L’automatisation de l’industrie génère de nouveaux risques pour les entreprises

Big data, systèmes cyberphysiques (SCP), usines intelligentes : si ces technologies relevant de l’industrie 4.0 reposent principalement sur l’IA, une intervention humaine reste parfois nécessaire. Une réalité qui a donné naissance au terme industrie 5.0. Mais l’essor de l’informatique quantique et d’une nouvelle génération de nanotechnologies annonce déjà une autre révolution industrielle, baptisée industrie 6.0.

Fm Gobal Loic Le Dreau
Par Loïc Le Dréau Publié le 23 avril 2024 à 5h00
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L’automatisation de l’industrie génère de nouveaux risques pour les entreprises - © Economie Matin
12,7 MILLIARDS €En 2020, le marché français de l’automatisation industrielle était évalué à environ 12,7 milliards d’euros.

Quel que soit le nom qu’on lui donne – appelons-la « industrie X.0 » – la transformation est en marche et s’accompagne de risques en constante évolution pour les entreprises.

Industrie X.0 : une révolution portée par l’automatisation

L’automatisation est au cœur de toutes les révolutions industrielles du 21e siècle. Les robots sont plus intelligents (grâce aux technologies numériques, dont l’IA) et mieux connectés (par l’Internet des objets) que jamais. Ils fabriquent des produits, se déplacent dans les entrepôts pour prélever et emballer des marchandises, conduisent voitures et camions, et peuvent même mener des cargos à bon port.

En 2020, le marché français de l’automatisation industrielle était évalué à environ 12,7 milliards d’euros, et sa croissance annuelle était estimée à 7 % jusqu’en 2025. L’industrie française se classe à la huitième place au niveau mondial, derrière la Chine, les États-Unis, le Japon, l’Allemagne, l’Inde, la Corée du Sud et l’Italie. Même si l’automatisation industrielle va continuer à transformer nos vies professionnelles et personnelles, les progrès sont trop lents. L’industrie manque cruellement de personnel qualifié : dans le monde entier, y compris dans des régions d’Asie où la main-d’œuvre était historiquement abondante, les usines ont du mal à embaucher et fidéliser.

À terme, l’automatisation contribuera à réguler cette situation. Le nombre de postes et les compétences requises pour les pourvoir vont changer. À l’heure actuelle, l’industrie X.0 pallie des manques plus qu’elle ne remplace des êtres humains.

De nouvelles opportunités…

L’automatisation du secteur industriel présente des avantages considérables en termes d’optimisation des capacités humaines. Elle va certes entraîner la disparation de certains types d’emplois, mais aussi générer de nouvelles opportunités, en particulier dans la maintenance et dans des rôles à plus forte valeur ajoutée comme la gestion de la satisfaction client et de la qualité. En limitant les opérations manuelles, l’automatisation va aussi réduire le risque d’erreur humaine.

En outre, les progrès majeurs dans le traitement de l’information et l’accès aux données en temps réel vont soutenir l’automatisation et faciliter la prise de décisions. Le suivi en temps réel de la chaîne de fabrication va en effet permettre aux entreprises d’identifier rapidement processus inefficaces et défaillances potentielles, limitant ainsi les arrêts de production. Il s’ensuivra une meilleure utilisation des ressources, donc une réduction des coûts.

Enfin, les entreprises gagneront en agilité et s’adapteront plus rapidement aux évolutions des marchés. Grâce à l’automatisation, elles pourront ajuster les volumes de production, gérer les matières premières, réduire les stocks et limiter les défauts de fabrication. En parallèle, elles réduiront aussi leur impact sur l’environnement.

…et de nouveaux risques

Pour les entreprises qui déploient des efforts importants pour tirer parti des avantages de l’automatisation, il est tout aussi crucial d’analyser les risques qui lui sont associés. Anticiper et gérer les problèmes le plus tôt possible dans un processus de transformation est toujours une stratégie gagnante en termes financiers.

Même les usines les plus automatisées n’échapperont pas aux interruptions d’activité, qui prendront simplement des formes différentes. Ces technologies novatrices et complexes vont changer la donne en matière de compétences recherchées sur le marché du travail : la perle rare devra faire preuve de solides capacités d’analyse et d’une expertise poussée dans de nombreux domaines comme la robotique, les technologies de fabrication, les équipements informatiques, les logiciels, les circuits électriques et le codage. En cas de panne d’un robot, des spécialistes devront établir un diagnostic, gérer les réparations et relancer les opérations dans les meilleurs délais, car le montant des pertes d’exploitation par unité de temps sera beaucoup plus élevé. L’IA peut aider, en fournissant davantage d’informations au fil de l’eau, mais l’utilisation d’informations incorrectes ou incomplètes aura des répercussions beaucoup plus graves.

Autre risque : plus les machines seront contrôlées par des ordinateurs, plus les cyber-attaques seront dévastatrices. Plus largement, la réduction de la présence humaine sur un site augmente le risque qu’un départ de feu ou un bris de machine soit repéré trop tard pour éviter un sinistre majeur. Certes, les capteurs intelligents détectent des problèmes et les machines peuvent réagir dans une certaine mesure, mais ces processus automatisés ne seront d’aucune utilité s’ils ont été mis hors service par un incendie, une inondation, une tempête ou tout autre événement.

Réduire les risques liés à l’automatisation

Comment les entreprises peuvent-elles se préparer à faire face aux risques associés à l’industrie X.0 ? Voici six propositions :

  1. Établir une feuille de route de l’industrie X.0 pour planifier cette transformation sur le long terme. Définir des critères d’investissement, par exemple pour pallier une pénurie de main-d’œuvre qualifiée ou pour remplacer des équipements arrivés en fin de vie.
  1. Adopter la maintenance conditionnelle. À l’heure actuelle, la maintenance est trop souvent planifiée sur une base calendaire, plutôt que selon les besoins réels. Utiliser des capteurs connectés et des outils d’analyse pour surveiller les équipements en continu et prédire les défaillances mécaniques. Lancer une opération de maintenance (ou anticiper une panne imminente) uniquement lorsqu’un équipement dégage trop de chaleur, vibre trop, émet des bruits inhabituels, consomme trop d’électricité ou ne fonctionne pas normalement.
  1. Développer les compétences nécessaires pour réparer des systèmes hautement automatisés, complexes et intelligents, des zones de production jusqu’aux services administratifs.
  1. Revoir le plan d’intervention d’urgence. Dans la mesure où l’environnement de travail change, le plan d’intervention d’urgence doit évoluer aussi.
  1. Faire de la gestion du changement une priorité. Dans l’entreprise du futur, la quasi-totalité des opérations sera pilotée par des logiciels. Comme ceux d’aujourd’hui, ces logiciels seront constamment mis à jour, et chaque nouvelle version présentera potentiellement de nouveaux risques.
  1. Créer un laboratoire d’innovation ou travailler avec des labos existants. Les États, ONG et entreprises qui en ont les moyens peuvent faire appel à ces laboratoires pour tester les innovations les plus prometteuses dans un cadre expérimental. De cette façon, les éventuels problèmes sont résolus avant même le lancement d’une nouvelle technologie.

L’intelligence artificielle promet des avancées passionnantes, mais les risques associés à son utilisation doivent faire l’objet d’une grande vigilance. La prochaine révolution industrielle, quel que soit le numéro « X.0 » qui lui sera attribué, apportera aux entreprises des avantages encore plus décisifs, et génèrera des risques différents. Aussi, il est crucial pour les entreprises d’anticiper leurs évolutions à venir et de gérer ces futurs risques dès aujourd’hui.


Loïc Le Dréau, Directeur général des Opérations de Paris chez FM Global

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Fm Gobal Loic Le Dreau

directeur des Opérations de Paris chez FM Global.

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