Santé : le gouvernement veut geler les crédits de l’aide médicale d’Etat

Alors qu’une augmentation du budget de l’Aide Médicale d’État (AME) était initialement prévue, le gouvernement français a surpris en se déclarant favorable à un gel des crédits pour 2025. Quel sera l’avenir de ce dispositif destiné aux sans-papiers ?

Jean Baptiste Le Roux
Par Jean-Baptiste Le Roux Publié le 16 octobre 2024 à 11h30
Le gouvernement envisage de geler les crédits de l'aide médicale d'Etat. Unsplash
Le gouvernement envisage de geler les crédits de l'aide médicale d'Etat. Unsplash - © Economie Matin

Un tournant budgétaire inattendu

Le gouvernement a récemment annoncé un gel des crédits de l'Aide Médicale d'État (AME), un revirement majeur après avoir envisagé une hausse du budget pour 2025. L’AME, qui assure la couverture médicale des personnes en situation irrégulière en France, devait initialement bénéficier d’une augmentation de 8%, portant son enveloppe à 1,3 milliard d’euros. Mais face aux pressions croissantes autour du contrôle des dépenses publiques, le ministre du Budget, Laurent Saint-Martin, a justifié cette décision en expliquant la nécessité de mieux maîtriser les finances de l’État.

Le gel des crédits, selon le gouvernement, ne signifierait pas la suppression de l’AME, mais plutôt un contrôle plus strict de ses dépenses. La ministre de la Santé, Geneviève Darrieussecq, a d’ailleurs insisté sur le fait que l’AME resterait un "enjeu de santé publique et d’humanité" et que toute modification éventuelle serait minime. Cette aide, qui permet une prise en charge complète des soins médicaux pour les sans-papiers résidant depuis plus de trois mois en France, reste donc un point central des débats sur les politiques de santé.

Un enjeu politique et social sous tension

L’annonce du gel des crédits de l'AME n’a pas manqué de susciter des réactions. Alors que le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, a plusieurs fois exprimé sa volonté de réformer ce dispositif, certains acteurs politiques, en particulier au sein du Rassemblement National (RN), ont réagi vivement. Le RN propose de remplacer l’AME par une aide d’urgence réduite, arguant que ce système coûte trop cher et favorise une immigration incontrôlée. Selon eux, l’enveloppe actuelle de l’AME, bien que représentant seulement 0,5% du budget de la sécurité sociale, demeure trop élevée.

D’autres élus et associations, à l'inverse, voient dans ce gel une menace pour l’accès aux soins des populations les plus vulnérables. Ils soulignent que l’AME, en plus d’être un droit fondamental, permet d’éviter des situations de crise sanitaire en facilitant l’accès aux soins préventifs. Pour ces défenseurs, un gel des crédits risquerait d’aggraver les conditions de vie des sans-papiers, tout en surchargeant les services d'urgence des hôpitaux.

Vers un débat plus large sur l’immigration ?

L’annonce de cette mesure intervient dans un contexte plus large de débat sur l’immigration en France. Alors que le gouvernement prépare une nouvelle loi sur l’immigration, certains craignent que l’AME ne devienne un point de crispation majeur. En effet, plusieurs élus de droite, et même au sein de la majorité, plaident pour une réforme en profondeur de ce dispositif, le jugeant trop permissif. Ils souhaitent redéfinir les contours de cette aide afin de la limiter aux situations d'urgence vitale, réduisant ainsi les coûts pour l’État.

Toutefois, la ministre de la Santé a fermement indiqué qu’il n’était "pas question de mélanger l’AME avec la loi sur l’immigration". Cette séparation des deux dossiers est perçue comme un moyen d’apaiser les tensions, tout en préservant un dispositif perçu comme indispensable pour une partie de la population. Reste à savoir si cette position pourra tenir face aux pressions politiques et budgétaires.

Un avenir incertain pour l’AME

Alors que l’AME concerne environ 466.000 personnes en France, la décision de geler les crédits inquiète les professionnels de la santé. Certains estiment que cette mesure pourrait avoir des conséquences sur la qualité et la rapidité de prise en charge des bénéficiaires. En effet, sans augmentation de budget, l’AME devra continuer à fonctionner avec des moyens limités, alors que la demande pour ce service pourrait augmenter.

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Jean Baptiste Le Roux

Jean-Baptiste Le Roux est journaliste. Il travaille également pour Radio Notre Dame, en charge du site web. Il a travaillé pour Jalons, Causeur et Valeurs Actuelles avec Basile de Koch avant de rejoindre Economie Matin, à sa création, en mai 2012. Il est diplômé de l'Institut européen de journalisme (IEJ) et membre de l'Association des Journalistes de Défense. Il publie de temps en temps dans la presse économique spécialisée.

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