La presse parle quotidiennement du feuilleton « Petroplus » mais qui sait exactement de quoi est faite cette chronique d’une mort annoncée. Qui connait l’histoire de cette faillite, pas seulement Française mais Européenne. Qui enfin pourra présenter autre chose que des repreneurs opportunistes mais sans véritable ambition industrielle pour la France ?
Petroplus c’est une holding, crée en 1993 à la bourse d’Amsterdam, possédant sept raffineries en Europe. C’est le groupe américain Carlyle, groupe d’investissement qui s’est rendu acquéreur de Petroplus en 2005 pour 500 millions d’euros. Les ambitions de Carlyle étaient annoncées, doubler la taille de l’entreprise dans un avenir à deux ou trois ans. En 2007 Petroplus reprend son statut de société anonyme à la bourse de Zurich, Carlyle détenant 57 % des actions de ce groupe. Jusqu’en 2008 personne ne pouvait prévoir un coup d’arrêt au développement de cette société, mais la crise financière américaine est passée par là. De restriction financière en gel des avoirs des banques, c’est en décembre 2011 que le directeur financier de la holding, un certain Joseph Watson, déclare que l’entreprise ne peut plus acheter de pétrole. Suite à cette annonce l’action de Pétroplus chute de façon vertigineuse pour en arriver à perdre plus de 80 %.
Ajoutons que l’agence de notation Standard and Poor's, suite à cette annonce à dégradé la note de la holding, l’abaissant au plus bas CCC+. La faillite n’était pas loin, la suite des évènements dans les raffineries Européennes a confirmé. Depuis janvier 2012, les nombreuses tentatives d’accord avec des groupes bancaires se multipliaient sans succès, le groupe décida donc de vendre une partie de ses raffineries, alors que des plans de développement stratégiques étaient mis en place pour Anvers et Cressier (Suisse).
La raffinerie de Petit Couronne se trouva donc mise en vente dès le 20 Janvier 2012, aucun repreneur n’ayant présenté de plan acceptable, c’est inéluctablement vers la liquidation judiciaire que ce site arriva. L’activité se poursuivra malgré tout jusqu’en fin décembre 2012, l’ensemble des candidats à la reprise n’apportant aucune garantie ni sur l’emploi ni sur le maintien industriel sur place. Toute cette affaire repose essentiellement sur une faillite liée à la crise financière de 2008 au Etats-Unis et pas, comme certains voudraient le dire à des patrons voyous qui veulent « s’en mettre plein les poches ». Le site de Rouen n’est pas des plus rentable tout d’abord parce qu’il produit de l’essence et qu’en France c’est le gas oil qui est consommé massivement. Aucun repreneur ne peut présenter un projet viable en mettant de telles sommes sur un site industriel non compétitif et non rentable. C’est là que le bât blesse, et c’est là surtout que l’on raconte n’importe quoi aux salariés. (Qui ne veulent peut être pas comprendre non plus tout ce qui leur est expliqué)
La seconde raison de la difficulté de reprise est liée à la dictature syndicale qui règne de ce type d’entreprise. Reprendre tout le monde ou rien est un leitmotiv habituel de la CGT, ce qui impose aux différents repreneurs de continuer à faire vivre une entreprise en faillite avec le même effectif. Tout ceci montre que dans ces conflits sociaux longs et difficiles, aucune solution pérenne ne peut sortir d’un chapeau de magicien. Surtout pas du chapeau de l’état qui lui est certainement le plus mauvais interlocuteur pour régler ce type d’affaire. Mauvais interlocuteur car dans l’imprécation et la communication politique, mauvais interlocuteur car partenaire politique des syndicats, mauvais interlocuteur parce qu’il est mauvais même dans les entreprises où il est actionnaire. Sortir un dossier Egyptien du chapeau une heure avant le moment de la fin des dépôts de dossiers est pour le moins suspect. Si les liquidateurs n’ont pas trouvé dans ce dossier de raison d’arrêter la liquidation, si Arnaud Montebourg compte sur la justice pour arriver à « caser » son repreneur, c’est que le dossier ne tient pas la route de lui-même.
La seule chose insupportable dans cette affaire c’est la manière dont sont traités les salariés. Ballotés d’un jour à l’autre et d’une annonce à l’autre, il ne faut pas s’étonner si cela se radicalise. La seul bonne façon d’aborder un plan social c’est de parler vrai, d’être transparent et de dire aux interlocuteurs non pas ce qu’ils veulent entendre mais la réalité du dossier. Sans quoi attention à l’explosion sociale sur le site.