Fortune : pourquoi la majorité des milliardaires chinois préfère se cacher

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Par Laure De Charette Modifié le 14 février 2013 à 3h02

La Chine comptait, du moins officiellement, 113 milliardaires en dollars en 2012. Originaires des villes mais surtout des champs, self made men pour la plupart, ces nouveaux ultra-riches ont bâti des empires. Mais par peur du peuple, du Parti, des impôts ou encore de la prison, ils sont désormais de plus en plus nombreux à préférer rester tapis dans l’ombre…

En réalité, la Chine est un iceberg en matière de super-riches, dont on ne connaît que la part émergée. En tout, les milliardaires seraient au moins six cents selon l’institut Hurun, sinon plus. Une grande partie d’entre eux préfèrent rester dans l’ombre, tapis, loin des regards indiscrets.

— Je sais que certains supplient Forbes de taire leur identité, explique Shaun Rein, collaborateur du magazine américain.

Parmi les hommes d’affaires aux avoirs jugés flous comptent Zhang Ruimin, PDG du géant de l’électroménager Haier, ou encore Chen Feng, président de la quatrième compagnie aérienne chinoise, Hainan Airlines. Sans oublier Deng Wendi, la troisième et très jeune épouse du tycoon australo-américain Rupert Murdoch. « Super Wendi », comme les médias l’ont surnommée depuis qu’elle a renvoyé la tarte à la crème au visage de l’homme qui essayait d’atteindre son mari, gère officieusement une partie des affaires de son époux, au sein de sa société News Corporation.

Parmi les autres hommes d’affaires dont nul ne sait évaluer avec précision la fortune, mais qui doivent joindre les deux bouts sans trop de difficulté, on trouve aussi Liu Chuanzhi, le fondateur de l’empire Lenovo. Il faut dire que Lenovo est passé du stade de start-up à celui d’entreprise leader dans la fabrication d’ordinateurs en Chine, puis dans le monde. Leurs entreprises sont devenues des géants. Comment leur portefeuille ne serait-il pas devenu lui aussi XXL ?

Quant aux autres Chinois présumés richissimes, mais dont la fortune reste entourée du plus grand flou, de nombreux experts pointent aussi du doigt les princes rouges, ou taizi, soupçonnés d’être passés maîtres en l’art du cache-cache. Ces filles et fils de hauts dignitaires du régime, qui forment une caste à part, bénéficient des réseaux politiques de leurs parents. Pourquoi se contenteraient-ils d’engranger quelques modestes millions, comme le suggèrent les listes officielles, quand de nombreux entrepreneurs les approchent en vue de conclure de juteux partenariats ?

— Des sommes colossales circulent hors des circuits fiscaux et financiers officiels, explique Jacques Gravereau, directeur de HEC Eurasia Institute et auteur de l’étude « Plus riches qu’on ne le croit ».

Si de nombreux super-riches préfèrent maquiller leurs milliards, c’est à la fois par peur d’afficher leurs liens avec le gouvernement, crainte d’un éventuel retournement de situation qui verrait le peuple ou le Parti les prendre pour cibles, pour payer moins d’impôts, voire… pour éviter la case prison ! Plusieurs personnalités ont été jetées derrière les barreaux pour évasion fiscale, fraude, manipulation boursière ou corruption, suite à l’apparition de leur nom sur la liste Forbes, rebaptisée "the death list" : la "liste de la mort"… On comprend mieux pourquoi certains ultra-riches chinois préfèrent l’ombre à la lumière !

Couv

Extraits de "Chine : Les nouveaux milliardaires rouges" par Laure de Charette et Marion Zipfel. Editions L'Archipel. 19,95 euros

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Journaliste depuis 2005, Laure de Charette a d'abord travaillé cinq ans au service France du quotidien 20 Minutes à Paris, tout en écrivant pour Economie Matin, déjà. Elle est ensuite partie vivre à Singapour en 2010, où elle était notamment correspondante du Nouvel Economiste et où elle couvrait l'actualité politique, économique, sociale -et même touristique !- de l'Asie. Depuis mi-2014, elle vit et travaille à Bratislava, en Slovaquie, d'où elle couvre l'actualité autrichienne et slovaque pour Ouest France et La Libre Belgique. Elle est aussi l'auteur de plusieurs livres, dont "Chine-Les nouveaux milliardaires rouges" (février 2013, Ed. L'Archipel) et "Gotha City-Enquête sur le pouvoir discret des aristos" (2010, Ed. du Moment). Elle a, à nouveau, rejoint l'équipe d'Economie Matin en 2012.

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