Santé publique : fumer tue (aussi) l’économie

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Par Emmanuelle Béguinot Publié le 24 janvier 2013 à 6h13

On peut évaluer de différentes manières les coûts du tabagisme sans parvenir à l’exhaustivité. Le tabagisme est en effet un problème de santé publique qui engendre une diminution de la qualité de vie, de la détresse et de la souffrance. Les économistes ont élaboré différents modèles et distinguent généralement :

- les coûts directs, comme les dépenses engagées pour soigner les malades du tabac,

- des coûts indirects ; comme les journées de travail perdues et leur indemnisation en raison des arrêts maladies. On peut également les distinguer selon qu’ils concernent la sphère publique, comme les frais d’assurance maladie, la perte de recettes fiscales, ou bien la sphère privée, perte liée à l’absentéisme des fumeurs, pertes de productivité pour les employeurs, perte de revenus pour les ménages, etc.

Le coût global du tabac se traduit concrètement par :

- des traitements de longue durée et des coûts élevés concernant les soins dispensés,

- une baisse de la création de richesses pour le pays,

- une baisse des revenus des ménages, soit une baisse de leur pouvoir d’achat.

En France, parmi les idées communément répandues figure l’assertion selon laquelle le tabac rapporterait beaucoup d’argent. En réalité, le tabac non seulement ne « rapporte » pas à la société mais de surcroît, le tabagisme induit un coût extrêmement élevé à la collectivité. A la base de ce préjugé, l’on retrouve l’importance des taxes fiscales sur le tabac (de l’ordre de 13 milliards) ainsi que l’économie faite en matière de versement de retraites du fait de la mort prématurée des fumeurs (environ 5 milliards). Or, ainsi que le rappellent Pierre Kopp et Philippe Fenoglio, les recettes fiscales sur le tabac ne constituent pas une création de richesses mais un simple transfert. Il en est de même des retraites non versées qui peuvent représenter tout au plus des économies pour le budget social de la nation.

Les seules dépenses en soins représentaient déjà plus de 18 milliards d’euros en 2005. Ce seul chiffre illustre pleinement le coût net et immédiat du tabagisme pour les finances publiques. D’une manière générale, le total des coûts représentait en 2005, année d’étude de référence, la somme de plus de 47 milliards d’euros pour l’ensemble de la société. Ces auteurs ont travaillé sur l’ensemble des drogues, licites et illicites ce qui permet notamment de mettre en perspective l’importance relative du coût du tabagisme, en particulier en comparaison avec les drogues illicites.

Evaluation du coût social des drogues en France

evaluation

Poids du coût social des drogues dans l'économie française en 2005

poids

Coût social des drogues supporté par habitant (en euros)

cout

Le tabac représente aujourd’hui un coût pour la collectivité évalué en 2005 à : plus de 47 milliards d’euros, soit l’équivalent de 3,05 % du PIB ; ou encore un impôt indirect annuel pour chaque concitoyen d’une valeur de 772 euros. Le tabac coûte non seulement directement très cher aux fumeurs mais il coûte également très cher aux non fumeurs. A contrario, des économistes ont démontré que la réduction du tabagisme est bénéfique au développement économique et à l’emploi. La consommation de tabac détourne en effet une partie des revenus des particuliers. Quand un fumeur arrête de fumer, les revenus qu’il économise sur le tabac se reportent sur les autres postes de dépenses (loisirs, sport, nourriture…).

Or ces autres postes sont dans leur grande majorité beaucoup plus créateurs d’emplois que le tabac. Ce constat est encore plus marqué dans les pays à faibles revenus et à revenus intermédiaires où les revenus des ménages ne peuvent être consacrés aux biens de consommation fondamentaux et où la lutte contre le tabagisme devient partie intégrante de la lutte contre la pauvreté et pour le développement de ces pays. A l’heure où un nombre croissant de pays, notamment la France, sont confrontés à de graves difficultés financières, il est important de souligner que les objectifs de santé de réduction de la consommation de tabac vont de pair avec des objectifs de réduction générale des coûts et d’accroissement possible de l’activité.

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Directrice du Comité National Contre le Tabagisme.

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