Arrêtons de jouer avec le déficit public

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Par Alain Desert Publié le 16 avril 2014 à 2h58

Le déficit public de la France … une histoire sans fin qui dure depuis le milieu des années 1970. Cela fait bientôt 40 années que les budgets sont déficitaires et votés comme tels. Une nouvelle déclaration du gouvernement en la personne de Manuel Valls dit ceci : La France tiendra ses engagements européens en matière de réduction des déficits publics, avec pour objectif un retour à 3% du produit intérieur brut (PIB) fin 2015. "Personne ne peut mettre en doute la crédibilité de la France".

Ah bon ! J’ai envie de dire au gouvernement : "Arrêtez de jouer avec les déficits". A peine désigné, le ministre des finances s’apprêtait à négocier avec "Bruxelles" une nouvelle trajectoire de réduction des déficits, plus accommodante que la précédente qui, il faut bien l’admettre, n’était pas très contraignante. Aujourd’hui c’est un retour arrière. La boussole gouvernementale est déréglée.

On se souvient de notre président de la république en campagne électorale qui promettait l’équilibre budgétaire en fin de mandat, c’est-à-dire pour 2017. Il est déjà loin ce temps là. Tout le monde a presque oublié, à croire que ce n’était qu’un rêve.

Rappelons quelques chiffres. En 2011, le déficit est de 5,3%, en 2012 de 4,8%, en 2013 de 4,3%. Piètre performance ! A ce rythme il faudra encore 8 ans pour arriver à l’équilibre. Contrairement à de nombreux commentaires lus dans la presse et entendus à la télévision, l’objectif n’était pas de 4,1%. L’objectif premier, inscrit dans le projet de loi de finances initial était de 3%. Il a été révisé une première fois pour être amené à 3,7% et ensuite à 4,1%. On est donc très loin de l’objectif initial (écart de 1,3 point). Il est évident que si l’état révise son objectif tous les trimestres en l’approchant d’une réalité qui lui échappe, il a toutes les chances d’être en ligne avec cette réalité en fin d’année budgétaire.

Mais je crois que l’honnêteté exige de faire la comparaison avec les objectifs annoncés en début de période. En serait-il autrement pour une entreprise qui annonce un projet à un coût par exemple de 10 millions d’euros et qui en fin de compte, triple son budget initial tout en l’ayant révisé 3 fois en cours d’exécution. Bien sûr que non. Le dérapage est bien la différence entre le montant final et le montant initial, et non pas entre le montant final et la révision faite lors de la dernière loi de finances rectificative. Remettons donc les choses à leurs places.

Bientôt quatre décennies de déficit. Combien d’années encore avant de retrouver l’équilibre budgétaire ou du moins un niveau qui stabilise l’endettement? Combien d’années pour commencer à rembourser la dette ? Doit-on rappeler que pour commencer à rembourser la dette avec un 0% de croissance, il faut voter un budget excédentaire (et le respecter à l’exécution !). Bien sûr, le gouvernement qui raisonne en pourcentage de PIB (ce qui est très insuffisant à mon avis, car il faut prendre en compte d’autres paramètres) vous dira que l’on peut rembourser la dette tout en ayant un déficit de 3%. Je n’irai pas plus loin dans les calculs, car il faut tenir compte du PIB nominal, donc de l’inflation et de la croissance. La dette peut augmenter en absolu et diminuer en relatif. Mais là n’est pas le problème. Le problème est dans les ordres de grandeur et de ce point de vue on est très loin du compte.

En 2013, le déficit public est de l’ordre de 90 milliards d’euros, donc autant de dettes supplémentaires. Rassurons-nous, les marchés sont généreux en ce moment et nous prêtent à 2% (taux à 10ans). En sera-t-il de même dans 2 ou 3 ans lorsqu’on aura dépassé le seuil symbolique de 100% de dette rapportée au PIB. Pas si sûr. Si les taux venaient à remonter significativement, nous subirions alors la double peine :

- Retour à des taux plus élevés, donc une hausse du montant des intérêts payés annuellement, ce qui impactera mécaniquement le budget en accroissant le déficit !

- Une hausse des taux s’appliquant sur un stock de dette beaucoup plus important.

Inutile de dire que la France est aujourd’hui en risque (mais pas pour les marchés !). Le risque est-il maîtrisé ? Espérons-le car dans le cas contraire c’est tout le système qui saute !

A vous de juger … Souvenez-vous de l’émission de Madame Arlette Chabot "A vous de juger". en 2007 lors de la campagne électorale. Le compteur de la dette affiché à l'écran tournait autour de 1200 milliards d’euros. Aujourd’hui, 7 ans plus tard, le compteur tourne autour des 2000 milliards d’euros ! L’état joue chaque année avec un petit montant de 100 milliards. Un jeu qui s’arrêtera le jour où un sifflet venu d’ailleurs signalera la fin de la "récré".

Espérons que la prise de conscience est désormais bien réelle. Inutile d’aller s’agenouiller auprès de "Bruxelles" pour réclamer une quelconque clémence. Encore un petit verre dit l’alcoolique … je vous promets c’est le dernier et j’arrête de boire !

Source "JournalDuNet"

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Ingénieur en informatique, Alain Desert a longtemps travaillé sur des plates-formes grands systèmes IBM où il a eu l'occasion de faire de nombreuses études de performances. Il est un adepte de l'approche systémique.

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