L’innovation : quel impact sur les emplois ?

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Par Jean-Yves Archer Modifié le 13 juin 2012 à 13h02

Depuis une vingtaine d'années, la France a vu le nombre de ses concurrents directs augmenter. L’essor des BRICS et particulièrement de la Chine sont des défis que nous tentons de relever en modernisant notre appareil de production. Bien des voies mènent à l'accomplissement de cet objectif : le crédit impôt recherche, la promotion du dépôt de brevets, le lancement des pôles de compétitivité, la formation du personnel, etc.

Il est incontestable qu'il faut lancer ces vagues d'innovation, afin de garder la capacité de produire et de vendre des produits sophistiqués. C’est ainsi que l'Allemagne a su cultiver des positionnements haut de gamme et que Volskwagen a pu demeurer un brillant constructeur de voitures, là où Renault ne produit plus en France que 400 000 véhicules contre plus d'un million il y a dix ans. D'un côté une modernisation réussie, de l'autre une délocalisation subie et des autos low-cost (Dacia).

Mais il y a aussi une idée énoncée au milieu des années 70 par le chancelier allemand Helmut Schmidt : « Les profits d'aujourd'hui sont les investissements de demain et les emplois d'après-demain. »

Au plan financier, il est clair qu'une capacité bénéficiaire assure l'autofinancement qui permet de réaliser un programme d'investissement sans recourir à l'emprunt externe : la première partie du théorème mérite donc pleine validation. La deuxième transitivité est moins établie pour plusieurs raisons.

D'abord, les investissements peuvent se faire dans un autre pays et induire des emplois ailleurs que là où a été généré le profit initial. Voir par exemple le modèle de développement des hypermarchés Carrefour, où le cash de France a permis les implantations dans des dizaines de pays.

Puis, comme l'a montré Alfred Sauvy et d'autres, le progrès technique peut être récessif d'emplois : autrement dit, les investissements de modernisation permettent de modifier la fonction de production et d'alléger la part relative du travail. Les nouvelles machines détruisent alors des emplois par leurs capacités formidables de production.

Le théorème de Schmidt, si souvent cité dans les années 80, n’est donc plus avéré dans son deuxième lien. Et la crise actuelle finit aussi par éroder la pertinence du premier lien : bien des entreprises sont bénéficiaires mais conservent une trésorerie surabondante plutôt que de se lancer dans des investissements.

Pour conclure, il faut évidemment exclure l'idée d'un rejet de la modernisation qui mettrait bien des secteurs en mauvaise posture. Parallèlement, il faut connaître le théorème de Schmidt qui marque encore bien des entrepreneurs, alors que nous avons montré que ces liaisons logiques n'étaient désormais guère établies, voire trompeuses.

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Jean-Yves Archer est énarque ( promotion Léonard de Vinci ), économiste et fondateur de Archer 58 Research : société de recherches économiques et sociales. Depuis octobre 2011, il est membre de l’Institut Français des Administrateurs (IFA).