Accord Orange/Free : Bouygues n’aura pas les milliards réclamés

Le secteur des télécommunications en France vient de clore un nouveau chapitre d’une saga qui dure depuis plus de dix ans. Trois géants du secteur se livraient en effet une bataille sans merci. Qui ? Bouygues, Free et Orange. Et le conflit est arrivé, sans surprise, devant les juges… à plusieurs reprises. Il faut dire que l’enjeu était de taille : plusieurs milliards d’euros de dommages.

Paolo Garoscio
Par Paolo Garoscio Modifié le 18 juillet 2023 à 15h28
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Accord Orange/Free : Bouygues n’aura pas les milliards réclamés - © Economie Matin
7,5 MILLIARDS €Le chiffre d'affaires de Bouygues Telecom a atteint 7,5 milliards d'euros en 2022.

Orange et Free : un accord d'itinérance source de conflit

Depuis son arrivée sur le marché des télécoms en France en 2012, Free Mobile a conclu un accord d'itinérance avec Orange. Cet accord permet à Free d'utiliser le réseau d'Orange pour fournir des services 2G et 3G à ses clients, avec des débits progressivement réduits depuis 2016. Cet accord, conclu le 2 mars 2011, a été source de tensions entre les trois opérateurs.

Bouygues Telecom, se sentant lésé par cet accord, a estimé qu'il avait des effets anticoncurrentiels. En décembre 2014, Bouygues a adressé une demande indemnitaire au Premier ministre, réclamant 2,285 milliards d'euros en réparation des préjudices subis en raison de la prétendue carence de l'Arcep, le régulateur des télécommunications en France, à réguler cet accord entre 2011 et 2015.

Deux décisions de justice qui donnent tort à Bouygues

Après un rejet implicite de cette demande par le Premier ministre, Bouygues a introduit un recours indemnitaire devant le tribunal administratif de Paris en avril 2016. Cependant, le tribunal a rejeté ce recours en décembre 2020. Bouygues a fait appel de ce jugement en mars 2021.

Le 29 juin 2023, la Cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel de Bouygues, validant ainsi l'action de l'Arcep relative à l'encadrement de l'itinérance dont a bénéficié Free sur le réseau d'Orange entre 2011 et 2015. La Cour a jugé que l'Arcep n'avait commis aucune faute de nature à engager la responsabilité de l'État.

Accord d’itinérance : les implications de la décision

La décision de la Cour a plusieurs implications. D'une part, elle confirme que l'accord d'itinérance entre Free et Orange était compatible avec les objectifs de régulation de l'Arcep. D'autre part, elle souligne que l'itinérance dont a bénéficié Free n'a pas entravé le déploiement de son propre réseau. En effet, Free a atteint l'objectif de 27% de couverture en janvier 2012, de 75% en janvier 2015, et de 90% en janvier 2018, dépassant même cet objectif en couvrant 93,4% de la population par son propre réseau 3G.

La Cour a également indiqué qu'il n'était pas démontré que la stratégie tarifaire de Free avait été permise par l'accord d'itinérance et présentait un caractère déloyal nécessitant une intervention de l'Arcep. En somme, la Cour a conclu que Bouygues n'était pas fondé à soutenir que l'Arcep avait fait preuve d'une carence lourdement fautive de nature à engager sa responsabilité.

Bouygues n’aura donc pas ses 2,3 milliards d’euros. Une bonne nouvelle pour le gouvernement puisqu’en cas de jugement favorable à l’opérateur, cet argent aurait été versé par l’État. Et donc, de fait, par les contribuables.

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Paolo Garoscio

Rédacteur en chef adjoint Après son Master de Philosophie, s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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