En France nous sommes schizophrènes. Nous voulons plus de sécurité, mais nous voulons plus de liberté. Nous voulons faire attention à notre cholestérol, mais nous avons plusieurs centaines de fromages différents. Nous savons que l’argent manque, pourtant nous voulons toujours plus de moyens. Nous voulons des réductions de dépenses… mais pour les autres. Je pourrais évidemment poursuivre cette liste à l’infini ou presque.
Nous sommes tellement atteints, que nos riches partent, nos élites sombrent dans un pessimisme sur l’avenir de notre pays qui est presque devenu une seconde nature. Oui nous sommes atteints. Oui la France va mal. Mal financièrement, mal politiquement et finalement mal moralement. La France n’a plus confiance en elle-même. Les français n’ont plus confiance ni en eux ni en leur pays ni en l’avenir.
Ce que vous allez découvrir dans cet Edito sera plein de contradictions et bien sûr source d’inquiétude pour l’avenir. Il y a de quoi. Pourtant, si nous avons toutes les raisons de penser que nous allons traverser des périodes encore plus dures nous ne devons jamais cesser d’espérer dans les capacités extraordinaires de notre pays et ses atouts également nombreux. En France c’est bien connu, nous n’avons pas de pétrole mais pleins d’idées… en plus nous avons maintenant du gaz de schiste que nous saurons dans quelques années extraire presque proprement.
Alors tout commence par l’appel des jeunes officiers de notre armée, qui je vous le rappelle sont soumis au droit de réserve. Ils risquent donc fort de connaître une carrière pour le moins brève, surtout qu’ils viennent de se mettre à dos les 5 500 généraux que compte notre armée mexicaine. Ils interpellent l’opinion publique sur le budget de l’armée et dénoncent sa mauvaise répartition. Les faits dénoncés sont graves et s’ils n’utilisent pas le mot de « haute trahison », ceux qui veulent comprendre comprendront.
Nous, jeunes officiers, sommes inquiets des gaspillages et des coupes budgétaires commis au détriment de la capacité opérationnelle
"A leurs concitoyens,
Marc Bloch, dans L’Etrange Défaite, a dénoncé les dysfonctionnements administratifs de l’armée et l’abandon moral des élites françaises des années 1930. Marc Bloch fut aussi un officier exemplaire pendant deux guerres mondiales, et un résistant de la première heure fusillé par les nazis. Nous nous réclamons de lui car il était un vrai soldat et un analyste lucide des travers qui avaient précipité la France dans la défaite.
Nous sommes de jeunes officiers de l’armée française, issus de différents recrutements et appartenant à différents corps. Nous nous sommes tous engagés pour défendre nos compatriotes, les intérêts et les valeurs de la France.
A l’heure où l’on demande à la Patrie des sacrifices financiers pour essayer de ralentir la faillite de l’Etat, à l’heure où l’armée française au Mali, pour la première fois depuis des décennies, défend à la fois les intérêts économiques de la France, les valeurs universelles de notre Patrie, et l’immense majorité de la population d’un Etat contre une minorité alliée à des islamistes étrangers, à l’heure où le monde entier réarme, à l’heure où nos ennemis, dissimulés ou agissant en pleine lumière, menacent la paix d’Etats légitimes, à l’heure où l’armée est professionnelle, performante, respectueuse des conventions internationales et des lois, à cette heure, aujourd’hui, l’armée française est menacée de déclin.
De l’extérieur, des forces étrangères, qui manipulent nos gouvernements, diffusent dans l’opinion française l’idée que l’armée n’est plus nécessaire, que ses effectifs peuvent être réduits, que ses moyens peuvent diminuer, que son matériel et son armement peuvent être désuets. A l’intérieur, des hommes, des officiers supérieurs et de prétendus « hauts » fonctionnaires bloquent la nécessité d’une réforme juste, nécessaire, qui nuirait aux intérêts de généraux, de colonels et d’énarques, mais qui serait néanmoins salutaire et dont les seuls prémices suffiraient à lancer le signal d’un redressement.
Les faits que nous souhaitons porter à l’attention du peuple sont connus, publics, issus des travaux de la Cour des comptes, du Conseil supérieur à la fonction militaire ou de simples blogs de militaires ou d’anciens militaires. Nous souhaitons que ceux qui, sans bien connaître le fait militaire, ont néanmoins de l’estime pour leur armée, s’intéressent au sort qui lui est fait, et que ceux qui la connaissent apprennent que des lieutenants et des capitaines, n’ayant aucun intérêt financier à se manifester comme nous le faisons, veulent se faire entendre et veulent que le peuple français décide souverainement du comportement que doit adopter l’armée française.
Aujourd’hui dans cette armée, 5 500 généraux qui devraient être à la retraite sont artificiellement maintenus en activité dans un statut appelé la « 2e section ». Dans le même temps, des dizaines de milliers d’emplois de militaires du rang et de sous-officiers sont supprimés.
Aujourd’hui, trop d’officiers sont toujours recrutés, alors que, déjà, des centaines de colonels n’ont pas de commandement. Pour les occuper avant leur retraite (où ils partiront travailler dans le secteur privé, après que leur sera versée une juteuse prime de départ), ces officiers supérieurs sont remisés à des postes administratifs qui deviennent autant d’obstacles bureaucratiques à l’efficacité opérationnelle."
Récemment nous avions eu le mouvement des femmes de gendarmes. Une nouvelle étape vient d’être franchie avec cette lettre au peuple français. L’armée peut-elle à l’époque du Web 2.0, des réseaux sociaux et d’internet s’imaginer que les digues « Maginot » d’un autre siècle tiennent encore longtemps ?
Plus largement ce qui est remarquable (dans le sens qui doit être remarqué) c’est que partout en Europe, les militaires sortent de leur devoir de réserve. C’est un mouvement qui doit être noté car il est porteur de grands, très grands changements. En Espagne, au Portugal et maintenant en France, sans même parler de la Grèce et de sa tradition des coups d’état, des officiers prennent la parole. C’est un changement de climat très lourd qui a des conséquences auquel nous assistons.
Nous aurions tort de prendre ces déclarations comme des phénomènes anodins. En France c’est l’hebdomadaire Marianne que l’on ne peut en aucun cas qualifier de militariste, qui avait dénoncé l’humiliation faite aux militaires français il y a quelques semaines, puisque lors d’une visite du Président François Hollande dans un régiment, tous les percuteurs des armes avaient été retirés sur ordre de l’Elysée. Le message envoyé était on ne peut plus clair. Le Président n’a pas confiance dans ses militaires. Et c’est bien de cette façon-là qu’ont réagi nos soldats.
En termes économiques, oui la défense a un coût. Oui l’indépendance (relative) de notre pays a un prix. Alors en période de disette budgétaire, il est facile et tentant de réduire le budget des armées, qui se doit de rester la grande muette, se taire, le tout sans syndicat ni droit de grève alors que les régimes spéciaux pullulent dans notre pays et que la gauche ne semble absolument pas vouloir s’y attaquer. Clientélisme quand tu nous tiens.
Justement, à propos des régimes spéciaux cela nous mène aux retraites.
Retraites : les Français refusent tout effort supplémentaire !
C’est le titre d’un article de Challenge suite à un sondage réalisé pour Sud Ouest : une grande majorité de Français se dit hostile aussi bien à un allongement de la durée de cotisation qu’à la retraite à 62 ans. 60 % des personnes interrogées refusent tout nouveau recul de l’âge de départ au-delà de 62 ans, 57 % ne sont pas favorables à un allongement de la durée de cotisation au-delà des 42 annuités et 52 % sont opposés à l’augmentation des cotisations retraites payées par les employeurs et les salariés.
Ce qui est très drôle dans ce sondage c’est que 58 % des plus de 65 ans (déjà à la retraite et dans les meilleures conditions) sont favorables à un recul de l’âge de départ à la retraite au-delà de 62 ans. En clair, faites ce que je dis mais surtout pas ce que je fais… et puis pour payer MA retraite, il faut bien que les AUTRES travaillent plus longtemps.
Sur le sujet de la retraite, le clivage politique reste très important puisque 56 % des sympathisants de droite sont majoritairement favorables au recul de l’âge de départ à la retraite contre 32 % parmi les proches du PS. Là aussi en clair, 68 % des gens de gauche sont contre une nouvelle réforme des retraites, ce qui va compliquer grandement la tâche de notre gouvernement socialiste.