Les matières premières ont connu une année très volatile, comme souvent en fin de cycle économique : les prix explosent sous l’effet du faible niveau des stocks avant de s’effondrer lorsqu’une récession se concrétise.
Des matières premières en ordre dispersé
Fait marquant, pour l'heure, cette situation n'a pas conduit à la surperformance habituelle de l'or. De fait, outre la dynamique traditionnelle de fin de cycle exacerbée par la demande excédentaire post-Covid, de nombreuses sources de volatilité sont apparues. Notamment, la guerre en Ukraine, le resserrement monétaire historique de la Réserve fédérale américaine (Fed) et la politique « zéro-Covid » en Chine, le tout sur fond d'accélération de la transition environnementale. Ces événements ont eu des effets propres à chaque matière première. Au total, les indices mondiaux de matières premières ont récemment évolué sans tendance claire.
Dans le sillage de l'invasion de l'Ukraine, le gaz naturel occupe le devant de la scène compte tenu de l'impact des prix élevés de l'électricité sur les perspectives de l'activité en Europe. Son empreinte carbone moins élevée que celle d'autres combustibles fossiles en fait également une ressource essentielle dans le cadre de la transition environnementale. Aujourd'hui, l'Europe se trouve dans une position relativement confortable à l'approche de l'hiver, ses réserves étant remplies à plus de 90%, voire 99% dans le cas de l'Allemagne. Dans ce contexte, les températures automnales relativement clémentes ont entraîné une baisse de 50% des prix par rapport à leur pic du mois d'août alors que les transporteurs de gaz naturel liquéfié (GNL) attendent en mer pour décharger. Si les perspectives à long terme du gaz naturel semblent manifestement soutenues par la transition énergétique, l'évolution des prix des mois à venir sera dictée par les conditions météorologiques, ce qui les rend particulièrement imprévisibles.
Dans le même temps, les cours du pétrole ont rebondi à la suite de la décision de l'OPEP+ de réduire sa production de deux millions de barils par jour. Cette décision s'est appuyée sur l'anticipation d'un excédent de production dans un contexte de ralentissement économique mondial. Alors que leurs dépenses budgétaires nationales nécessitent toujours plus de financement, la posture des pays membres de l'OPEP+ nous semble relativement crédible, si tant est que le ralentissement économique reste mesuré. Nous envisageons donc une stabilisation des cours du Brent aux alentours de USD 90-100 le baril au cours des prochains trimestres.
Le redémarrage de l'activité et le cycle économique désynchronisé en Chine sont d'autres facteurs inhabituels susceptibles de limiter le potentiel baissier des matières premières dans le contexte d'une récession dans les pays occidentaux, dans le cas du pétrole, mais plus encore dans celui des métaux industriels. Notre opinion positive sur les métaux industriels a été remise en cause par les multiples faux départs de l'économie chinoise cette année. Parallèlement, l'accélération de la transition énergétique induite par la guerre en Ukraine et la relance budgétaire considérable en Chine représentent des facteurs haussiers. Une fois que le redémarrage progressif de l'activité en Chine se concrétisera, les prix devraient se redresser rapidement.
Evoquons l'or pour finir. Pendant la majeure partie de l'année, les cours ont été pris en étau entre les risques géopolitiques et de récession, qui apportent un soutien, et des taux américains réels et un dollar fort qui exercent une forte pression baissière. Pour la suite, nous tablons sur une remontée des cours de l'or, une fois que le pivot des banques centrales et des signes plus concluants de reprise de l'économie chinoise auront permis une accalmie sur les taux et le dollar américain.