L’économie de comptoir du gouverneur de la Banque de France

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Par Charles Sannat Publié le 17 janvier 2019 à 9h19
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@shutter - © Economie Matin

Mes chères impertinentes, mes chers impertinents,

Mes chers et fidèles lecteurs.

Vous savez, je crois que j’ai beaucoup progressé en économie quand je vois les explications désormais données par le gouverneur de ce qu’il reste de notre banque centrale, la Banque de France.

Si, si, je vous assure, moi, l’économiste d’en bas et du bistrot du coin, que dis-je, le gueux de l’éco, je sais faire aussi des calculs super compliqués avec des théories d’économie appliquée super complexes.

Par exemple, si je vous dis que relancer la croissance c’est trop super facile.

Oui, trop super facile, et que même si vous n’avez pas encore pigé, c’est que franchement, les mecs (et les filles), vous déconnez grave, comme dirait notre Jupiter normand.

Par exemple, on a un PIB on va dire de 2 000 milliards d’euros (c’est pour simplifier les calculs, c’est plus facile avec un chiffre tout rond).

Bon, si par exemple on dépense 20 milliards d’argent qu’on n’a pas et que « YAKA » emprunter sur les marchés (pas celui du samedi dans ma ville, z’ont pas autant de pognon les commerçants ambulants de la rue principale), eh ben on va automatiquement augmenter de 1 % la croissance du PIB

Alors en France, comme nous sommes dirigés par des mamamouchis super géniaux, et qu’en plus sont super « zhumains », ils ont décidé d’intervenir pour calmer la grogne des gilets jaunes.

Du coup, ils ont lancé quelques miettes aux gueux (qui ont eu l’outrecuidance de répondre qu’ils voulaient toute la baguette… pffff) pour un montant de 10 à 13 milliards d’euros.

À ces « miettes » viennent s’ajouter d’autres miettes jetées de-ci de-là appelées « déficit budgétaire », pour un montant en gros de 76 milliards d’euros, soit environ 3,2 % de PIB supplémentaires.

Bon, en bas, nous, au bistrot, entre deux « mousses », on ne sait plus trop compter, faut dire qu’on déconne à plein tube et que l’on ne sait que boire nos salaires. Nous sommes des gueux, des illettrés, et on ne compte pas vraiment.

Bref, avec Roger, au comptoir, on se marrait bien en disant qu’ils étaient contents d’eux là-haut, parce qu’ils avaient réussi à faire 1,8 % de croissance du PIB, en dépensant 3,6 % de PIB de nouvelles dettes…

« Eh ! les gars, dit Roger au comptoir, le Charles il vient de me démontrer qu’à chaque fois qu’un énarque de Bercy fait 1 euro de croissance ils ont fait 2 de dettes, c’est vraiment des cons »… Oui Roger, quand tu es devant Mamamouchi 1er et sa garde prétorienne, surtout tu la boucles, et tu dis pas ça, mais l’idée est la bonne. Sont très cons !

Ne surtout pas confier le pouvoir au peuple !

Alors après, au comptoir (je rappelle qu’on a encore le droit de s’accouder à plusieurs sans que cela ne constitue une manif non déclarée), j’aime bien déconner (on est très nombreux à déconner, paraît-il) et je dis à la cantonade, surtout pas de RIC pour le peuple, juste du RICARD… Hein, les gars (et les filles), faut surtout pas vous confier la gestion de la caisse.

Vous ne comprenez rien à la grande économie vous autres, les gueux. Vous êtes des abrutis, vous avez des budgets É-QUI-LI-BRÉS ! Hahahahahahahahah, pauvre de vous, bande de fous, des budgets équilibrés, vous n’y pensez pas.

C’est vrai que quand on voit que cela fait 40 ans que les mamamouchis et les mamamouchettes, tous partis confondus, n’ont pas réussi à équilibrer un seul budget, que quand on voit que les mamamouchis et les mamamouchettes viennent de nous faire accumuler 2 300 milliards de dettes, soit plus de 100 % de notre PIB, qu’une grande partie de la France est dans la rue, que les gilets bleus tapent sur les gilets jaunes, que notre pays se désindustrialise, qu’il y a de moins en moins de services publics, une pression fiscale de plus en plus forte, et que, par exemple, nous avons l’un des taux d’emploi les plus pourris au monde, on se dit qu’effectivement, le bilan global de nos professionnels de la gestion d’un État est globalement brillant… Hahahahahahah, c’est ironique, évidemment. Je n’ose pas dire je « déconne », car Mamamouchi 1er voudrait sans doute m’aider à plus déconner…

Vous fileriez la gestion du budget de la France à 10 mères de famille tirées au sort (parmi les non surendettées de la Banque de France tout de même), je vous assure qu’elles feraient mieux et que tous les sales gosses que nous sommes auraient en plus la gamelle pleine à chaque repas.

De la même manière que l’Arche de Noé fut construite par un amateur et le Titanic fut bâti par des professionnels, la France est consciencieusement coulée par ses « professionnels » et sera, comme à chaque fois, sauvée par de sombres amateurs et autres illustres inconnus. Des gueux quoi !

Je vous laisse donc sur cette merveilleuse dépêche Reuters qui a inspiré cette chronique franchement pathétique par ce qu’elle révèle du triste état de notre si beau pays.

« PARIS (Reuters) – Les mesures d’urgence décidées par l’exécutif pour tenter d’apaiser la contestation des « gilets jaunes » devraient exercer un impact positif sur la croissance de l’économie française à hauteur de 0,1 à 0,2 point, a déclaré mercredi lors d’une audition devant la commission des Finances du Sénat le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau »…

Hahahahahaha, plus je dépense le pognon que je n’ai pas, plus le PIB augmente… Hahahahahaha c’est digne des Shadoks. Surtout, filez pas le pouvoir au peuple, pensez donc, on serait capable de vouloir dépenser plus qu’on a… C’est vrai ça, je ne sais pas si quelqu’un vous l’a déjà dit, mais franchement, de vous à moi, vous coûtez vraiment un pognon de dingue !

Je vous propose, enfin, que nous méditions ensemble sur cette profonde devise Shadoks. Oui, profonde. Nous atteignons ici des sommets de philosophie politico-économique :

« Il vaut mieux pomper d’arrache-pied même s’il ne se passe rien que de risquer qu’il se passe quelque chose de pire en ne pompant pas »... J’attends avec impatience vos commentaires pertinents que je me ferai un grand plaisir de verser (la synthèse) au grand débat national...

Il est déjà trop tard, mais tout n’est pas perdu. Préparez-vous !

Article écrit par Charles Sannat pour Insolentiae

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Charles SANNAT est diplômé de l'Ecole Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d'Etudes Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information-(secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Economique d'AuCoffre.com en 2011. Il rédige quotidiennement Insolentiae, son nouveau blog disponible à l'adresse http://insolentiae.com Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.