Les stocks se remplissent, les flacons réapparaissent, et les officines respirent. Derrière cette embellie se cache une mécanique bien plus complexe qu’une simple livraison manquée. Faut-il se réjouir trop vite ? Pas si sûr.
Antibiotiques : l’amoxicilline sort de la pénurie et redevient disponible en pharmacie
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Publié le 25 mars 2025 à 6h37
65%L'amoxicilline est remboursée à 65% par l'Assurance maladie.
Le 24 mars 2025, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a annoncé une nouvelle qui semblait, il y a encore quelques mois, hors de portée : l’amoxicilline est de nouveau disponible en quantité suffisante en France. Ce médicament, largement prescrit dans le traitement des infections bactériennes, avait été au cœur d’une crise d’approvisionnement dont les conséquences ont frappé aussi bien les professionnels de santé que les patients. Mais alors que les autorités sanitaires assurent le retour à la normale, une question demeure : ce retour est-il vraiment synonyme de stabilité durable ?
Il n’y a presque plus de pénurie d’amoxicilline en France
La pénurie d’amoxicilline, antibiotique le plus consommé en France, avait atteint un seuil critique dès l’hiver 2022. Selon l’ANSM, « les approvisionnements sont réguliers et couvrent les besoins des patients », souligne Franceinfo le 24 mars 2025. Après deux hivers successifs sous tension, la disponibilité retrouvée s’explique par une combinaison de facteurs, notamment la baisse saisonnière des infections respiratoires et les mesures correctrices mises en place par les pouvoirs publics.
Derrière ce soulagement apparent se cache un arsenal d’outils d’urgence : préparations magistrales en pharmacie, canal unique d’approvisionnement par les grossistes-répartiteurs, importations ciblées. Mais si la pression redescend, la vigilance reste de mise, car certains dosages restent sous tension. L’ANSM précise d’ailleurs que « des difficultés persistent [...] pour certains dosages d’amoxicilline/acide clavulanique ».
Médicaments : les mesures exceptionnelles levées pour les pharmacies
Dans ce contexte plus apaisé, les autorités ont décidé de lever progressivement les mesures dérogatoires mises en place pendant la crise. Les pharmacies peuvent désormais s’approvisionner directement auprès des laboratoires, sans passer exclusivement par les grossistes. En parallèle, les préparations magistrales pédiatriques — autrefois mises en œuvre pour pallier l’absence de formes adaptées aux enfants — vont être abandonnées.
L’ANSM reste cependant prudente : « Si la situation venait à se dégrader, la remobilisation de ces mesures pourrait être envisagée ». Une manière de dire que rien n’est gravé dans le marbre, surtout dans un secteur aussi instable que celui de l’approvisionnement pharmaceutique.
La racine du problème : un système pharmaceutique trop fragile ?
Car la vraie question n’est pas tant de savoir si l’amoxicilline est disponible aujourd’hui, mais plutôt pourquoi elle a disparu hier. Ce n’est ni une épidémie exceptionnelle, ni une soudaine envolée de la demande qui ont provoqué cette pénurie. C’est un modèle industriel tendu à l’extrême, où chaque maillon — de la matière première à la distribution — peut se briser sans préavis.
L’amoxicilline n’est pas un médicament orphelin. Il s’agit d’un pilier de l’arsenal thérapeutique, inscrit sur la liste des médicaments d’intérêt thérapeutique majeur. Et pourtant, il a suffi de quelques aléas industriels, couplés à une surconsommation hivernale, pour que le marché s’effondre. L’ANSM rappelle dans son communiqué que « la baisse de la consommation d’antibiotiques [...] a permis de rétablir l’équilibre ».
Anticipation et souveraineté : les leçons d’un effondrement programmé
Plus que jamais, la question de la souveraineté sanitaire est au cœur du débat. Car comment accepter qu’un pays comme la France, avec ses ressources, ses infrastructures et son expertise, puisse manquer d’un médicament aussi essentiel que l’amoxicilline ?
Ce fiasco logistique a mis en lumière les failles de la dépendance aux chaînes de production internationales, notamment en Asie, où une part considérable des principes actifs est encore fabriquée. Les appels à relocaliser la production se multiplient, mais tardent à se concrétiser. En attendant, le système repose sur un fil, et la prochaine rupture — qu’elle concerne les antibiotiques, les corticoïdes ou les antipaludéens — n’est qu’une question de calendrier.
Médicaments : vigilance obligatoire, répit provisoire
L’amoxicilline a réintégré les rayons des pharmacies, mais à quel prix ? Derrière le soulagement collectif, l’examen post-crise révèle un système au bord de l’épuisement. La disponibilité d’un médicament ne devrait jamais être un événement, encore moins une surprise. Elle devrait être une norme. Une évidence. Tant que ce ne sera pas le cas, le soulagement ne sera que temporaire, et les crises sanitaires, toujours au coin du comptoir.