François Hollande va réussir à encore perdre un an

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Par Jean-Marc Sylvestre Publié le 10 avril 2013 à 9h45

Les dernières prévisions montrent que la France va encore perdre un an dans le processus de redressement économique. Dans le brouhaha de l'actualité politique, ces prévisions sont passées inaperçues.

Pourtant, elles traduisent une réalité qui s'impose à tout le monde : croissance zéro en 2014, déficit budgétaire de 4,5%, endettement proche de 100% du PIB, déficit extérieur et chômage accru. Et cela sans aucune garantie de reprise en 2015. Les Français qui ne sont pas touchés directement par le chômage ne s'aperçoivent pas de ces difficultés parce que l'appareil d'État trouve encore aujourd'hui tous les financements dont il a besoin pour fonctionner à des taux historiquement bas. Cela ne peut pas durer.

Cette mécanique financière peut très bien se retourner du jour au lendemain et bloquer l'ensemble du système. Comme en Espagne, en Italie ou même en Grèce il y a déjà deux ans. La France est en train d'armer une véritable bombe à retardement.

Ce qui est incompréhensible à tous ceux qui travaillent dans le monde des affaires, mais aussi en Europe, c'est que la gouvernance française ne fasse rien pour empêcher cette dérive. L'énorme opération de moralisation de la vie publique, qui a été lancée dans le sillage de l'affaire Cahuzac, ne servira à rien sauf à créer un climat de suspicion généralisé. Personne n'est évidemment contre la transparence, personne n'accepterait qu'un responsable politique utilise ses fonctions publiques pour s'enrichir à titre personnel. Mais rien dans les nouvelles dispositions ne nous met à l'abri du mensonge de l'un ou de l'autre pour dissimuler la corruption ou même la fraude fiscale.

On est en train d'installer un climat qui va tolérer, voire encourager le soupçon, la jalousie, l'envie et même la délation
Bref, un climat où tout le monde va se méfier de tout le monde. La France avait déjà un rapport à l'argent compliqué, ce rapport va devenir complètement pourri. Plus grave, cette situation et ce climat vont encore retarder le gouvernement dans son entreprise de réforme.

Le gouvernement s'appuie depuis plus d'un an sur l'idée que la croissance peut revenir comme par enchantement. Il suffit de colmater les brèches en attendant. Or, chacun sait que la croissance ne reviendra pas avant qu'on ait réanimé les systèmes de production de richesse.
Nous ne sommes plus dans des économies de demande comme jadis où il suffisait de distribuer du pouvoir d'achat (ou plutôt du pouvoir de consommer) pour relancer l'économie.

Toute opération de relance ou de soutien est vouée à l'échec. Le consommateur est en majorité gavé de biens et de services de première nécessité, fatigué et frustré. Relancer et soutenir la consommation a de moins en moins d'impact sur le moral du consommateur. En revanche, la relance a deux effets immédiats.

Un, elle pèse sur les dépenses publiques et par conséquent sur les déficits publics

Et deux, elle creuse le déficit extérieur en tirant sur les importations.

Toute mesure de relance ou de soutien ne créera donc pas un emploi dans l'hexagone (hormis des emplois publics qui coûtent de l'argent public) mais créera des emplois dans les pays émergents. Ces mesures quand elles sont ciblées peuvent au mieux en protéger quelques-uns mais la protection est passagère et artificielle. Les primes à la casse dans l'automobile notamment ont sans doute fait plus de mal que de bien.

Le problème français est que l'ensemble de la gauche et une partie de la droite française ont toujours été obsédés par ces logiques de demande
Or, il est évident que ces logiques de demande ne fonctionnent plus. Le niveau de développement, l'ouverture à la concurrence internationale et la mondialisation ont fait qu'uniquement les logiques d'offre sont capables de générer un processus de croissance. Les logiques d'offre passent par la nécessite d'offrir au consommateur des produits et des services qui correspondent à une envie ou un besoin nouveau non satisfait par le marché jusqu'à maintenant.

La survie et le redressement des économies occidentales passent donc par la compétitivité des entreprises et le dynamisme des entrepreneurs. Ce sont les seuls dont le métier est de créer de la richesse, donc de programmer des investissements et des emplois. La politique économique doit donc servir à créer un écosystème qui leur sont favorables. Si ce n'est pas le cas, les chefs d'entreprise, les innovateurs, les investisseurs, les chercheurs vont se croiser les bras ou s'expatrier. Les chefs d'entreprise doivent pouvoir entreprendre, prendre des risques et savoir qu'ils en toucheront les fruits.

A la fin de l'année dernière, et face à des résultats désastreux, on avait cru comprendre que François Hollande allait progressivement infléchir sa politique économique. Les accords européens avaient été finalement signés, on avait cessé de taper sur la tête des chefs d'entreprise et des banquiers, on avait même convenu de respecter une sorte de trêve fiscale, on avait poussé la négociation entre le patronat et le syndicat pour une plus grande flexibilité, on avait enfin demandé à l'industriel Louis Gallois des prescriptions de compétitivité qui devaient déboucher notamment sur un choc de compétitivité.

Mais depuis, le gouvernement s'est pris la tête avec sa majorité et son électorat qui n'acceptent pas de voir abandonnées les unes après les autres les promesses de campagne. D'où les hésitations et les tergiversations.

La dernière grande communication du président de la République revenait finalement conforter l'électorat sur les bienfaits des outils de politique économique mis en œuvre depuis le début du quinquennat alors que la politique fiscale, par exemple, a contribué à asphyxier les entreprises. Rien de particulier sur les efforts de compétitivité, alors qu'il suffirait d'appliquer les conclusions du rapport Gallois. Rien que le rapport mais tout le rapport.

L'entreprise de moralisation à laquelle on assiste aujourd'hui est nécessaire, évidemment, mais ne répond absolument pas à la question du redressement économique. Plus grave, ce strip-tease politique occupe la galerie mais masque l'urgence de la situation économique. Et retarde une fois de plus la mise en place des mécanismes de redressement.

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Après une licence en sciences économiques, puis un doctorat obtenu à l'Université Paris-Dauphine, il est assistant professeur à l'Université de Caen. Puis il entre en 1973 au magazine L’Expansion, au Management, à La Vie française, au Nouvel Économiste (rédacteur en chef adjoint) puis au Quotidien de Paris (rédacteur en chef du service économie). Il a exercé sur La Cinq en tant que chroniqueur économique, sur France 3 et sur TF1, où il devient chef du service « économique et social ». Il entre à LCI en juin 1994 où il anime, depuis cette date, l’émission hebdomadaire Décideur. Entre septembre 1997 et juillet 2010, il anime aussi sur cette même chaîne Le Club de l’économie. En juillet 2008, il est nommé directeur adjoint de l'information de TF1 et de LCI et sera chargé de l'information économique et sociale. Jean-Marc Sylvestre est, jusqu'en juin 2008, également chroniqueur économique à France Inter où il débat notamment le vendredi avec Bernard Maris, alter-mondialiste, membre d'Attac et des Verts. Il a, depuis, attaqué France Inter aux Prud'hommes pour demander la requalification de ses multiples CDD en CDI. À l'été 2010, Jean-Marc Sylvestre quitte TF1 et LCI pour rejoindre la chaîne d'information en continu i>Télé. À partir d'octobre 2010, il présente le dimanche Les Clés de l'Éco, un magazine sur l'économie en partenariat avec le quotidien Les Échos et deux éditos dans la matinale.  

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