Il y a quelques semaines, le projet de loi de finances 2013 déclenchait pour la première fois la fronde d’une catégorie de la population d’ordinaire très réservée : les entrepreneurs, les chefs d’entreprise et les «business angels». En cause notamment, des dispositions fiscales qui prévoyaient un impôt sur les plus values de cessions pouvant atteindre 60,5%, un taux considéré comme confiscatoire par ceux qui se sont donnés corps et âme à leurs entreprises, avec une prise de risque quasi-permanente.
Au final, le gouvernement a consenti quelques amendements, rendant ce projet plus acceptable, au prix malheureusement d’une nouvelle usine à gaz fiscale. Mais ce funeste épisode laissera des traces : les entrepreneurs des PME de ce pays (dont il faut rappeler qu’elles représentent 85% des emplois créés) se considèrent durablement comme les mal-aimés d’un système ; les étrangers voient plus que jamais la France comme un pays où règne une atmosphère de lutte des classes d’un autre temps ; quant à la jeune génération, résignée, elle a renoncé à l’idée de créer et d’entreprendre.
Voici, donc, les conséquences d’une disposition budgétaire qui ne rapportera au final «que» 250 millions d’euros à l’Etat. Tout ça, pour ça... Etait-ce bien raisonnable ? Mais par dessus tout, ce que cette séquence a démontré, c’est le décalage sidéral qui existe entre notre personnel politique (majorité comme opposition) et le monde de l’entreprise. L’entreprise est en effet l’unité de base de l’économie. Elle emploie l’essentiel des actifs. C’est souvent d’elle que vient l’innovation. Parmi les trente sept ministres du gouvernement actuel, aucun ne dispose d’une expérience significative de plusieurs années dans une entreprise privée ! Comment donc donner du crédit à un gouvernement dont les membres ignorent manifestement son fonctionnement ?
Amis entrepreneurs, la politique ne doit maintenant plus être le monopole des politiciens de métier. Chacun, à la place qui est la sienne, peut se revendiquer femme ou homme politique. La société civile regorge de personnes passionnées qui développent des idées innovantes, parfois iconoclastes. Il ne serait pas superflu qu’un entrepreneur, qu’un salarié, au même titre qu’un fonctionnaire le fait déjà, puisse servir la nation cinq ans de sa vie en exerçant par exemple un mandat de parlementaire.
Amis entrepreneurs, je ne vous apprendrai rien en vous disant que notre civilisation connait une mutation gigantesque. Plus personne ne peut imaginer que le monde pourra continuer de fonctionner avec les règles du jeu actuelles dans les vingt ou trente prochaines années. Tant de choses devront être profondément repensées : notre rapport au progrès, notre rapport à l’argent, notre rapport à l’économie matérielle... Dans un tel contexte, comment ne pas imaginer aussi un nouveau rapport à la politique ? D’autant que les valeurs qui doivent être valorisées dans ce nouveau monde sont celles de l’entreprise : l’innovation, la création, la conquête et l’ambition, l’aventure humaine...
Amis entrepreneurs, il est temps de nous impliquer d’avantage dans le débat public et de porter l’idéal qui est le nôtre. Engageons-nous !
Tribune extraite du blog chroniques-europedusud.com