La Grèce n'est plus un pays au bord du dépot de bilan, appelé en langage d'agence de notation "défaut sélectif". C'était la note attribuée à la Grèce depuis le 5 décembre dernier, avant que l'Europe n'affirme son soutien massif et permette à Athènes de racheter pour près de 100 milliards d'euros de dette sur les marchés pour... le tiers de sa valeur faciale.
Désormais, La Grèce est notée "B-", ce qui veut dire que sa dette est une valeur spéculative, ce qui est tout de même un immense gag, pardon, un magnifique paradoxe. Les investisseurs qui avaient acheté la dette grecque au cours des dix dernières années, alors bien notée, ont vu sa valeur fondre comme neige au soleil, et plutôt que de tout perdre, ont accepté de la revendre avec une décôte de 70 % (plus le montant des intérêts payés pendant cette période, certes).
Or c'est justement parce que la Grèce vient de racheter une partie de sa dette à prix cassé que Standard & Poor's a remonté de six crans la note du pays ! Puisque la pression de sa dette devient moindre, la Grèce a plus de chance d'arriver à s'en sortir, That's it.. Pourtant, le 5 décembre dernier, Standard & Poor's avait placé la Grèce en situation de défaillance partielle, annonçant que la mesure serait provisoire. Et c'est cette mesure provisoire qui a permis aux investisseurs de se séparer sans remords de leurs titres grecs.
Reprenons lentement : Les agences dégradent la note grecque car vraiment, ca va mal. La Grèce propose aux investisseurs privés de racheter leurs titres à vil prix, grâce à l'argent que l'Europe, le FESF et le FMI vont lui prêter. Les investisseurs vendent, puisque la note de la Grèce est catastrophique. La vente réalisée (en fait, une promesse), la Grèce va mieux, puisqu'elle a récupéré plusieurs dizaines de milliards d'euros de bons du Trésor; un peu comme si elle avait récupéré des chèques en bois chez des débiteurs pour éviter l'interdit bancaire. La dette grecque devenant moins lourde, l'espoir d'une sortie de crise augmente. Les agences remontent sa note. Les investisseurs / spéculateurs payent les pots cassés.
Pendant ce temps, l'argent tant attendu arrive à Athènes. 7 milliards d'euros ont déjà été versés par le FESF et le FMI, qui seront suivis de 27 milliards dans les prochains jours, destinés à honorer justement les rachats de dettes, et à recapitaliser les banques grecques. En 2013, Athènes attend encore près de 18 milliards d'euros venant de l'Europe, et (un peu) du FMI.
Il faut espérer que cette première bonne nouvelle dans un océan de mauvaises qui assaillent la Grèce depuis des années participera au redressement du moral de la population. Les prévisions de croissance restent très noires, avec un repli du PIB estimé à 4 ou 5 % encore en 2013.