouveaux bénéficiaires : « Les Restos du Cœur ne sont pas dimensionnés aujourd'hui pour distribuer 170 millions de repas, pour accueillir 1,3 million de personnes, soit 200.000 de plus en un an ». Le délégué général de l'association souligne l'évolution de la demande et le changement des profils des bénéficiaires des Restos du Coeur : « Nous avons vu une transformation du profil de nos bénéficiaires. Les travailleurs pauvres, les étudiants et même certains retraités viennent désormais frapper à notre porte ».

L'augmentation des prix des denrées alimentaires (+23 % en deux ans et 14,5 % rien que pour l'année 2023), conjuguée à la crise énergétique (+25 % sur l'électricité en 2023) met en péril la mission même des Restos du Cœur. Pour faire face à la situation, l'association n'a d'autre choix que de réduire le nombre de bénéficiaires en durcissant les conditions d'accessibilité de leur aide : « Nous allons baisser les dotations et nous réduisons aussi les critères d'accès à l'aide alimentaire au sein des Restos ». Face à la situation, Olivier Véran, porte-parole du gouvernement, a réagi auprès de nos confrères de LCI : « On ne laissera pas tomber les Restos du Cœur. Il y a besoin de revoir le plafond de subventions, il sera revu (...) La ministre des Solidarités, Aurore Bergé, est en lien avec eux pour discuter à la fois des subventions et des modalités de fonctionnement, de manière à ce que les Restos puissent rester ouverts et accueillir le maximum de personnes, y compris en novembre et en décembre ».

La situation de la France ne cesse de s'empirer

« D’ici à la fin de l’année, je ne veux plus personne dans les rues » avait annoncé le président Emmanuel Macron lors de son élection pour son premier mandat en 2017. Mais depuis, la crise sanitaire de 2019 et la crise économique ont placé la France dans une situation sans précédent. Selon les chiffres de l'observatoire des inégalités, près de 5 millions de personnes vivaient avec moins de 940 euros par mois en 2020, cela représente près de 8 % de la population française ! Les inégalités ne cessent de se creuser en France. En effet, selon les chiffres du Secours Populaire de 2023, près de 32 % des Français ont déclaré renoncer à avoir une alimentation saine et à vivre dignement.

En effet, malgré la générosité des Français et les multiples dons des entreprises mais aussi de l'État (don de 5 millions d'euros de la part de Bernard Arnault et 10 millions d'euros de l'État), la situation des Français ne cesse de s'aggraver. Les Restos du Cœur ne peuvent faire face à la demande croissante, et ce, malgré le soutien des bénévoles et des dons du public : 73.000 bénévoles réguliers et près de 30 000 ponctuels, pour 1,3 million de personnes bénéficiaires.

Les perspectives pour l'association, mais aussi pour les Français sont sombres. Si le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, a évoqué la mise en place de mesures d'urgence, celles-ci restent encore floues. La France fait face à une crise économique « brutale » et « massive » selon Jean-Yves Troy, elle touche l'ensemble des secteurs : immobilier, alimentaire, énergétique, etc. Les Français ont de plus en plus de mal à subvenir à leurs besoins alimentaires, mais aussi à se loger. Patrice Douret, président de l'association des Restos du Cœur, conclut : « C'est un crève-cœur de devoir refuser du monde. Mais nous sommes à bout de ressources. »

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Axelle Ker

Diplômée en sciences politiques et relations internationales, journaliste chez Économie Matin & Politique Matin.

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