Voilà, c’est toujours la même chose. On nous explique que tout va bien, que l’on peut se rendormir tranquillement, que nous avons péché par excès de pessimisme bien sûr, et puis, tout d’un coup, la crise qui "était derrière nous" nous rattrape sournoisement pour nous repasser devant.
En plus, elle nous fait une queue de poisson et hop, l’économie mondiale part dans le décor. Donc finalement, figurez-vous que tout n’irait pas aussi bien que ça ! Il faut bien comprendre que le moral du consommateur, un nouvel être économique aussi virtualisé que l’investisseur, reste la pierre angulaire de l’économie mondiale.
Le plus crétin d’entre eux est le consommateur américain. Si vous écrivez "promotion" sur un mug jaune fluo, il l’achètera. C’est compulsif. Après le premier et le deuxième frigo, il trouvera une place à la cave pour un troisième et un quatrième. Je ne parle même pas du nombre de voitures par famille et des distributeurs automatiques de Coca à la maison afin d’être sûr de devenir obèse. De toute façon, entretenir son diabète est un travail quotidien pour le consommateur américain moyen…
Là, vous allez me dire que je fais de l’antiaméricanisme primaire. Mais pas du tout. Peut-être, au pire, je force un peu le trait. Mais franchement, pour qui a mis les pieds aux États-Unis, à peine ! En plus, le plus important, c’est que justement notre consommateur US n’a plus du tout le moral. Il faut dire qu’exister dans un monde d’hyper-consommation en faisant partie des 48 millions d’abonnés aux food stamps (les soupes populaires modernes sous forme de bons d’achats) n’est pas facile.
Donc, comme on entend des âneries plus nombreuses les unes que les autres, nous allons redire quelques vérités économiques. On vous dit que le chômage baisse aux États-Unis. Non le chômage ne baisse pas aux USA. Il augmente même un peu. On vous fait des effets d’annonces, corrigés par des chiffres revus à la hausse quelques mois plus tard. On change les modes de calcul et on modifie la base de population active. Sans même avoir besoin d’invoquer quelques théories stupides du complot, il suffit de bien comprendre que si tous les particuliers attendent et anticipent le pire, alors le pire se produira.
C’est ce que l’on appelle les phénomènes auto-réalisateurs. Pour les éviter, on triche. On peut même dire que ça part d’un bon sentiment. Mais on vous enfume. On vous dit qu’il y a de la croissance aux USA – en Europe, on vous explique, surtout en France, que nous sommes en croissance 0. Non, il n’y a pas de croissance aux USA. Posons le calcul simple suivant : 2 % de croissance – 3 % d’inflation = – 1 % de croissance négative (c’est-à-dire de la récession).
Le plus grave, c’est que pour obtenir ce – 1 %, il a fallu créer 8 % de nouvelles dettes sur PIB soit : – 1 % + – 8 % = – 9 % de récession aux États-Unis… Pas brillant l’économie US vue comme cela… Alors évidemment, ce n’est pas 9 % de récession bien sûr, disons qu’il y aura bien 9 % de récession lorsqu’il faudra commencer à rembourser les dettes… Demandez aux Grecs, ils en savent quelque chose, et nous, Français, allons l’expérimenter dès 2013 !
On vous dit que l’immobilier va mieux aux USA, il y a même 100 000 mises en chantier supplémentaires. C’est faux. Comme le disait fort justement aujourd’hui même Olivier Delamarche sur BFM TV, pour construire 100 000 maisons, il faut des ouvriers… Donc cela doit se voir dans les statistiques de l’emploi du BTP (les statistiques sont très détaillées en fait). Rien. Pas une embauche. Ce ne sont que des chantiers solidaires, ou des chômeurs mangeant grâce aux food stamps montent leurs maisons en kit eux-mêmes… Ou alors on vous enfume.
Mais rassurez-vous, cela part d’un bon sentiment car il est important que l’Américain moyen pense que sa maison reprend de la valeur. Cela porte le nom d’effet richesse. Je vous passe le fait que depuis un an, les banques ne mettent plus sur le marché les maisons saisies afin de ne plus faire baisser le marché immobilier et donc de pouvoir mieux valoriser ces actifs moisis dans leurs bilans. Au passage, la FED a annoncé hier que finalement on passait le QE3 de 40 milliards de dollars illimités par mois à 50…
Faut dire que le marché immobilier va tellement mieux que bien, que c’est la FED qui rachète aux banques les maisons saisies… Absurde ! On vous dit que l’austérité va nous sauver. Mais c’est faux. On sait très bien quel cercle vicieux va s’enclencher. L’Espagne, la Grèce ou l’Italie avant nous, sans oublier le Portugal, nous montrent la direction… Et pourtant, nous voulons croire que nous pourrons rembourser les dettes. Mais non. Nous ne le pourrons pas. Nous sommes tous, les pays occidentaux, dans une situation irrémédiablement compromise.
On vous dit que tout va mieux que bien à la Bourse. Les marchés financiers, particulièrement US, sont au plus haut ou presque. Sauf que les résultats des entreprises qui commencent à tomber sont mauvais. Aucun secteur n’est épargné. Rassurez-vous, c’est sans doute parce que la croissance mondiale est trop forte. Le luxe va moins bien puisque le Chinois n’achète plus de Vuitton et autres trucs inutiles et très cher. DuPont le chimiste va mal, ce qui prouve sans aucun doute que l’industrie se porte très bien. UPS s’enrhume, ce qui laisse présager un nombre croissant de bidules à transporter d’un point A à un point B… Idem pour la société 3M et j’en passe. Bref, partout les chiffres d’affaires et les bénéfices des entreprises chutent en raison d’une croissance économique mondiale beaucoup trop forte.
Bientôt, on vous dira même "baisse surprise des bénéfices des entreprises", sous-entendu… on ne pouvait pas savoir… Nous sommes les victimes consentantes d’un mensonge auquel nous préférons croire En réalité, nous voulons tous croire, ou plutôt continuer à croire que l’économie va bien, ou qu’elle ira mieux. Nous voulons nous rassurer en nous disant que non, vraiment, ça ne peut pas être la fin de notre système, celui dans lequel nous sommes tous nés et dans lequel nous avons tous grandi ou vieilli. Si nous admettons que ce système dans lequel nous vivons touche à sa fin ou risque de s’effondrer, alors, les perspectives sont immenses, abyssales, et disons-le, pour la majorité d’entre nous, carrément effrayantes.
Comment commercer ? Comment faire ses courses ? Comment se protéger ? Quel Etat ? Quelle police ou justice ? Comment se soigner ? Comment faire si ma carte bleue ne répond plus ? Comment travailler pour gagner de l’argent si tout s’arrête ? Comment faire sans percevoir sa retraite, sa pension, ou son aide ? Comment faire sans Sécu ou CMU ?
Bref, résumé en une question : comment faire pour vivre ? Arrivé à ce stade, tout le monde fait marche arrière, se raccroche aux bonnes nouvelles servies sur un plateau. C’est tellement plus rassurant et confortable. Et là, on se dit que forcément, c’est impossible. ILS (les grands mamamouchis) NE PEUVENT PAS LAISSER FAIRE ÇA… IMPOSSIBLE, c’est beaucoup trop grave. Donc ça ne peut pas arriver. Ouf, ce raisonnement est faux, mais… Je peux retourner devant TF1 m’abrutir de séries TV à la con et me farcir des pubs de plus en plus débilitantes afin de me vanter les mérites de trucs dont je n’ai absolument pas besoin… Mais comment vivre sans ?
Une fois compris et admis tout cela, c’est la psychologie qui va venir au secours de l’économie, eh oui ! Surprenant mais tellement vrai. Car en vérité, nous sommes confrontés ni plus ni moins qu’à un deuil. Nous sommes confrontés au deuil de notre système économique qui repose sur la dette et le principe de la croissance infinie dans un monde fini. Bref… pas bon du tout.
Alors parlons un peu du deuil. C’est passionnant, vous allez voir, et intégralement applicable au cas qui nous occupe. Le deuil est une réaction et un sentiment de tristesse éprouvé suite à la mort d’un proche. Souvent associé à la souffrance, le deuil est aussi considéré comme un processus nécessaire de délivrance nommé résilience. Lorsqu’un événement provoque une crise dans la vie d’un individu, un changement radical est opéré dans la situation établie jusqu’alors.
Le deuil a aussi le sens de "perte définitive" d’un objet auquel on tient. C’est la partie bien sûr qui nous intéresse. L’objet auquel nous tenons tous… c’est notre système économique, qui jusqu’à présent nous permet de subvenir à ce que l’on croit être nos besoins (la nuance est importante, pour ne pas dire essentielle). C’est un processus actif : on dit "faire le deuil". La personne en deuil peut sembler ataraxique, ou dépressive, mais un cheminement intérieur se fait.
Dans un premier temps, il n’est donc pas simple de distinguer ce qui est positif pour la personne. Les travaux d’Elisabeth Kübler-Ross font retenir cinq étapes d’un deuil. Choc, déni : cette courte phase du deuil survient lorsqu’on apprend la perte. La personne refuse d’y croire. C’est une période plus ou moins intense où les émotions semblent pratiquement absentes. La personne affectée peut s’évanouir et peut même vomir sans en être consciente. C’est en quittant ce court stade du deuil que la réalité de la perte s’installe. Le terme de sidération peut tout à fait convenir pour qualifier la réaction de la personne face à l’information. Selon les personnalités, cette réaction peut se traduire par une grande agitation ou une paralysie. C’est ce que nous nommons un choc.
Ensuite, à ce premier état va s’ajouter le refus de croire l’information. Arguments et comportements de contestation, rejet de l’information apportée et vécue comme choquante. Une discussion intérieure ou/et extérieure peut porter sur la vraisemblance de l’évènement annoncé : "Ce n’est pas vrai, pas possible…"
Colère : phase caractérisée par un sentiment de colère face à la perte. La culpabilité peut s’installer dans certains cas. Période de questionnements. Marchandage : phase faite de négociations, chantages…
Dépression : phase plus ou moins longue du processus de deuil qui est caractérisée par une grande tristesse, des remises en question, de la détresse. Les endeuillés dans cette phase ont parfois l’impression qu’ils ne termineront jamais leur deuil car ils ont vécu une grande gamme d’émotions et la tristesse est grande.
Acceptation : dernière étape du deuil où l’endeuillé reprend du mieux. La réalité de la perte est beaucoup plus comprise et acceptée. L’endeuillé peut encore ressentir de la tristesse, mais il a retrouvé son plein fonctionnement. Il a aussi réorganisé sa vie en fonction de la perte.
Les 5 phases ci-dessus peuvent être linéaires mais il arrive souvent qu’un endeuillé puisse faire des retours en arrière avant de recommencer à avancer. Une bonne façon de traverser un deuil est de comprendre ce que l’on vit et de partager ses sentiments et émotions avec des proches ou des gens qui vivent également un deuil. Ces étapes ne se succèdent pas forcément. Il ne s’agit pas d’un mécanisme inévitable.
Certaines personnes peuvent quitter un deuil et passer à l’ultime étape de liberté d’action, sans que les sentiments qu’elles pouvaient porter puissent être considérés comme négligeables. Vous l’aurez compris, nous nous situons tous plus ou moins encore dans la phase de déni. Nous ne voulons pas croire que notre monde risque probablement de changer très fortement dans les années qui viennent. Il n’y a aucun pessimisme là-dedans, car la vie est finalement bien plus forte et elle se réorganise après.
Maintenant et dans le cas qui nous préoccupe, il y a certaines choses que nous pouvons faire dès maintenant pour nous préparer à être plus résilients en cas de problèmes majeurs. Il ne faut pas hésiter. Vous ne vous en voudrez jamais d’avoir pris trop de précautions. Dans le cas contraire, vous risquez de connaître une certaine forme de culpabilité. Pour ceux qui sont déjà dans une forme d’acceptation et de préparation, vous comprendrez mieux les réactions de vos proches.
Les placements les plus utiles pour affronter le monde d’après et la transition éventuellement douloureuse tiennent dans le triptyque suivant : pièces d’or, maison à la campagne avec le plus grand lopin de terre possible et juste la quantité d’argent papier nécessaire… pour continuer à vivre dans le monde… normal !