Va-t-on assister à une confiscation de l’or ? #BESTOF

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Par Charles Sannat Publié le 10 juillet 2013 à 2h30

Vous êtes très nombreux à vous inquiéter des risques de confiscation de votre or physique et je reçois de plus en plus de courriers à ce sujet. Je souhaitais donc partager avec vous mon point de vue sur ce sujet. A mon sens la réponse tient en trois grands points. Doit-on réellement avoir peur d’une confiscation de l’or ? Comment s’en prémunir quand même… et y a-t-il d’autres risques, pour mon or, qui ne doivent pas être occultés par la peur de la confiscation.

Doit-on avoir peur d’une confiscation de l’or ?

A mon sens pour le moment c’est jouer à se faire peur pour rien. Il y a deux éléments permettant de justifier ce point de vue. Posons la question que se pose toujours l’inspecteur Columbo. Quel serait le mobile du crime (donc de la confiscation) ? Tout d’abord prenons le cas de notre pays. La France. Nous avons une dette « officielle » d’environ 2000 milliards d’euros. En face des réserves d’or (officielles également) de 2400 tonnes. Faisons un rapide calcul. Soit le prix du kilo à 40 000 euros (pour faire des comptes ronds). Cela nous met la tonne d’or au prix de 40 millions d’euros, ce qui valorise nos réserves de 2400 tonnes d’or à environ 96 milliards d’euros. 96 milliards d’un côté la valeur de l’or par rapport à un cumul de dette de plus de 2000 milliards d’euros. Il s’agit d’une goutte d’eau dans un océan d’endettement. Il faudrait que le prix de l’or soit multiplié par 20 et que la valeur d’un lingot d’un Kg soit de 800 000 euros pour que notre or puisse rembourser nos dettes. Vous pouvez faire ce simple raisonnement pour l’ensemble des pays et vous obtiendrez globalement le même résultat.

Vers la confiscation de l’épargne

Par contre l’épargne financière des ménages français dépasse largement les 2000 milliards d’euros. Rien que sur les contrats d’assurance vie, les français ont déposé 1500 milliards d’euros. Voilà une source de financement nettement plus en ligne avec les montants de notre dette. Dans un premier temps c’est donc notre épargne qui sera confisquée et cela a déjà commencé avec des taux d’intérêt inférieurs à l’inflation qui érode votre pouvoir d’achat et la valeur de vos économies. Si demain l’état décide de ne pas rembourser tout ou partie de ses dettes, il n’a pas besoin de votre or. Il annule votre épargne qui est déjà placée en bons du trésor ou en obligations d’état.

Des obstacles juridiques

Cela peut évidemment changer, et relativement vite. Les lois sont le reflet également d’un moment et d’une époque. Cela dit au moment où j’écris ces lignes, il existe le respect de la propriété privée, des lois européennes, une cour de justice supranationale etc… alors pour l’instant, le cadre juridique qui permettrait une telle confiscation n’existe tout simplement pas. Bien sûr nous surveillons attentivement les évolutions légales.

Les différents types de confiscation

Il est très important de moduler le terme confiscation. Il y a plusieurs types de confiscations et toutes ne se valent pas.

- La réquisition sans indemnisation qui est du vol pur et simple puisque dans ce cas l’état prendrait votre or sans vous indemniser.
- L’expropriation. Dans ce cas on vous prend votre or et on vous verse une somme symbolique.
- La nationalisation de l’or. Dans ce dernier cas, qui a été globalement le seul pratiqué et comme ce fut le cas dans les années 30 avec l’executive order du Président Roosevelt, votre or est nationalisé, « obligatoirement » rapporté à l’administration mais contre une indemnisation au dernier cours connu. Après évidemment, le gouvernement se remet à jouer avec la monnaie ce qui impliquera de convertir l’argent reçu en compensation de votre or immédiatement dans un autre type d’actif tangible disponible à ce moment-là.

Dernière chose. Sous prétexte de vous prémunir d’une confiscation de votre or, cela ne doit pas vous faire oublier d’autres risques certainement tout aussi « douloureux » pour votre patrimoine. Une nouvelle ligne de TGV ou une nouvelle autoroute sont des cas de figure qui se présentent tous les ans, partout dans le monde et qui concerne des milliers de personnes rien que dans notre pays. Ces gens « expropriés » de chez eux, perdent tout. Souvenez-vous après le drame survenu sur la côte Atlantique lors du passage de la tempête Xinthia, des centaines de maisons situées en zones noires ne valaient strictement plus rien. Votre maison était en zone inondable, sa valeur est passée de tout à rien en une nuit dramatique. Dernier exemple qui nous concerne moins directement, pensez aux 5 millions d’habitants résidents autours du Vésuve en Italie. Un jour indéterminé, ils perdront simplement à peu près tout ce qu’ils possèdent.

Encore une fois, le risque de confiscation de l’or n’est pas nul. Loin s’en faut. Il ne faut cependant pas non plus lui conférer une importance qu’il n’a pas.

Pour résumer mon point de vue, si vous détenez 10 000 euros en Napoléon 20 francs, et que votre maison se trouve sur le futur tracé d’une autoroute…. Votre problème patrimonial majeur et significatif n’est pas le risque de confiscation de votre or, mais bien la possibilité de vous retrouver sans logement dans un avenir proche. Il est donc important de ne pas se tromper de débat.

L’or est confisqué quand même, comment faire pour me protéger ?

Ne soyons pas naïfs pour autant. Si nous achetons de l’or c’est que nous sommes prudents. C’est que nous anticipons certains problèmes économiques à venir. Nous prendrons forcément en compte dans notre réflexion le fait que l’or puisse être réquisitionné même si encore une fois, pour le moment les états n’ont aucun intérêt à le faire. Il n’y a pas de mobile. A mon sens, il faut juste avoir du bon sens et respecter l’adage populaire qui dit « de ne pas mettre tous ses yeux dans le même panier ». Nous sommes dans une situation économique inédite et une expérience monétaire jamais tentée dans l’histoire humaine. Vous perdrez donc certainement de l’argent à l’issue de cette crise. La seule solution patrimoniale consiste à diversifier son épargne, dans différents actifs tangibles, dans différentes localisations.

Avoir de l’or chez soi est une bonne idée. Mais le risque de vol ou de perte est réel. Avoir de l’or chez soi oui mais avoir tout son or enterré dans son jardin à quinze pas du grand chêne est-ce vraiment une bonne idée ? Détenir tout son or en compte titres dématérialisés dans sa banque est-ce une bonne idée ? Détenir tout son or dans son coffre bancaire ce qui est très facile à confisquer est-ce une bonne idée ? Avoir tout son or en Suisse avec une frontière qui serait fermée est-ce une bonne idée ? Individuellement aucune de ces idées n’est bonne ou judicieuse. C’est la raison pour laquelle je conseille à ceux qui me posent la question de détenir de l’or physiquement chez eux (c’est ce que j’appelle un Kit de survie pour les cas extrêmes), d’en conserver en Suisse c’est-à-dire hors Union européenne et hors coffres bancaires. De la même façon j’incite mes interlocuteurs à en avoir aussi en Belgique où ils seront considérés comme non-résidents mais au sein de l’Union Européenne et sans frontière douanière à passer. Il faut donc diversifier vos points géographiques de stockage.

Les risques du marché noir

L’un des problèmes engendré par la détention d’or physique chez soi en cas de confiscation par l’état c’est que si un propriétaire d’or souhaite pouvoir l’utiliser il doit en général le changer pour obtenir de la monnaie papier. Même si certains me diront qu’ils pourraient dans ce cas directement payer en or, l’histoire nous enseigne que ce fût rarement le cas. Il fallait changer son or en France pendant la deuxième guerre mondiale, il fallait changer son or en Argentine lors de la faillite de ce pays en 2001. Les témoignages sont unanimes. Changer son or au marché noir est une opération très risquée. Celui qui change son or commet un acte « illégal », il ne peut donc plus le faire en toute sécurité. Il n’est donc objectivement pas crédible ni sérieux de conseiller à un détenteur d’or de ne pas s’inquiéter, d’enterrer l’or dans son jardin et d’aller l’échanger au marché noir quand il en aura besoin. Dans la pratique la prise de risque sera très élevée.

Vers la suppression de la monnaie papier

Un autre risque très rarement évoqué mais sans doute parce que c’est sans doute l’un des plus probables dans les années qui viennent, c’est le choix de la monnaie tout électronique. C’est ce qui est envisagé en Italie par le gouvernement Monti dès 2014 afin de lutter contre la fraude fiscale et l’activité au noir. L’idée ? Toutes les transactions sont électroniques et le cash, les billets et pièces de monnaies n’existent plus. Les espèces sont purement et simplement interdites.

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Article initialement publié le 04/02/2013

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Charles SANNAT est diplômé de l'Ecole Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d'Etudes Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information-(secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Economique d'AuCoffre.com en 2011. Il rédige quotidiennement Insolentiae, son nouveau blog disponible à l'adresse http://insolentiae.com Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.

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