Xavier Niel : milliardaire, patron et bad boy

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Par Capucine Graby et Marc Simoncini Modifié le 27 octobre 2012 à 7h58

Flash-back. Ce matin de juin 2004, Xavier Niel n’est pas près de l’oublier.

La sonnette de la porte d’entrée le jette hors du lit et met fin à ses songes. En quelques minutes, une trentaine de policiers, armés, font irruption dans son appartement du XVIe arrondissement. L’opération est menée manu militari. Xavier Niel est embarqué en une dizaine de minutes. L’humiliation ne fait que commencer. Quelques heures plus tard, ce sont cette fois les salariés de Free qui aperçoivent, médusés, leur patron déambuler dans les couloirs, menotté et toujours escorté d’une meute de policiers.

Un mauvais film : après quarante-huit heures de garde à vue, le marathon s’achève dans une des cellules de la prison de la Santé à Paris. Pour le milliardaire à qui tout sourit depuis des années, pour ce patron admiré – adulé même – qui défie la vie et casse les codes depuis son entrée dans le business, ce mois de prison est une véritable descente aux enfers.

En l’espace de quelques heures, ce qu’il a bâti semble réduit à néant, sa fortune bloquée, certains de ses amis disparus. Le choc est terrible. Il passe du statut de businessman visionnaire à qui tout réussit à celui de pestiféré. Pourtant, les seules lettres qu’il recevra en prison seront celles de soutien de dizaines d’abonnés de Free.

Mais le changement, le vrai, c’est que Xavier Niel devient, à son insu, la star qu’il n’a jamais voulu être. Lui qui cultive la discrétion, qui s’est peu mis en avant ces dernières années et encore moins lors de l’introduction en Bourse d’Iliad, la maison mère de Free, quelques mois plus tôt, fait contre son gré les titres de la grand-messe de 20 heures sur TF1. La France découvre alors un homme au look de "bad boy", au regard troublé. Un homme que la journaliste présente comme une "vedette des nouvelles technologies".



Pendant que TF1 révèle Xavier Niel à la ménagère de moins de cinquante ans, les analystes n’ont eux aussi que ce nom à la bouche dans les salles de marché. Le cours d’Iliad dévisse de 10 % le jour de son arrestation...

Rebelle ou provocateur ? Peut-être les deux à la fois. Xavier Niel est en tout cas un personnage atypique. Un patron énigmatique, mystérieux dans ses choix, et qui n’a peur de rien : lors d’une de nos rencontres, à moitié allongé sur un vieux canapé démodé, héritage des premières heures de Free, il nous rappelle en rigolant son premier fait d’arme : lorsqu’il n’a pas hésité un quart de seconde à "pirater" les bases de données de France Telecom pour lancer 3617 Annu, un service d’annuaire inversé !

Au fil de nos rencontres, le portrait-robot s’affine. Xavier Niel n’est pas tout à fait le "cow-boy des nouvelles technologies" dont tous les médias renvoient l’image. Certes, c’est un patron qui rejette toute voie tracée et qui aime brouiller les pistes. Nous en ferons d’ailleurs les frais au cours de nos différentes interviews pendant lesquelles Xavier multiplie les provocations.

L’ambivalence de sa personnalité sera aussi ce qui nous marquera le plus lors de nos rencontres. Un boss qui n’est ni de droite, ni de gauche, ni libéral, ni interventionniste... Mais surtout un patron comme il en existe tant d’autres dans la Silicon Valley, qui cultive la proximité avec ses salariés ou ses abonnés. Bref, un patron au management plus "américain" que français qui détonne dans l’Hexagone, c’est certain.

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Extraits de "Grandeurs et misères des stars du Net" par Capucine Graby et Marc Simoncini. Editions Grasset (2012). 17,10 euros

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Capucine Graby est journaliste. Elle a notamment travaillé à BFM radio et au service économie d’Itélé.Marc Simoncini est entrepreneur. Il a fondé i(France), le site web de rencontres Meetic et, en mars 2012, Sensee, un site de vente de lunettes en ligne. Il est le co-fondateur de l’école des métiers de l’Internet, qui a ouvert en septembre 2011. 

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