Indemnisations chômage : les réduire augmenterait les charges des départements

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Par Daniel Moinier Publié le 9 février 2016 à 5h00
France Chomage Reduction Indemnisations Charges
@shutter - © Economie Matin
6,5 millionsLa France comptait 6,5 millions de chômeurs toutes catégories confondues fin 2015.

Myriam El Khomri, Ministre du Travail, de l'Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social a fortement surpris tout son monde en annonçant en autres sur RTL (suite à une suggestion de Jean-Marie Le Guen), la possibilité de réduire assez fortement les durées d’indemnisation du chômage.

Mesure qui en soi, serait normalement plus issue d’un gouvernement de droite que de gauche. Mais pour François Hollande depuis sa prise de fonction en mai 2012, existe-t-il encore une norme, une ligne directrice ?

Depuis la nouvelle présidence de mai 2012, toutes les tentatives misent en place pour enrayer le chômage n’ont pu freiner son augmentation. A fin 2015, c’est plus 736.400 de chômeurs en catégorie A et plus 2.889.200 toutes catégories sur un total de 6.510.300 DOM compris.

Avec cette possible diminution de durée d’indemnisation, que vont devenir tous ces chômeurs non indemnisés ? C’est le sujet de l’analyse qui va suivre.

Pendant ce temps le nombre de personnes au RSA a lui aussi très fortement progressé. Ce qui a mis l’Unedic (Maison mère de l’Assedic) dans une position intenable : 25,8 milliards de déficit dont une augmentation de celui-ci de 4,4 milliards en 2015 avec une prévision de 29,4 milliards d’euros en 2016.

Un nombre de bénéficiaires du RSA qui suit une progression fulgurante

A fin 2015, il y avait 2.531.000 foyers percevant les RSA. En 2014 leur nombre a augmenté de 4,7% et de 4,5% en 2015. Le RSA socle représentant 77% et le RSA activité 23%. Les départements voient ainsi leurs charges augmenter d’une manière fulgurante. Les trois aides sociales qu’ils doivent cofinancer vont coûter 17,5 milliards d’euros. Cela représente plus de 10% de leur budget affirme Maurice Leroy vice Président de l’ADF (Assemblée des Départements de France). Cette augmentation est principalement due par la hausse du nombre de chômeurs, mais aussi avec le vieillissement de la population qui augmente mécaniquement le nombre de bénéficiaires de l’APA (Allocation Personnalisée d’Autonomie). De plus, le plan pauvreté qui avait été lancé en 2012 par l'ex-premier ministre Jean-Marc Ayrault, avait prévu une hausse de 10% du RSA sur la durée du quinquennat. Une charge de plus pour les départements. L'année 2016 ne s'annonce pas meilleure. «La situation est très préoccupante et les perspectives économiques ne nous laissent pas entrevoir de baisse des dépenses de RSA en 2016», a aussi insisté Dominique Bussereau, président de l'ADF. Les dépenses de RSA devraient en effet croître d'au moins 7% cette année.

Les autres aides liées au RSA qui en augmentent encore le coût : Il leur est possible dans certaines conditions, de bénéficier de l’APRE (L’Aide Personnalisée de retour à l’emploi). Elle couvre les dépenses de transport, d'habillement, de logement, d'accueil de jeunes enfants, d'obtention d'un diplôme, d'une licence, certification ou autorisation. L'objectif de cette aide est d'aplanir, sous conditions de ressources, les obstacles empêchant de signer un contrat de travail rapidement (éloignement, enfants à domicile, manque de liquidités face aux frais occasionnés par la reprise du travail…). Celle-ci est financée par le FNSA (Fond National des Solidarité Actives) et gérée en commun par le Conseil général et Pôle Emploi.

Pour ceux qui n’ont pas droit au RSA et qui ont travaillé plus de 5 ans, ils peuvent sous certaines conditions bénéficier de l’ASS à taux plein ou différentielle (Allocation de Solidarité Spécifique) Cette prestation est payée par Pôle Emploi (Assedic). Il existe encore une autre aide similaire mais celle-ci est financée par le Conseil Général (Département), c’est l’AFP (Aide Financière Personnalisée). Aide facultative qui couvre le même type de dépenses.

Et des recettes qui se restreignent fortement

Effectivement, avec des dotations de l’Etat qui ne suivent pas et cette augmentation irrémédiable du nombre de bénéficiaires du RSA, l’effet de ciseaux devient redoutable. L’écart entre recettes et dépenses vient d’approcher le milliard d’euros, alors qu’il avait déjà augmenté de 700 millions en 2014. Dix départements sont dans une situation très critique, dont la Seine-Saint-Denis, le Val d’Oise, le Cher et le gouvernement a dû se résoudre à allouer une aide exceptionnelle de 50 millions d’euros. Ce soutien n’étant qu’un pis-aller devant le trou qui se creuse irrémédiablement.

Et les départements ne sont pas au bout de leur peine !

Si la proposition de la ministre du travail est mise en place, le nombre de chômeurs risque de fortement diminuer ce qui augmenterait d’autant le nombre de bénéficiaires du RSA. A fin 2016, 2.600.000 personnes sont en chômage de longue durée en catégorie A, B, C, c'est-à-dire au chômage depuis plus d’un an. Sur ceux-ci, 1.314.000 concernent la catégorie A, mais seulement 48% d’indemnisés, soit : 630.700 personnes.

Passer la durée maximum d’Assedic de deux années à 1 an ½, reviendrait donc à transférer environ ces 630.700 chômeurs au RSA, tout en tenant compte que la durée d’indemnisation des chômeurs de plus de 50 ans, passerait de 3 années maximum à 2 ans 1/2. En analysant les coûts réciproques, on peut constater que l’indemnité moyenne mensuelle brute à fin 2015 était d’environ 1030 euros pour un chômeur, alors que pour le RSA, un couple avec 2 enfants, moyenne nationale, le montant du RSA Socle perçu serait de : 1100,07 euros (524,16 euros + 262,03 + 157,25x2). Par comparaison, pour une personne seule isolée avec 2 enfants (RSA Socle mensuel spécial de 673,08 + 224,36 X 2), percevrait un total de 1121,80 euros (hors de toutes les autres aides).

L’état se déchargerait ainsi de la difficulté de sauver l’Assedic, « coincé » entre les Syndicats salariés et le Syndicats employeurs principalement le Medef pour se décharger sur les collectivités locales (départements) plus facile jusque-là à gérer (une fronde est actuellement en route). Il faut noter toutefois qu’à compter du 1er janvier 2016, le « RSA activité » et la prime pour l'emploi ont disparu au profit d'un nouveau dispositif : "la prime d'activité". Elle avantagera les jeunes, les salariés gagnant de 575€ à 1.400€ par mois et diminuera le nombre de bénéficiaires (RSA, PPE) qui passeront de 6 millions à 4/4,5 millions, laissera ceux qui gagnent plus de 1400€ et les familles. Elle ne changera rien pour ceux qui gagnent moins de 575€ et les titulaires du RSA Socle ou de l'ASS (allocation spécifique de solidarité).

Conclusion

Le RSA est certainement une mesure sociale permettant de limiter le niveau de pauvreté et de préserver une certaine cohésion sociale, mais il a mis très fortement à mal les finances publiques. Il n’a pas résolu du tout la progression du chômage, malgré toutes les structures mises en place. Bien au contraire, puisque tout ce montant énorme de financement, y compris les coûts de gestion, de soutien, n’ont pu être employés à la relance de l’activité et à la création d’emplois. (Depuis sa création en 2009, il n’y aurait eu qu’environ 150.000 retours à l’emploi (malgré les énormes structures de soutien et les diverses subventions dont celle très importante de l’Europe par le FSE : Fond Social Européen).

Si ce changement se réalise lors de la réunion de l’Unedic du 23 février prochain, comment les départements pourront-ils couvrir cette très forte augmentation de leurs dépenses alors qu’ils sont pour beaucoup dans une situation déjà plus que périlleuse ?

www.livres-daniel-moinier.com

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Daniel Moinier a travaillé 11 années chez Pechiney International, 16 années en recrutement chez BIS en France et Belgique, puis 28 ans comme chasseur de têtes, dont 17 années à son compte, au sein de son Cabinet D.M.C. Il est aussi l'auteur de six ouvrages, dont "En finir avec ce chômage", "La Crise, une Chance pour la Croissance et le Pouvoir d'achat", "L'Europe et surtout la France, malades de leurs "Vieux"". Et le dernier “Pourquoi la France est en déficit depuis 1975, Analyse-Solutions” chez Edilivre.

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