À partir de 2014, devrait s'appliquer la réforme défendue de longue date par le président de l'UEFA [Union Européenne des Associations de Football NDLR] qui impose aux clubs de football professionnels une gestion saine de leurs finances. À voir les budgets des équipes italiennes, espagnoles, anglaises - ou bien celui du PSG -, on se dit que, d'ici-là, il y a encore bien du travail.
Depuis un an, le monde du football est en émoi, et se prépare au choc salutaire du fair play financier. Résumons en le principe pour les non-connaisseurs des choses du ballon rond. Sur trois années consécutives, un club de football ne saurait dépenser plus qu’il ne gagne, à concurrence admise d’un déficit de 15 millions d’euros par an, soit 45 millions sur trois ans. Une gestion saine pour un club sain. Très bien.
Cette réforme, dont l’intitulé tient tout de même de l’oxymore, est le projet fondamental de Michel Platini, président de l’UEFA, qui en fait depuis de longues années son cheval de bataille, et voit se dessiner sa concrétisation prochaine en 2014. Inutile de rappeler qu’il y a du boulot. Le montant des déficits anglais, espagnols et italiens pour les seuls clubs professionnels se chiffre respectivement à 4, 3,5 et 2 milliards d’euros.
À coté de ça, le déficit cumulé des clubs français de L1 et de L2 s’élève, cette année à 140 millions d’euros. Les bons élèves de la classe, on vous dit. Notons tout de même, fair play financier ou pas dans la ligne de mire, que ce déficit a triplé entre 2010 et 2011. Et que les introductions en bourse des clubs de football - de Manchester United à l’Olympique Lyonnais - se sont soldés, toutes, par de solides fiascos.
Fair play financier, donc. Prenons donc comme exemple le football espagnol, qui, à juste titre, fait rêver la planète des supporters. Jeu léché, impérial en club, magique en équipe nationale, laquelle équipe voit tous ses joueurs jouer dans des clubs espagnols. Par les temps qui courent, la précision s’impose. Par pudeur, on ne s’étendra pas sur le sort du FC Valence, et on en restera aux deux clubs majeurs, le Real de Madrid et le Football Club de Barcelone.
Concrètement, le Real, c’est quoi ? 590 millions d’euros de dettes cumulées, et 470 millions de recettes annuelles. Le Barça, c’est quoi ? 578 millions de dettes cumulées, et 451 millions de recettes annuelles. Et le football espagnol, c’est quoi ? 752 millions d’euros dûs au fisc espagnol… Et on n’aura pas la cruauté de s’intéresser ici, au foot anglais…
Tout ça pour dire quoi ? Tout simplement pour rappeler à Michel Platini, que si on ne peut qu’être d’accord avec le principe du fair play financier à venir, il serait déjà pas mal de combler, d’une façon ou d’une autre les dettes, afin de repartir sur des bases saines. La Liga espagnole brandit des menaces de rétrogradation des clubs en cas de non-respect des règles ? Demandons à voir, et en particulier au Celta Vigo ou au FC Séville qui, dans les années 1990, menacés de cette sanction, y échappèrent assez facilement. "Du pain et des jeux", les supporters, ultras ou pas, sont une bonne chair à canon quand il s’agit de défendre la survie d’un club… Mais qu’on n’hésite pas à charger dès qu’un fumigène est cracké dans une tribune….
Revenons à nos moutons (noirs). Équilibre des recettes et des dépenses. Je m’appelle le Paris Saint-Germain. Mon actionnaire n’est pas un quelconque oligarque, réchappé de je ne sais quelle escroquerie de la glasnost. Mon actionnaire n’est pas Monaco, (ça pourrait…) mais le Qatar, État souverain. J’aurais pu acheter Le Creusot Football Club mais bizarrement, j’ai acheté le club de la capitale française. J’achète des joueurs renommés (ou sortis de la D2 italienne) à des prix faramineux. 190 millions d’euros, c’est donné, vu le prix du gaz…
En un mercato, je fais plus de dépenses que le budget annuel du septuple champion de France, l’Olympique Lyonnais. Et on vient me parler de fair play financier ? Ca veut dire que je dois équilibrer les dépenses et les recettes pour être au même niveau comptable que le Football Club de Sochaux Montbéliard, et le Valenciennes Anzin Football Club ? Ok. Pas de souci. Sponsoring. Rien n’empêche ma banque ou l’office de tourisme d’être sponsors maillot. Qui viendra me dire que ce ne sont pas des recettes, contractuellement avalisées, sur 4, 8 ou 10 ans ? Et puis rien n’empêche l’Office du tourisme de Valenciennes et de Montbéliard d’en faire autant. À armes égales, je vous dis.
Michel Platini a raison. Il faut réintroduire un peu d’équilibre dans tout ça, tant sportivement - comme il l’a fait avec les équipes est- européennes - que financièrement, en dressant une barrière face à ce qui n’est plus possible et dénature l’esprit d’un sport considérablement affaibli par les Affaires.
Le respect de l'adversaire et l'argent ne sont pas forcément deux notions antagonistes Pour autant, quitte à faire le ménage, autant le faire complètement, et demander deux choses aux clubs, toutes simples, toutes bêtes. Purgez vos dettes, maintenant, de la façon qui vous sied, et jugulez l’inflation salariale qui vous tue. Fair play financier, oui, mais pas au crédit de toutes ces années passées qu’il vous convient de régulariser. Et "Salary Cap" [plafond salarial NDLR] pour éviter l’indécence salariale.
Ce n’est pas compliqué. Il faut une volonté de politique sportive, et là, on pourra comprendre que le respect de l’adversaire, et l’argent commencent à ne plus être antagonistes. Oui, Michel, encore un effort…