En mai 2017, est-ce qu’il pouvait être décelé des prémices d’un prochain mécontentement aussi important ? Pas sûr ! Devant la situation catastrophique des finances françaises, ce nouveau Président fin gestionnaire financier a tenté ce qui semblait logique pour remettre la France dans les rails, mener une politique de relance par l’offre favorable aux entreprises et aux investisseurs.
L’espoir logique de cette démarche était de ramener de la croissance en augmentant les commandes, relancer l’investissement et avec les premiers résultats commencer de redistribuer du pouvoir d’achat aux ménages. Pour le gouvernement la cible principale était de diminuer les déficits et même rapidement d’avoir des résultats positifs. Ce qui n’est plus arrivé depuis 1974. Surtout que presque tous les pays d’Europe réussissaient à réduire leur déficit.
Des réformes ont été lancées par la France à « un train d’enfer » dans ce sens :
- Réforme du marché du travail
- Réforme du Code du travail
- Renforcer la formation professionnelle (+ 15 Milliards d’euros)
- Etablir un Compte Personnel de formation
- Suppression de deux cotisations salariales
- Rendre l’assurance chômage universelle (élargie aux indépendants)
- Baisse de l’impôt sur les sociétés
- Réduction de l’imposition du capital
- Suppression partielle de l’ISF
- Suppression de la taxe d’habitation
- Augmentation de la CSG salariés et retraités
D’autres lois plus générales ont également vu le jour :
- La moralisation de la vie politique
- La prorogation de l’état d’urgence
- La loi de réglementation du budget et des comptes 2016
- La loi sur les économies pour rentrer dans les « clous » européens
- La loi modifiant la partie législative du code des juridictions financières
Tout cela dans le but également de diminuer le déficit devenu un boulet pour les comptes de la nation, ne pas être en désaccord avec les exigences européennes et en déphasage avec les autres pays.
Un contexte économique européen plus favorable, des effets du CICE et les premiers résultats des lois ci-dessus ont permis en 2018, une hausse du pouvoir d’achat de 1,7%.
Contrairement à ce que peuvent penser ou ressentir un bon nombre de français, la France est relativement bien lotie dans le concert européen.
Comparaison du revenu réel disponible par habitant avec 4 autres pays européens
Globalement le revenu disponible par habitant n’a pas arrêté de progresser depuis vingt ans d’une façon supérieure à celui des principaux pays européens, y compris celui de l’Allemagne, même si cette dernière a connu un rattrapage depuis quatre ans.
Mais pourtant 94% des français jugent que les grandes fortunes ont été favorisées par la politique menée. Cette impression a en effet été confirmée par les chiffres. D’après l’IPP (Institut des Politiques Publiques), les 1% des plus riches ont été favorisés par rapport aux 20% les plus pauvres.
Dans le contexte où se trouvait la France, la priorité accordée aux investisseurs et entreprises semblait très justifiée. Cela a permis des hausses de salaires réelles plus importantes que la plupart des pays européens. Par-contre, cela a provoqué des problèmes d’offre qui empêchent de répondre à la demande, y compris avec des difficultés à trouver rapidement le personnel adéquat.
Malgré toutes les mesures qui ont semblé contradictoires, le pouvoir d’achat est en hausse en 2018
Cette relance en 2018, en partie favorisée par 5 milliards d’euros de baisse des prélèvements sur les particuliers, n’a pas était ressentie comme telle par ceux-ci. Le timing des mesures en a certainement été la cause et la disparité entre hausses et baisses est devenue assez incompréhensible par une bonne partie des français.
C’est surtout les 20% des plus pauvres qui en définitif ne bénéficieront en moyenne que de 36 euros par an, alors que les classes moyennes percevront 396 euros.
Malgré la perception, la pression fiscale globale sur les ménages a pourtant baissé de 5,2% en 2018
Il en est de même pour les entreprises, entre les mesures fiscales favorables et défavorables, le solde se révèle positif à plus 0,7%. C’est la fiscalité énergétique (Contribution climat-énergie et la perte du taux réduit sur le gazole routier en BTP) qui a été la plus coûteuse, compensée par la modification de l’ISF et la réforme du forfait social.
La transformation du CICE en allégement de charges devrait rester presque neutre, sauf la baisse des cotisations qui aura pour effet un gain de résultats taxés par l’IS (Impôt Sociétés) qui devrait rapporter 5 milliards de rentrées fiscales à l’état. La baisse prévue du taux de l’IS en deux fois devrait permettre un rattrapage et même plus ensuite.
Ce qui a favorisé le départ du mécontentement, c’est surtout pour respecter ses engagements européens, d’avoir commencé par augmenter la CSG de 1,7 point au premier janvier 2018 et reporté la grande partie des diminutions de cotisations salariales en octobre. Ce qui a plombé provisoirement le pouvoir d’achat des salariés mais aussi des retraités qui ne bénéficiaient pas encore de la baisse de la taxe d’habitation.
Autre effet plus réel, la baisse sur les pensions s’est ressentie immédiatement tous les mois, alors que celle de la taxe d’habitation a un effet moins perceptible et de plus, différé en deux fois.
La programmation de la taxe carbone sur les produits pétroliers surtout sur le diesel, ainsi que la hausse du pétrole a complété cette perception de diminution du pouvoir d’achat et enclenché le 17 novembre 2018 le mouvement Gilets Jaunes que l’on connaît encore à ce jour.
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