Comment écrire un article qui fait le buzz sur Internet ?

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Par Eric Verhaeghe Publié le 17 février 2016 à 10h16
Erciture Technique Blog Internet Conseils
@shutter - © Economie Matin
300Google n'aime pas les articles de moins de 300 mots.

Écrire sur Internet obéit à des règles très précises, qui forment une nouvelle rhétorique à laquelle nous, les anciens, sommes bien peu habitués. Pour répondre à la demande de quelques lecteurs, voici quelques conseils simples (et modestes) pour aider les rédacteurs dans leur délicate tâche de faire de l’audience.

Internet, l’audience et l’influence

Le premier point est d’avoir à l’esprit une distinction entre deux notions fondamentales: l’audience et l’influence.

Certains lecteurs sont obsédés par le fétichisme de l’audience: leur objectif est d’être le plus lus possible. C’est un choix qui peut se tenir, mais il faut alors avoir conscience que le contenu éditorial doit être extrêmement vendeur. Pour ce faire, il vaut mieux multiplier les supports au sein du même contenu (texte, photos, graphiques, vidéos) et rarement dépasser les 3.000 signes espaces compris.

L’influence ne cherche pas à toucher le plus grand nombre d’internautes possibles, mais les plus qualifiés d’entre eux pour un support donné. Pour un blog, il peut s’agir des experts d’un domaine, des journalistes, des relais d’opinion. L’idée est alors qu’il vaut mieux être lu par peu de gens mais qui s’intéressent au sujet que l’on traite, plutôt que par beaucoup de gens qui ne s’y intéressent pas vraiment.

Dans ce cas de figure, l’auteur peut se concentrer sur le contenu et sacrifier les formes (plus de texte, moins de photo!)

De mon point de vue, la bonne ligne éditoriale est celle qui arrive à mixer les deux selon un « tuning » qui correspond à la visée de l’auteur.

Internet et la mesure de l’influence

Dans tous les cas de figure, les outils de recherche ou de classement sur Internet intègrent une fonction de mesure de l’influence. Celle-ci est notamment évaluée à partir des liens externes qui renvoient vers le contenu produit. Rédiger sur Internet suppose donc d’avoir toujours à l’esprit d’être référencé par des influenceurs.

Pour faciliter son référencement, le blogueur prévoyant propose toujours à ses lecteurs des « fils RSS »(généralement proposés sur des solutions toutes faites appelées widgets) qui permettent d’informer les abonnés de toute nouvelle publication d’article. Dans la conception du site, il ne faut donc surtout pas négliger cet outil.

En outre, la logique collaborative et les règles de Google rendent indispensable de citer dans ses textes, sous la forme de liens hyper-textes, des articles auxquels on fait référence. Cette multiplication de liens doit aussi concerner les photos, lorsqu’il y a lieu.

Internet et la question de l’audience

Tout ceci plaide pour ne pas accorder une importance trop forte à l’audience. On se méfiera donc (en tout cas c’est mon cas) des montreurs d’ours qui développent toute une doctrine de la balise, du H2, du H3 et autres techniques de référencement qui permettent de gonfler l’audience quel que soit le contenu. En réalité, un bon blog, s’il fait choix de ne pas se limiter à des vidéos de petits chats ou d’actrices à moitié nues, ne gagne pas grand chose à recourir à ces subterfuges.

À titre expérimental, j’ai pu constater que, en publiant des photos inédites d’une actrice à la mode dans les rues de Paris, j’avais de façon éphémère gagné une audience sans aucune influence…

Internet et le choix du sujet

Nous touchons ici au sujet que le blogueur se pose souvent au moment où il ouvre son blog: de quoi dois-je parler? La question du choix du sujet est majeure pour définir la ligne éditoriale qui permettra de gagner de l’influence. Toutefois, il faut immédiatement apporter deux tempéraments à cette notion.

Premier tempérament: une ligne éditoriale n’est pas forcément un espace psychorigide. Si tous les blogs se choisissent un thème, c’est la personne qui est derrière le blog qui retient l’attention. De ce point de vue, il ne faut pas craindre de se livrer parfois à des digressions ou des changements de style pour donner à voir des aspects cachés de soi-même, ou pour divertir le lecteur.

Deuxième tempérament: un sujet n’est rien sans angle. Un même sujet peut faire un flop ou faire un tabac selon l’originalité ou la vivacité avec laquelle il est traité. Dégager un angle original, surtout sur des sujets éculés, n’est pas toujours simple.

Les blogueurs avertis utilisent donc des gimmicks pour optimiser leurs choix dans les phases où ils manquent d’inspiration. Ils recourent souvent à la logique « par liste » ou « par classement » (les 5 erreurs à ne pas commettre, les 3 lieux à visiter, les 8 mensonges du Président, les 10 chiffres à connaître sur le chômage). Ils peuvent aussi pratiquer la ronde-bosse: ce qu’on ne vous a pas dit sur tel sujet, ce que vous auriez dû savoir avant d’aller voir tel film, ce que vous avez manqué pendant les vacances.

Internet et le type de sujet

Dans la pratique, vous vous apercevrez vite qu’il existe trois types d’informations qui vous permettent de bâtir un sujet.

Le premier type, qui est le plus difficile à pratiquer, est celui de l’analyse ou du commentaire. Les lecteurs de mon blog sont coutumiers de ces longs articles qui donnent un point de vue sur un sujet sans apporter de véritable information nouvelle. Pour qu’un article de ce type soit lu, il vaut mieux qu’il apporte une offre différenciante soit dans son style, soit dans son ton. Pour améliorer leur chance d’être lus, beaucoup de blogueurs pratiquent l’analyse courte.

Le deuxième type, assez proche de l’analyse, est le décryptage, qui consiste à prendre une information « officielle » et à la déconstruire. C’est sur ce schéma que fonctionne le blog des décodeurs du Monde, par exemple.

Le troisième type est celui qui prend le plus du temps, mais qui « rapporte » le plus d’influence: l’information pure, de préférence confidentielle et exclusive, souvent à partir d’investigation. C’est la marque de fabrique de Mediapart par exemple.

Quand on ouvre un blog, il faut avoir à l’esprit que tout contenu sera classé dans l’un de ces trois types, et que l’investigation est beaucoup plus « vendeuse » que l’analyse, surtout si celle-ci est longue et loin des problématiques quotidiennes. Surtout, la durée de vie d’un article est relativement liée à son type. L’investigation a souvent une durée de vie plus courte (48 heures maximum) que l’analyse ou le décryptage. Un décryptage sur un sujet de fond peut vivre très longtemps (plusieurs mois).

Internet et le traitement du sujet

Une fois que l’on a choisi le public cible, le sujet, l’angle et le type de contenu, il faut entrer dans l’opérationnel. Il faut commencer à écrire. Pour sécuriser l’opération qui commence, je recommande de choisir un mot-clé qui résume l’article que l’on s’apprête à écrire. Ce mot-clé ne doit être ni trop général (Hollande, politique, social, art), ni trop spécialisé (sauf si l’on tient un blog d’hyper-spécialiste). Il peut être un groupe de mots.

Par exemple, il peut s’agir de « déchéance de nationalité » (plutôt que « politique »), ou de « COP 21 » (plutôt qu’écologie), ou de « conflit syrien » (plutôt que « géopolitique »). Ce mot-clé va dominer l’ensemble de la rédaction de l’article. L’auteur doit avoir à l’esprit que tout écart de rédaction par rapport à ce mot-clé le condamne à perdre de l’influence.

Internet et la saturation du mot-clé

Pour sécuriser sa rédaction, l’auteur doit s’astreindre à une seule discipline: saturer son article avec le mot-clé qu’il a choisi. La saturation suppose plusieurs actions très contraignantes. D’abord, elle impose d’utiliser le mot-clé dans le titre, si possible en début de titre. Ensuite, elle impose de l’utiliser dans la première phrase de l’article. Enfin, elle impose de l’utiliser plusieurs fois dans l’article.

Parfois, il est difficile de choisir un mot-clé original. Dans le présent texte, par exemple, le mot-clé est « Internet », ce qui est beaucoup trop général. Je choisis donc de compenser cette généralité en utilisant systématiquement « Internet » dans chacun des titres (H2) que j’utilise. De cette manière, je suis sûr que son référencement sera amélioré.

Internet et la structure de pensée

La ruse qui consiste à utiliser son mot-clé dans un grand nombre d’intertitres a une autre utilité: elle permet de normer et de clarifier la rédaction et la formulation de la pensée. Elle oblige à décomposer l’article en plusieurs chapitres, ce qui facilite le travail du lecteur et oblige le rédacteur à bien borner les moments de son raisonnement.

D’une manière générale, je recommande d’utiliser au moins trois intertitres dans un article pour soulager le lecteur d’un texte trop touffu. Mais il ne faut vraiment pas hésiter à faire plus si on le souhaite. Faire moins (voire ne pas faire du tout) peut dérouter le lecteur, et surtout ne contraint pas le rédacteur à bien poser les prémisses de son raisonnement.

Internet et la longueur des articles

Il n’existe pas de religion sur la longueur des articles. Pour ma part, j’ai beaucoup d’admiration pour les articles interminables du New York Times, mais je suis peut-être une exception.

La rumeur veut que Google n’aime pas référencer des articles de moins de 2.000 signes espaces compris, c’est-à-dire environ 300 mots. On prendra donc garde à ne pas descendre au-dessous de son volume.

La limite supérieure est plus fluctuante, et correspond souvent au rythme de pensée ou de réflexion de l’auteur. Pour ma part, je sais qu’au-delà de 5.000 signes les lecteurs commencent à peiner. Le bon blogueur pensera donc à épargner la fatigue de son lectorat en ne multipliant pas trop (contrairement à ce que je fais) les très longs articles fastidieux à lire.

Dans tous les cas, l’auteur doit souvent arbitrer entre être lu et se faire plaisir. Et sur ce point, chacun à s’mode, comme on dit dans le Nord.

Article écrit par Eric Verhaeghe pour son blog

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Né en 1968, énarque, Eric Verhaeghe est le fondateur du cabinet d'innovation sociale Parménide. Il tient le blog "Jusqu'ici, tout va bien..." Il est de plus fondateur de Tripalio, le premier site en ligne d'information sociale. Il est également  l'auteur d'ouvrages dont " Jusqu'ici tout va bien ". Il a récemment publié: " Faut-il quitter la France ? "

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