Alors qu’il y a quelques jours les minutes de la FED, qui étaient publiées, jetaient le trouble sur les marchés actions comme ceux du métal jaune, je souhaitais revenir encore une fois sur les raisons qui peuvent faire penser que l’arrêt des « quantitative easing » est une grande illusion.
Les raisons qui plaident pour une poursuite des QE
La dette US est tellement importante, plus de 100 % du PIB, qu’il est indispensable que les taux d’intérêt soient maintenus le plus bas possible. Tout arrêt des QE aurait pour conséquence de relaisser aux marchés le soin de trouver le juste prix de la dette américaine. Les taux ne pourraient que bondir. Les obligations rapportant peu, s’effondreraient, provoquant le plus gros krach obligataire de tous les temps, que nous évoquions dans notre article de l’édition du vendredi 22.
Au-delà du stock de dettes, chaque année aux USA, le déficit est compris entre 1100 milliards et 1600 milliards de dollars. Il faut évidemment bien financer ces nouvelles dépenses. Il faut donc emprunter. Certes mais à qui ? Aujourd’hui, le principal acheteur de la dette américaine c’est la FED elle-même, c’est-à-dire la banque centrale américaine. Peu d’investisseurs étrangers de taille, type Chine ou pétromonarchie, continuent à acquérir des bons du trésor US alors qu’ils en sont déjà bardés.
Le système bancaire américain et international est chargé de façon excessive en actifs toxiques de toutes sortes. La FED, la banque centrale américaine, rachète chaque mois pour 85 milliards de dollars de ces actifs toxiques pour permettre de délester progressivement les banques de leurs créances pourries. Compte tenu des montants en jeu, le système financier est loin, très loin d’être assaini. Cesser les QE reviendrait à laisser le système bancaire tout entier s’effondrer sur lui-même en quelques semaines. C’est l’une des principales raisons qui conduisent les marchés à se retourner violemment sur ces rumeurs de fin de QE. Vous pourrez constater également que dans ces moments-là, les valeurs bancaires sont massacrées (à juste titre, puisqu’elles devraient presque toutes valoir 0 ou presque).
Plus de 20 % des crédits étudiants sont en défaut de remboursement, ce qui représente la modique somme de plus de 220 milliards de dollars au mieux de provisions à passer pour les banques, au pire de pertes. C’est la FED elle-même qui nous apprend dans sa note (lien en bas de page) que si le taux de défaut « officiel » est de 1 1% il est en réalité deux fois plus élevé en raison du fonctionnement même de ces prêts qui incluent des différés de remboursement de longues durées masquant ainsi artificiellement l’insolvabilité des emprunteurs.
Je cite le commentaire de bas de page de la note de la FED « ces taux de défaut sur prêts étudiants sont probablement sous-estimés car près de la moitié de ces prêts sont en report, en période de grâce ou en exemption, et donc temporairement exclus du cycle de remboursement. Cela implique que parmi les prêts dans le cycle de remboursement, les taux de défaut sont environ deux fois plus élevés. »
Or on constate partout dans le monde, et également aux Etats-Unis, que le chômage en général augmente et celui des jeunes en particulier. Le problème ne va donc que s’aggraver dans les prochains mois et il va bien falloir à nouveau « sauver les banques » américaines. La nécessité des dépenses sociales notamment pour les programmes medicaid et medicaire, puisque les USA sont confrontés au même problème de vieillissement de la population. L’arrivée des « papy boomers » va contraindre l’état à prendre en charge plus de 77 millions d’américains, auxquels vous pouvez rajouter les 50 millions de personnes qui bénéficient du programme de food stamps (l’aide alimentaire). Bref, s’il est facile de réduire les dépenses en terme économique, c’est une autre histoire en terme social.
Un effondrement des marchés boursiers conduirait à la faillite la très grande majorité des fonds de pension privés du pays et la ruine de l’ensemble de la classe des retraités américains. C’est l’une des principales motivations stratégiques, économiquement parlant, qui poussent les autorités monétaires américaines à maintenir artificiellement via une injection massive de liquidités des cours de bourse élevés. L’idée est bien sûr de créer un effet richesse, qui même s’il reste tout relatif parce que basé sur une création de fausse monnaie n’en est pas moins réel, pour le moment, pour les retraités qui continuent à bénéficier d’une pension qui ne devrait tout simplement plus exister dans de très nombreux cas.
La conclusion de tout cela est assez simple à comprendre. Il est impossible de cesser les quantitative easing c’est-à-dire l’impression de fausse monnaie sans passer par la case dépression économique majeure. Or la politique des autorités politiques et monétaires a été, depuis le début de la crise, d’éviter à tout prix une déflation importante qui ne pourrait plus être stoppée. Il n’y a donc aucune raison fondamentale à part des effets d’annonce distillés avec un grand savoir-faire, pour que cette politique économique soit totalement remise en cause ce qui laisse présager une poursuite du mouvement séculaire haussier de l’or dans un contexte d’impression monétaire « illimitée ».
Pendant ce temps l’Europe s’enfonce à nouveau dans la crise économique et sociale, qui finira inéluctablement par déboucher sur une explosion sociale qui entrainera une explosion de l’euro que l’on nommera pudiquement «reconfiguration et optimisation de la monnaie unique»… quoiqu’en disent les tenants du sketches « la crise est finie ».