La politique de la FED est risquée

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Par Charles Sannat Modifié le 25 septembre 2013 à 14h55

Mes chères contrariées, mes chers contrariens !

Aujourd’hui, j’avais envie de vous parler de deux choses. Tout d’abord, je souhaitais revenir sur les derniers propos tenus par notre Super Mario international, grand mamamouchi de la Banque centrale européenne, c’est-à-dire grand chef de l’euro.

Puis je voulais revenir sur le dernier édito d’un autre Charles, puisqu’il s’agit de Charles Gave (le grand libéral) avec qui je ne suis pas toujours d’accord intellectuellement, loin de là, mais avec qui je partage pleinement l’analyse qu’il fait de la situation, raison pour laquelle il fallait que je la soumette à votre sagacité.

Mario Draghi a dit….

« M. Draghi a affirmé lundi que son institution était prête à utiliser tout instrument à sa disposition, y compris un nouveau prêt à long terme en faveur des banques (LTRO), si l’évolution des taux d’intérêt le requérait. »

« Ces propos ont eu pour effet de déstabiliser les cambistes en provoquant un regain d’inquiétudes au sujet du secteur bancaire européen et de peser sur l’euro, a noté Kathleen Brooks, analyste chez Forex.com… »

Sans blague… cela commence à devenir difficile la communication de nos zautorités monétaires car les marchés et les zinvestisseurs sont tous devenus schizophrènes. D’un côté, ils veulent impérativement être rassurés et de l’autre, si on les rassure trop c’est qu’il y a des risques qu’on leur cache… Oui, ce qu’il faut savoir c’est que le propre d’un trader et d’un investisseur c’est qu’ils veulent qu’on lui mâche le travail, car le vrai travail est fatiguant. Il faut lire, comprendre, analyser et puis réfléchir. Tout plein de choses qui viennent contrarier le seul et unique but de l’investisseur moderne qui est de gagner du fric. Il veut juste savoir si « ça va monter » ou si « ça va baisser ». Le pourquoi ? Il s’en fiche éperdument et comme d’une guigne de l’an 40… Plus ou moins, et il prend la position adéquate sur les marchés. Ce qu’il attend des zautorités monétaires c’est donc qu’elles lui permettent de jouer à plus ou moins en étant sûr de gagner, le reste étant des problèmes concernant la plèbe…

Bref, tout cela pour vous dire globalement qu’il n’y a pas plus moutonnier qu’un trader et qu’un banquier. Surtout ne pas faire dépasser sa tête et mieux vaut avoir tort avec tout le monde que raison tout seul, ce qui est forcément suspect…

Donc reprenons. Mario veut rassurer et finalement il inquiète. Logique mes amis contrariens, car la dernière fois que Mario Bross a joué de la console monétaire avec ses LTRO, c’était pour sauver le système bancaire européen d’une faillite rapide et totale. Du coup, les « zinvestisseurs » se demandent si les banques vont bien… Ils me font rire ces zinvestisseurs. Évidemment que les banques ne vont pas bien puisque depuis le début de la crise, nous n’avons globalement rien changé et laissé les banques continuer à faire comme avant… en pire. Pensez-vous vraiment que cela ait pu s’arranger entre-temps ? A-t-on coupé les banques en deux ? Non. A-t-on démantelé les banques « trop grosses pour faire faillite » ? Évidemment que non. A-t-on demandé aux banques de réduire leurs spéculations ? Non. Et qui achète tout plein d’obligations moisies d’États en faillite virtuelle ? Eh bien évidemment les banques…

Comme disait mon papy avec sa sagesse coutumière paysanne… tu sais fils, les mêmes causes produisent les mêmes effets… Ben oui le pépé, de toute façon, il a toujours eu raison. C’est aussi simple que ça le bon sens. Mais les « zinvestisseurs » s’interrogent sur les derniers propos du Mario, et moi je me bidonne devant autant de crétinerie quotidienne. Au moins, ça me donne à vous parler. Alors ne nous plaignons pas.

Ah oui, il y a un autre passage dans cette analyse qui me fait doucement rigoler également. C’est celui qui concerne la politique monétaire américaine. Lisez plutôt.

« Mais l’orientation du couple euro-dollar restait dictée « par la décision prise la semaine dernière par la Banque centrale américaine de ne pas ralentir ses mesures de soutien exceptionnel à l’économie », a estimé M. Gilmore. La FED a notamment maintenu ses injections de 85 milliards de dollars par mois de liquidités dans les marchés financiers, une mesure destinée à maintenir les taux bas et à favoriser la reprise économique mais qui a aussi pour effet de diluer la valeur du billet vert. »

« Plusieurs responsables de l’institution continuaient lundi à justifier leur décision et, à l’instar de William Dudley, le président de la Réserve fédérale de New York, à estimer que l’économie des États-Unis a encore besoin du soutien d’une politique monétaire ultra-accommodante. »

Tiens, c’est marrant dites donc, en en imprimant plus, finalement, on finirait par diluer la valeur du billet vert… mais de vous à moi, surtout n’achetez pas d’or, cette espèce de relique barbare immonde dont, soit dit en passant, 50 kilos ont été volés dans un avion d’Air France. Ils n’ont pas de chance chez Air France, entre les cargaisons d’or qui disparaissent et celles de cocaïne qui apparaissent, je pense qu’ils ont comme qui dirait pudiquement quelques trous dans la raquette de leur recrutement et quelques lacunes au niveau du management, mais bon, je ne suis pas là pour vous parler d’Air France mais de la FED.

Remarquez, il y a quand même quelques points communs entre ces sujets finalement. La FED aussi injecte un peu de cocaïne sur les marchés directement en intraveineuse, et la FED aussi fait disparaître l’or… comme quoi, c’était bien lié.

Revenons donc à la FED qui tente de justifier sa décision… Il n’y a pas grand-chose à justifier. Ils ne pouvaient juste pas faire autrement, ce que je vous ai toujours dit et répété.

Or justement, Charles Gave, notre grand libéral, apporte une explication très intéressante sur le choix de la FED de ne pas stopper ses quantitative easing. Voici le résumé et la synthèse. Je vous mets le lien pour ceux qui voudront lire l’édito entier.

Panique à la FED

« Grosse surprise la semaine dernière : la Banque centrale américaine qui avait télégraphié depuis des mois son intention de réduire significativement ses achats d’obligations du Trésor Américain fait une volte-face brutale et nous annonce que les opérations de Q.E. (QUANTITATIVE EASING) vont continuer comme par le passé, prenant à contre pied tous les opérateurs de marché. »

Charles Gave nous explique ensuite que ce contre-pied va laisser des traces, les opérateurs de marchés n’ayant plus confiance dans la « parole » de la FED.

« Tout cela la FED le sait aussi bien que moi, et pourtant ils ont pris le risque de porter un coup mortel à leur crédibilité. C’est donc que la Banque centrale américaine sait quelque chose que le reste du monde ne sait pas, ou ne sait pas encore…

La question essentielle n’est donc pas « pourquoi la FED a fait ce qu’elle a fait ? » mais qu’est que la FED sait qui l’a amenée à changer d’avis ? »

« Et pourtant, depuis mai, le coût du capital (représenté par le rendement sur une obligation BAA émise par une société industrielle aux USA) a monté fortement, tant et si bien qu’aujourd’hui le rendement sur une telle obligation est très supérieur à la croissance du PIB américain.

Donnons les chiffres.

Le PIB a cru sur les 12 derniers mois de 3,06 % en valeur, tandis qu’une obligation BAA me rapporte près de 5,4 %… soit une différence de 2,34 %. Or chaque fois depuis 1920 que les taux d’intérêts sur les obligations BAA ont été supérieures de 2,5 % (ou plus) par rapport au taux de croissance des USA, une récession a suivi presque immédiatement. »

Ce que veut nous expliquer Charles Gave ici, et je le rejoins, c’est que des taux d’intérêt plus élevés que la croissance du PIB conduit les investisseurs et les entrepreneurs à placer leur argent financièrement avec l’achat de titres obligataires par exemple et pas à investir dans l’économie réelle par le financement de projets industriels. Cette analyse est tout à fait exacte. Néanmoins, je pense que cela reste partiel car une augmentation forte des taux d’emprunt n’avait pas pour conséquence uniquement de réduire l’investissement.

- Réduction des investissements productifs.

- Augmentation du coût d’emprunt pour l’ensemble des acteurs économiques, ménages, entreprises et États.
- États surendettés plus hausse des taux = insolvabilité des États.
- Ménages surendettés plus hausse des taux = insolvabilité des ménages. Effondrement de l’immobilier convalescent, augmentation des créances douteuses et des impayés = insolvabilité des banques.

Bref, on peut résumer la situation globale par une « hausse des taux = insolvabilité généralisée et rapide de tous les acteurs économiques = effondrement du système ».

Or les autorités monétaires, même si elles font des bêtises, font tout pour maintenir le système en vie depuis plus de cinq ans.

Voici la conclusion du billet de Charles Gave.

« Il ne peut pas y avoir de discussion sur la solution à choisir, et d’ailleurs il n’y en a pas eu (7 votes contre un). Je reste donc d’avis qu’il est urgent d’attendre et de surveiller les taux longs aux USA .

S’ils venaient à monter de 0,5 % ou plus, il serait alors urgent pour les lecteurs de courir vers les tranchées où, bien sûr, ils me retrouveraient déjà confortablement installé. Je ne suis plus en âge de courir vite, je préfère partir avant les autres. »

Je suis en parfait accord avec sa conclusion. En effet, ce sont bien les taux d’intérêt qu’il faut surveiller comme le lait sur le feu. Seule l’évolution des taux vous permettra de voir les signes annonciateurs de la future débâcle qui s’annonce sur les dettes souveraines et la faillite d’États majeurs.

Quant au fait de courir aux abris, je rejoins là aussi Charles Gave. Étant plus jeune, je pourrai certainement courir plus vite que lui mais le grand-père que j’ai eu m’a toujours expliqué que celui qui voulait aller loin devait ménager sa monture et devait savoir partir à l’heure. Il disait aussi que lorsque l’on ne savait pas trop à quelle heure on risquait d’arriver… mieux valait partir longtemps à l’avance, raison pour laquelle Gave et Sannat vous attendront tranquillement avec quelques boîtes de conserves issues de mon PEBC (le Plan épargne boîtes de conserves) mais aussi avec quelques bonnes bouteilles, car je vous le rappelle, le vin reste un placement qui est par nature toujours liquide et dont la valeur d’usage permet au moins de remonter le moral des troupes.

Nous serons sans doute en compagnie de Simone Wapler qui ne conçoit l’effondrement et la misère que dans la dignité. Et puis avec notre or… nous pourrons améliorer l’ordinaire.

Alors ensemble, nous pourrons simplement contempler la fin d’un monde et l’effondrement d’un système.

À demain… si vous le voulez-bien !!

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Charles SANNAT est diplômé de l'Ecole Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d'Etudes Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information-(secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Economique d'AuCoffre.com en 2011. Il rédige quotidiennement Insolentiae, son nouveau blog disponible à l'adresse http://insolentiae.com Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.

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