Il fallait entendre Thomas Piketty hier soir sur France Info (non disponible en podcast). L'économiste, proche du Parti Socialiste, auteur du concept de "révolution fiscale" longuement débattu pendant la campagne électorale, expliquait ne rien comprendre aux propositions présentées le jour même à l'issue du séminaire gouvernemental. Désaprouvant le système du Crédit d'impôt pour les entreprises, qu'il trouve compliqué, désaprouvant les hausses de TVA. Thomas Piketty a une explication : la campagne présidentielle, à laquelle il a pourtant activement participé, n'a fait que survoler les vrais sujets, à commencer par celui de l'économie. Résultat, le gouvernement en place pèche par son manque de préparation.
A écouter Piketty, à entendre le Premier ministre sur TF1, puis à la lire dans les Echos, on aurait tendance à le croire. Dans les Echos, le Premier ministre affirme que le crédit d'impôt proposé pour les entreprises, d'un montant de 20 milliards, aura des effets à long terme, créant 300 000 emplois... d'ici à 2017. Mais sur TF1, le même Premier ministre a parlé d'une fourchette de 300 000 à 400 000 emplois. La différence n'est pas neutre ! Surtout, ce que ne dit pas le Premier ministre, c'est le nombre de destructions d'emplois qui pourrait survenir sur la même période. L'OFCE envisage que la France puisse compter jusq'à 600 000 chômeurs en plus, rien qu'en 2013, s'ajoutant aux 3 millions de chômeurs officiels.
Le mécanisme du crédit d'impôt a créé la surprise, là où le rapport Gallois préconisait une baisse des charges pesant sur les entreprises. Mais à cela le Premier ministre a une explication cartésienne : contrairement à une baisse directe et immédiate des charges, qui aurait coûté immédiatement au budget de l'Etat, le mécanisme du crédit d'impôt, bien qu'actif dès 2013, ne produira ses effets que sur 2014, les entreprises étant imposées sur leurs résultats de l'année passée. Pour les entreprises, le bénéfice ne sera pas immédiat, mais leur permettra néammoins de moins avoir à provisionner pour payer leurs impôts futurs, pourvu que le mécanisme du crédit d'impôt soit clair, et facile à calculer pour les experts comptables...
En attendant, le projet du gouvernement consiste bien à augmenter et simplifier les taux de TVA pour se rattraper, du moins en partie, des réductions d'impôt accordées aux entreprises. Les hausses planifiées de la TVA devraient rapporter 6 milliards d'euros en année pleine. CComme l'annonçait Economiematin.fr dès hier, le taux réduit à 7% passerait ainsi à 10%, dégageant à lui seul 3 milliards d'euros de recettes supplémentaires.