Que serait un programme Thatcher pour la France ? #BESTOF

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Par Pierre Chappaz Publié le 11 août 2013 à 4h14

Lorsque Margaret Thatcher est arrivée au pouvoir en Grande-Bretagne en 1979, l'île était en faillite, étouffée par une économie étatisée. Une situation qui rappelle celle de la France en 2013 ...

La France aurait bien besoin d'une dame de fer. Malheureusement, je ne vois pas de pasionaria de la liberté parmi les dirigeants politiques les plus en vue.

En attendant, rien ne nous empêche de réfléchir à ce que pourrait être un programme Thatcher pour la France. Un programme de réformes économiques courageuses, mais que je souhaiterais plus libéral que celui de Margaret sur le plan politique, grâce à la démocratie directe.

J'ai regroupé les principales réformes en 5 chapitres, en commençant par la libération du travail, si nécessaire pour redonner du pouvoir d'achat aux salariés et lutter contre le chômage.

1/ Libérer le travail.

- Augmentation de tous les salaires nets de 50%.

Comment est-ce possible? les charges sociales prélevées sur les salaires en France atteignent 82% du salaire net, contre 20 à 30% dans les pays occidentaux les plus performants (Suisse, Grande-Bretagne, ...). En limitant les prélèvements aux cotisations retraite et chômage, et en autorisant pour la santé les assurances privées (comme c'est la règle partout en Europe) il serait possible de rendre près de 50% de pouvoir d'achat aux salariés!

- Suppression du Code du Travail.

L'hyper-réglementation du travail, illustrée par le très épais Code du travail (3350 pages), est l'une des causes du chômage car il crée un ensemble de contraintes compliquées et anti-économiques pour les entreprises. Irréformable, cette usine à gaz doit être supprimée, pour rétablir la liberté de contrat entre salariés et employeurs, comme elle se pratique dans de nombreux pays. Par exemple en Suisse, pas de code du travail, juste quelques dizaines de pages de règles à respecter.

- Suppression des 35 heures.

Les 35 heures ont fait beaucoup de mal à l'économie française, tout le monde le sait, et pourtant aucun parti n'a le courage de remettre en cause cette législation anti-économique. Plutôt que de remonter la limite légale à 39 ou 40 heures, on peut envisager de la supprimer, et de confier aux entreprises et éventuellement aux accords de branche le soin de définir - en accord avec les salariés - les horaires et les conditions de travail les mieux adaptés à chaque activité.

- Suppression du Smic.

La France fait partie des pays qui interdisent l'embauche en dessous d'un salaire minimum (à la différence de l'Allemagne, de la Grande-Bretagne, etc...), et de plus le Smic français est plus élevé que partout ailleurs. C'est l'une des raisons majeures du chômage, car beaucoup de personnes, notamment des jeunes, ne sont pas assez qualifiées pour justifier le coût d'une embauche au Smic. Avec la disparition du Smic, les smicards actuels ne souffriraient pas nécessairement, leur salaire pourrait rester inchangé. Mais les chômeurs peu qualifiés auraient une meilleure chance de trouver un emploi, fût-il mal payé, et pourraient progresser par la suite.

- Arrêt des subventions aux syndicats.

Les syndicats, patronaux et salariaux, n'ont de légitimité que s'ils vivent en toute indépendance, des cotisations de leurs adhérents. L'arrêt des subventions et le retour au travail des dizaines de milliers de "permanents", notamment dans les entreprises publiques, serait une mesure éthique.

2/ Révolutionner l'impôt.

- Impôt unique de 13%.

L'impôt sur le revenu, la myriade de taxes (tva, habitation, télé, disques durs, boissons gazeuses, etc ... il y a en des centaines), l'impôt sur les plus-values, celui sur la fortune, tous ces impôts pourraient être remplacés par une taxe uniforme de 13% sur tous les revenus. Cela produirait un montant de recettes pour l'Etat égal au système actuel d'après certains calculs qui doivent être confirmés. Tous les citoyens deviendraient contribuables à partir du moment ou ils ont des revenus, même modestes, ce qui favoriserait le développement d'un esprit civique. Les niches actuellement exemptées, telles que la plus-value sur la vente d'une résidence principale ou d'oeuvres d'art, seraient taxées au même taux de 13%. La France, au lieu de faire fuir les entrepreneurs et les investisseurs, les attirerait, ce qui relancerait vigoureusement la croissance.

- Suppression des subventions et niches fiscales.

Les subventions et "niches fiscales" accordées aux entreprises n'ont plus lieu d'être à partir du moment ou le niveau des charges sociales et des impôts est réduit. De même pour les particuliers sauf pour les personnes incapables de subvenir à leurs besoins.

3/ Diminuer le coût de l'Etat.

- Suppression de l'ENA.

Je n'ai rien contre les grandes écoles (j'ai fait Centrale), mais je suis fondamentalement opposé à l'idée d'une école qui forme les dirigeants de l'Etat. Car cela crée une caste qui dispose de la réalité du pouvoir, quelle que soit la couleur du gouvernement. C'est un concept soviétique. L'Ena il ne faut pas la réformer, comme on en parle régulièrement, il faut purement et simplement la supprimer.

- Suppression des ministères inutiles.

On compte 15 ministres dans le gouvernement Merkel, 18 dans le gouvernement Monti, 7 dans le gouvernement suisse, ... et 37 dans le gouvernement Ayrault. Les 2/3 de ces ministères, qui servent surtout à distribuer des postes et des avantages aux amis politiques, pourraient être supprimés sans grand dommage.

- Diviser par quatre le nombre de députés et sénateurs.

Les Etats-Unis, plus de 300 millions d'habitants, élisent 435 représentants et 100 sénateurs. La France, 60 millions d'habitants, se paye 350 sénateurs et 577 députés! 50 sénateurs, et 150 députés ne seraient-ils pas suffisants, avec moins d'absentéisme?

- Fusion des départements et des régions.

Tout le monde le reconnait, le millefeuille administratif français coûte trop cher, il faut réduire le nombre d'étages administratifs. Cette mesure avait été partiellement envisagée par Sarkozy, qui a reculé face à la bronca des élus locaux.

- Réduire le nombre de fonctionnaires.

La France compte 90 fonctionnaires pour 1000 habitants, l'Allemagne seulement 50. Est-ce que l'administration française fonctionne mieux? je ne crois pas. Beaucoup des fonctionnaires français vont partir à la retraite dans les 10 ans à venir, c'est une chance. En ne les remplaçant pas, l'hexagone pourrait se rapprocher du niveau de l'Allemagne en une dizaine d'années.

4/ Limiter l'assistanat.

- Indemnités chômage limitées à 1 an et maximum 2500 euros/mois.

Le chômage coûte d'autant plus cher que la France a la durée d'indemnisation la plus longue (2 ans, et 3 ans au-dessus de 50 ans), et le montant d'indemnisation le plus élevé (le maximum est à plus de 6000 euros/mois). Evidemment ce système n'incite pas à se battre pour retrouver rapidement un emploi. Il faut revenir à un niveau de protection plus raisonnable.

- Attribution du RSA-socle sous conditions.

Deux millions de personnes touchent le RSA, certaines avec une activité, la majorité sans aucune activité, en tout cas déclarée. Pour ces personnes il semble juste de conditionner l'attribution du RSA-socle à un travail d'intérêt collectif (par exemple à mi-temps), selon les besoins définis par les mairies.

5/ Libérer le débat public.

- Suppression des subventions à la presse.

La presse française est sous le contrôle du gouvernement qui lui distribue des aides de manière arbitraire, pour un montant annuel de 1 milliard 200 millions d'euros. Il faut mettre un terme à cette dépendance, la presse deviendra plus libre et devra se réinventer pour retrouver des lecteurs et s'adapter à Internet.

- Privatisation des medias publics.

A l'époque d'Internet, conserver de couteuses télés et radios publiques n'a que très peu d'intérêt. Ces medias ne se différencient guère des medias privés, si ce n'est par un parti-pris idéologique comme France-Inter et France-Info.

- Referendum d'initiative populaire.

Sur le modèle de la Suisse, le referendum d'initiative populaire serait institué. Les Suisses votent sur toutes sortes de sujets 3 ou 4 fois par an, ce qui favorise un bon niveau de conscience politique dans le peuple, qui tranche directement les débats économiques ou de société. Leur système, éprouvé, pourrait être repris tel quel:

- pour déclencher un referendum contre un projet de loi du gouvernement, la barre serait fixée à 500.000 signatures (c'est 50.000 en Suisse). Cela permettrait d'éviter de mettre la France dans tous ses états à propos de retraites ou de mariage gay. On discute, on vote, et c'est décidé.

- pour soumettre un projet de loi nouvelle aux électeurs, il faudrait 1 million de signatures (100.000 en Suisse).

J'en suis convaincu, le meilleur moyen de faire évoluer une société, et d'éviter la confiscation du pouvoir par les castes, c'est bien de donner au peuple souverain le droit de légiférer. En France ce droit a été confisqué.

Je défends ces idées libertariennes pour lancer le débat: comment sortir la France de l'impasse?

Pour ceux qui ne me connaissent pas et qui nourrissent peut-être encore des illusions au sujet du socialisme, je les informe que je viens d'un milieu familial communiste militant. Je connais cette idéologie intimement, la vie m'a appris sa dangerosité, et pas seulement à l'Est. C'est bien elle qui a conduit la France là ou elle en est aujourd'hui. L'étatisme a contaminé tous les partis, PS, UMP, gauchistes, FN, qui communient dans la lutte contre un "hyper-libéralisme" fantasmé, tout en continuant de faire grossir l'Etat et la dette. Je ne me reconnais dans aucun de ces partis.

J'espère qu'un jour une révolution libertarienne fera sortir la France de l'impasse historique dans laquelle elle se trouve. Pour cela il faut des idées ... en attendant un jour une dame (ou un homme) de fer qui aura le courage et la capacité de les mettre en oeuvre.

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Un homme a le droit de travailler comme il veut, de dépenser ce qu'il gagne, de posséder sa propriété, d'avoir l'Etat pour serviteur et non pour Maître. Margaret Thatcher

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Article initialement publié le 21/04/2013

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Pierre Chappaz est un net entrepreneur français, fondateur de Kelkoo et de Ebuzzing. Il a également été président de Yahoo Europe. Il réside aujourd'hui en Suisse.

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