Les CDS souverains : le miroir le plus fidèle de la Les tensions des marchés d’obligations souveraines imposent une nouvelle grille de lecture. Afin d’anticiper avec plus de justesse et de rapidité les sources de risque, l’évolution du marché des CDS souverains (Crédit Default Swaps) livre aujourd’hui des enseignements bien plus pertinents que les ratings attribués par les agences.
Avant la crise des subprimes en 2008, puis des dettes souveraines en Europe qui sévit depuis 2010, il était aisé d’identifier les pays les plus sûrs : les investisseurs se tournaient vers l’une des grandes agences de notation et n’avaient qu’à retenir les émetteurs disposant de la note la plus élevée possible (« AAA »).
La crise des subprimes de 2008 a totalement changé la donne, lorsque les investisseurs ont découvert pour la première fois que leurs investissements pourtant notés « AAA », étaient en réalité très risqués, adossés à des crédits hypothécaires de très mauvaise qualité.
Deux ans plus tard, la crise de la dette souveraine européenne, a été une nouvelle désillusion pour les investisseurs, pris de vitesse par la recrudescence du risque sur des crédits pourtant réputés d’excellente qualité. Et la détérioration des marchés obligataires s’est accélérée. Bon nombre des dégradations de notes souveraines sont survenus très tardivement, au cours des derniers mois. Par effet de contagion, les « downgrades » successifs des dettes grecques, portugaises ou irlandaises ont fini par impacté les pays « coeur » de la zone Euro.
Pour anticiper avec plus de justesse et de rapidité ces nouvelles sources de risque, l’évolution du marché des CDS souverains (Crédit Default Swaps) nous livre aujourd’hui des enseignements bien plus pertinents que les ratings attribués par les agences.
Prenons les primes de CDS à 5 ans et regardons ce qu’elles nous révèlent sur la qualité des dettes allemande, française et norvégienne. Pour l’agence Moody’s, la dette norvégienne est notée « AAA », comme celle de l’Allemagne et de la France. Pour Standard and Poor's, seules la Norvège et l’Allemagne bénéficient de la note suprême, pas la France.
En revanche, au regard des CDS à 5 ans, la Norvège apparaît de loin comme le pays le moins risqué. La « prime d’assurance » requise pour couvrir un défaut éventuel est beaucoup plus faible que celle de l’Allemagne, et, à fortiori, de la France. Le CDS de l’Allemagne (75 points de base, au 17 juillet 2012) est ainsi 2,3 fois plus cher que celui de la Norvège (32 pdb), le CDS de la France l’est 5 fois plus (161 pdb). De quoi remettre en question le statut de valeur refuge ultime du Bund allemand.
Par ailleurs, si le système d’évaluation des agences a tendance à interpréter avec retard la réalité des marchés de taux, les indications fournies par les primes de CDS sont généralement annonciatrices des développements sur les marchés obligataires. Cela a été notamment le cas pour la dette espagnole, dont le CDS à 5 ans a connu des poussées de fièvres successives, bien en amont de chaque dégradation de sa note : par exemple, les CDS espagnols se sont fortement tendus de mars à novembre 2011 (200 à plus de 400 pdb), reflet anticipé d’un regain de tension sur les taux ibériques, qui ont effectivement grimpés de 5.6 % à 6.7 % en l’espace de 5 mois (taux à 10 ans).
Mais la dégradation de la note espagnole par S&P, de AA- à A, n’est survenue que mi-janvier 2012, alors même que les CDS et les taux espagnols refluaient depuis début décembre 2011.
Si les CDS sont des instruments d’investissement souvent décriés, la bonne lecture de leur évolution peut permettre aux investisseurs de réaliser un « bond-picking » éclairé !