Alimentaire : qu’est-ce qui fait baisser les prix ?

Une déflation surprenante

Bien que la baisse des prix des matières premières et de l'énergie ait joué un rôle déterminant, elle n'est pas l'unique cause de cette déflation alimentaire. « Le recul de 0,3% observé en avril témoigne d'un changement de cap inattendu, que personne n'avait prédit, même parmi les spécialistes », indique Emily Mayer de Circana chez nos confrères du Figaro. La fin des négociations tarifaires entre distributeurs et producteurs à la fin janvier a également été cruciale. Les géants de l’agroalimentaire ont majoritairement consenti à des hausses de prix modérées, avec des augmentations moyennes de 1%, bien en dessous des prévisions.

Les implications de la loi Descrozaille

La loi Descrozaille (EGalim 3), en vigueur depuis le début mars, joue également un rôle significatif. En limitant les promotions, elle a indirectement contraint les industriels à ne pas augmenter leurs tarifs outre mesure. « Cette loi a probablement évité des hausses excessives qui auraient été répercutées sur les consommateurs », analyse Mayer.

La féroce guerre des prix alimentaire

La concurrence exacerbée entre les enseignes alimentaires constitue le moteur principal de la baisse des prix observée. La peur de perdre des parts de marché dans un environnement où les consommateurs sont de plus en plus sensibles aux prix pousse les distributeurs à contenir, voire réduire, leurs marges. « Les distributeurs sont extrêmement prudents et suivent de près les actions de leurs concurrents pour ajuster leurs prix en conséquence », confie un expert du secteur. Cette surveillance mutuelle freine les hausses potentielles et entraîne parfois des baisses ciblées.

Stratégies de rétention de la clientèle

« Ce qui se passe actuellement est un ballet très calculé de réductions et d'ajustements de prix, où chaque centime compte », ajoute l'expert. Les enseignes alimentaires, comme Leclerc, leader du marché, mettent en œuvre des stratégies agressives pour maintenir ou accroître leur clientèle. « Leclerc a utilisé sa capacité à proposer des prix compétitifs pour se distinguer nettement de ses rivaux, détenant maintenant 23,5 % du marché », révèle Jean-Philippe André de l'Ania.

Les distributeurs, tels que Intermarché et Carrefour, ne sont pas en reste. Ils multiplient les initiatives pour ne pas être distancés, allant jusqu'à supporter eux-mêmes certaines augmentations de coûts pour éviter de les répercuter sur le consommateur. « Nous avons choisi de ne pas répercuter les hausses de tarifs sur les prix pour préserver le pouvoir d’achat de nos clients », explique un représentant d’Intermarché, illustrant bien la tension actuelle sur les prix.

La surveillance continue des mouvements de prix par les distributeurs et les industriels suggère que cette tendance à la baisse pourrait se poursuivre, sous réserve de l'évolution des coûts en amont et des choix stratégiques des acteurs du secteur.