Les Banques Grecques

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Par Nicolas Tarnaud Publié le 27 juillet 2015 à 14h44
Europe Crise Grece Solvabilite Dette
@shutter - © Economie Matin
90 MILLIARDS ?Depuis 2010, les Grecs ont retiré de leurs banques près de 90 milliards d?euros.

Les banques grecques

L’économie et le paysage bancaire grecque sont aujourd’hui paralysés. La restauration économique et bancaire est urgente. Elle doit être la priorité du gouvernement actuel afin de redonner de l’oxygène et de la visibilité à l’économie. La santé d’une banque reflète souvent la santé économique de son pays. Le monde s’est financiarisé et bancarisé depuis une quinzaine d’années. L’innovation technologique a fait naître de nouvelles économies basées sur le partage et l’échange de biens et de flux. De plus en plus de transactions financières s’effectuent avec de nouveaux moyens de paiement. Même dans une économie collaborative et d’échange, les banques continuent d’être les locomotives pour garantir les liquidités nécessaires. Cette équation est essentielle afin que l’économie puisse fonctionner normalement. Plus une économie est en crise et plus les banques doivent jouer un rôle de régulateur afin de ne pas entraîner de faillites en cascade auprès des acteurs économiques. Tous les acteurs économiques ont des besoins de financement et de relations bancaires quotidiennes. La plupart des clients n’ont pas une surface financière suffisante pour assumer un risque de crédit réparti sur quelques émetteurs de dette. Il revient donc à la banque d’emprunter auprès des épargnants et de supporter elle même ce risque de crédit sur des clients recherchant un financement.

Plus l’implication bancaire est effective dans un contexte de crise et plus leur bonne santé est nécessaire pour relancer la croissance, l’investissement et l’emploi. Le secteur bancaire et financier joue un rôle fondamental dans la collecte de l’épargne et la distribution du crédit d’un pays. Les banques grecques se trouvent aujourd’hui dans une situation difficile et complexe. En effet, les particuliers et les entreprises ont effectué d’importants retraits liquides ces dernières années et particulièrement ces derniers mois afin de se protéger contre d’éventuelles faillites bancaires et/ou d’un retour à la Drachme. Depuis 2010, les Grecs ont retiré de leurs banques près de 90 milliards d’euros. L’Union des Banques Grecques souhaite que leurs clients remettent leurs économies à la banque. La population a retiré plus de 40 milliards d’euros des comptes bancaires depuis décembre 2014. Le niveau des dépôts a baissé de plus de 100 milliards d’euros depuis cinq ans. Ces retraits massifs ont impacté l’économie et ont affaiblit le bilan de la National Bank of Greece, de Piraeus Bank, d'Alpha Bank et d'Eurobank. Les quatre principales banques grecques représentent 95% du marché bancaire hellénique. Le 29 juin 2015, les agences de notation Fitch and Standard & Poors ont dégradé la note de ces quatre établissements en les plaçant en « défaut partiel ». Cette note a signifié qu’un emprunteur se trouve en situation de défaut de paiement sur une de ses obligations sans pour autant être en liquidation ou en faillite. Aujourd’hui, les actionnaires et créanciers des de ces banques considèrent qu’un risque de perte important existe.

Le Fonds hellénique de stabilisation financière « Hellenic Financial Stability Fund » a été créé pour protéger le crédit de ces quatre institutions. Au printemps 2014, le HFSF recapitalisait les quatre banques en faisant appel aux investisseurs privés étrangers. EuroBank levait 2,86 milliards d'euros, National Bank of Greece 2,5 milliards d’euros, Piraeus Bank 1,75 milliard d’euros et Alpha Bank 1,2 milliard d’euros. HFSF détient en moyenne plus de 50% du capital de ces quatre banques. Ce pourcentage devrait augmenter prochainement. Le rôle d’HFSF a permis d’apporter une couverture en fonds propres mais non en liquidités. Les milieux financiers étaient persuadés au début de l’année 2015 que le système bancaire grec était suffisamment recapitalisé et restructuré. Depuis cette période, la crise de l’économie grecque a détérioré la qualité des crédits en circulation. Le risque de crédit, le risque d’intérêt et le risque de liquidité ont fragilisé les banques grecques.

Des banques grecques fragilisées

Les retraits auprès des distributeurs sont limités aujourd’hui à 420 euros par semaine. Le contrôle des capitaux a été conservé pour protéger les établissements bancaires. Ces derniers sont en recherche permanente de liquidités. Les banques dépendent des injections de la BCE. Elles bénéficient aujourd’hui d’un plafond de liquidités d’urgence (ELA) de 900 millions d’euros. Ces prêts d’urgence sont valables pour de courtes durées (1 semaine) et renouvelables. Les établissements grecs ont de moins en moins de collatéral pour obtenir des liquidités. La BCE devrait lancer des tests de résistance dans les prochains mois. La majorité des plus importants déposants grecs est en réalité constituée de petites et moyennes entreprises. Ces dernières constituent le fond de commerce de l’économie locale. Un grand nombre de PME travaille directement ou indirectement avec l’industrie du tourisme. Celle-ci représente actuellement 15% de son PIB. Un pourcentage qui devrait augmenter si la Grèce développe son énorme potentiel touristique. Une forte proportion de PME a disparu depuis la crise de 2010. En effet, des centaines d’entreprises ont fait faillite faute de pouvoir se financer ou d’effectuer des opérations avec l’étranger. Si les établissements bancaires ne peuvent plus les accompagner dans la pérennité et dans la durée, alors beaucoup disparaîtront entraînant de facto le dépôt de bilan de la Grèce. Les comptes des plus gros déposants représentent un peu plus de 20 milliards d’euros dans les quatre principales banques grecques. L’économie grecque, fragilisée, a besoin plus que jamais de ses banques. Ces dernières ne sont pas assez capitalisées pour garantir une sécurité financière auprès de leur clientèle et de leurs partenaires.

La recapitalisation des banques

Les banques grecques ont été éprouvées par la crise économique. Elles ont subit une crise de liquidités liée à la fuite des dépôts vers l’étranger. Les banques grecques ont besoin d’être recapitalisées dans les prochains jours. La recapitalisation des banques grecques doit permettre de stabiliser les flux d’entrées et de sorties et de redonner de la confiance aux particuliers ainsi qu’aux entreprises. Avec une économie à court de liquidités, les banques grecques doivent être recapitalisées vers la mi-août. C’est une question vitale pour la relance économique. Face aux 25 milliards d’euros dont la Grèce a besoin pour recapitaliser ses banques comment ne pas s’interroger : La zone euro doit-elle être présente dans le capital des banques grecques ? Le coût de la recapitalisation doit-il s’ajouter à la dette actuelle de la Grèce ? L’Allemagne ne souhaite-t-elle pas que les créanciers participent directement ou indirectement via le mécanisme européen de stabilité au capital des banques grecques ? Les nouvelles mesures assurant la stabilité financière grecque permettront d’attirer certains investisseurs étrangers et d’éviter un éventuel Grexit. La restauration d’une nouvelle confiance bancaire devrait permettre aux entreprises et aux particuliers de consommer leurs produits et leurs services comme autrefois.

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Nicolas Tarnaud, FRICS, économiste, professeur à Financia Business School, chercheur associé au Larefi Université Bordeaux IV.

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