Le dénouement des discussions de politique commerciale risque de prendre plus de temps qu’anticipé. Recevrons-nous entre temps des signaux rassurants en provenance de la croissance mondiale ?
Depuis le début de l’année, les marchés on fait un double pari : le stress politique se réduira progressivement et la croissance économique mondiale se reprendra. Faisons le point sur là où on en est aujourd’hui.
Du côté de la politique, les deux principaux dossiers sont la politique commerciale des Etats-Unis et le Brexit. Commençons par le premier. Il y a d’abord les négociations sino-américaines. De vrais progrès, reconnus de part et d’autre, ont été faits jusqu’au début du mois de mars. Depuis, le newsflow sur le sujet s’est réduit et on peut avoir l’impression que tout s’est ralenti. Les messages en provenance de Pékin mettent en avant l’évolution favorable des discussions. Ainsi l’agence de presse, Xinhua retient les avancées « matérielles » dans la rédaction du projet d’accord. On sent plus de prudence du côté de Washington. C’est sans surprise le cas de Lighthizer, le représentant pour les négociations commerciales, au profil de « dur » en matière de relations avec la Chine, qui continue de pointer les sujets importants sur lesquels des divergences demeurent. Mais il faut noter que le secrétaire au Trésor, Mnuchin, plus enclin au compromis, insiste sur la nécessité de définir précisément les mécanismes de suivi et de contrôle des engagement pris Et tant pis si cela retarde le moment de la conclusion.
Tant est si bien que le Président Trump, lui-même, paraît être partagé sur le résultat de la séquence. Selon lui, ce n’est que dans trois ou quatre semaines que les choses se décanteront. Bref, rien ne sera acté d’ici à la fin du mois, comme on a pu le croire un temps. Il faudra faire preuve d’un peu plus de patience. Cela va-t-il rendre les marchés nerveux ? Je dirai plutôt non, surtout si les indicateurs conjoncturels continuent d’envoyer des signaux constructifs. Dramatiser la communication en fin de période de négociations est souvent dans l’ordre des choses. Et puis, et surtout, les deux camps ont besoin de consolider les anticipations positives en matière de croissance.
Toujours dans le domaine des relations commerciales, il y a ensuite le dialogue transatlantique. Il y a deux jours Lighthizer déclarait devant une commission du Sénat américain que les discussions étaient dans une « impasse totale ». Le point bloquant, sans surprise, est l’introduction, ou non, du dossier des produits agricoles dans la négociation. A deux mois des élections aux Parlement européen, il est clair que tant Bruxelles que les pays-membres ne font pas preuve de beaucoup d’allant pour entrer dans le vif du sujet. De quoi laisser la part belle aux Américains. Et Le Président Trump de menacer : « s’ils (les Européens) ne nous parlent pas, nous allons prendre des mesures qui seront graves économiquement ; nous allons imposer des taxes douanières suer de nombreux produits ». Les propos ne sont pas complétement « en l’air ».
N’oublions pas qu’à la mi-février le département du Commerce américain a remis ses recommandations à la Maison Blanche sur la menace à la sécurité intérieure que pourraient faire courir les importations d’automobiles. Celle-ci doit normalement statuer d’ici au 17 mai sur une éventuelle politique de protection à mettre en place. Que peut-il se passer ? Le Président américain n’a très certainement aucun intérêt économique à surtaxer les voitures (et les pièces détachées) européennes importées dans le pays. Est-il prêt à prendre un risque, en termes de confiance, de croissance et de tenue des marchés de capitaux, dans l’espoir d’un gain politique (remobiliser sa base électorale) ? A priori, « le jeu n’en vaut pas la chandelle ». Mais qui sait, si on prend en compte le caractère souvent imprévisible de Donald Trump ? Le sujet est d’importance et on manque de visibilité.
Passons à la croissance. On sait qu’au niveau mondial la faiblesse des derniers mois et trimestres a été concentrée surtout dans le secteur manufacturier. Les informations, tirées des enquêtes et concernant le mois de février, le dernier connu, envoient le message d’une quasi-stabilisation, qu’il s’agisse de la confiance générale, de la production ou des commandes. Même si, bien sûr, un point ne fait pas une tendance. Une confirmation, au travers des chiffres « en dur » et des prochaines enquêtes, est nécessaire. Remarquons, pour ce qui est des premiers, que les dernières publications en provenance d’Europe et des Etats-Unis envoient un message plutôt rassurant.
Un pays est à suivre de près, pour conforter l’idée que le rythme de la croissance mondiale est en train de se reprendre. Il s’agit de la Chine. D’un côté le début de l’année, certes difficile à analyser à cause des distorsions apportées par les fêtes du Nouvel An, apparaît plutôt mou. De l’autre, le marché à « acheter » facilement les intentions de politique de relance, formulées par les dirigeants, lors de la session de l’Assemblée nationale populaire dont les travaux viennent de se terminer. Je crois qu’il faut bien comprendre la dialectique chinoise en matière de croissance. D’un côté, la quête de stabilité politique et sociale impose que l’activité économique se poursuive à un rythme d’au moins 6% l’an ; de l’autre le maintien des objectifs structurels de contrôle de l’endettement et de la pollution freine l’ampleur des mesures de relance à prendre.La voie est étroite, avec sans doute, mais à la marge, un risque davantage orienté en direction des mauvaises surprises que des bonnes.