La commission des Affaires sociales de l'Assemblée va examiner, ce mardi 23 avril, une proposition de loi déposée par les députés PS Bruno Le Roux, Christian Eckert et Catherine Lemorton qui tend à débloquer exceptionnellement la participation salariale. Objectif de la majorité : soutenir le pouvoir d'achat et relancer la consommation.
François Hollande l'avait annoncé, le 28 mars, lors de son intervention télévisée, un déblocage de la participation salariale va être examiné par les parlementaires afin d'offrir aux ménages un plus grand pouvoir d'achat et par là, relancer la consommation. « Je propose que, pour tous ceux qui ont l'usage de ces accords de participation – 4 millions de Français – elle puisse être débloquée immédiatement, sans pénalité fiscale », avait exposé le chef de l'Etat.
En quoi consiste la participation salariale ?
Obligatoire dans les entreprises d'au moins 50 salariés, la participation consiste à attribuer aux salariés, selon des règles précises, une fraction du bénéfice réalisé par l'entreprise. Les sommes correspondant à la participation sont bloquées pendant 5 ans, un déblocage anticipé n'étant possible que dans des cas précis, comme un achat d'une résidence principale, un mariage ou un Pacs, la naissance ou l'adoption d'un troisième enfant ou encore la cessation du contrat de travail ou la création d'une entreprise.
Or face à un recul du pouvoir d'achat et une dépense des Français au point mort, François Hollande a voulu aller vite : « Tous ceux qui ont un accord de participation, qui veulent – jusqu'à 20 000 euros – l'utiliser pour quelque achat que ce soit (...), pour acheter un bien » ou « participer à un apport pour le logement, ils pourront le faire », a détaillé le Président. « Ca durera six mois (...), ça permettra, pendant ces six mois-là, de débloquer une épargne pour l'affecter à la consommation ».
Une proposition de loi examinée ce mardi
C'est donc suite à cette annonce que les députés PS Bruno Le Roux, Christian Eckert et Catherine Lemorton ont déposé une proposition de loi qui sera discutée par la commission des Affaires sociales de l'Assemblée ce mardi. Le texte devrait permettre aux bénéficiaires de retirer au cours de l'année 2013, tout ou partie des avoirs bloqués dans l'un de ces dispositifs d'épargne salariale, à l'exception de ceux qui sont placés dans un plan d'épargne retraite collectif (PERCO) et de ceux investis dans les fonds solidaires.
Les sommes ainsi débloquées – y compris les intérêts – bénéficieront d'une exonération d'imposition sur le revenu, mais « les sommes versées au salarié au titre du I ne peuvent excéder un plafond global, net de prélèvements sociaux, de 20 000 euros », précise la proposition de loi. « Les pertes de recettes qui pourraient résulter pour l'État de l'application de la présente loi sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts », souligne-t-on par ailleurs.
Proposition controversée...
« C'est une mesure très court-termiste qui, malheureusement, ne permettra pas de relancer durablement la consommation. Cette participation est défiscalisée, mais rien n'empêche le ménage qui prend cette participation de la replacer sur un autre type d'épargne demain. Ce n'est donc pas une solution miracle, loin s'en faut ! », déclarait l'économiste Marc Touati au micro d'RTL, en réaction aux déclarations du chef de l'Etat.
Par ailleurs, pour l'Association française de la gestion financière (AFG), la mesure risque d'être contreproductive. « Cette épargne longue est investie à 60% en actions et finance les entreprises sur le long terme (...). Le déblocage de la participation va donc à l'encontre de l'objectif de développement d'une épargne longue au service de l'économie réelle », indique-t-elle, avant d'ajouter : « A la veille de la nouvelle réforme des retraites, est-il souhaitable d'inciter les salariés à liquider leur épargne longue ? »
... qui peine à faire ses preuves
En 2005, cette possibilité avait déjà été ouverte et les résultats ont été moins bons que prévus. « Selon l'Insee, son efficacité s'est avérée extrêmement réduite », explique Laure Delahousse, de l'Association française de la gestion financière, au micro d'Europe 1. « Seuls 7,5 milliards avaient été débloqués, et encore, les trois quarts avaient été ensuite réinvestis dans d'autres supports d'épargne. »
Dans les faits, les derniers déblocages de participation ont eu lieu en en 2004, 2005 et 2008 et n'ont pas été suivi d'un pic de consommation des ménages. En 2008, par exemple, les salariés ont débloqué 3000 euros en moyenne, soit 3,9 milliards sur les 60 milliards d'euros prévus par le gouvernement. Par ailleurs la proposition de loi autorise un déblocage pouvant aller jusqu'à 20 000 euros alors même que les salariés ne détiennent en moyenne que 8 000 euros d'épargne salariale.
« Cette mesure est une bêtise que tout le monde répète ! », a ironisé le député UMP de Haute-Marne François Cornut-Gentille, dans le JDD. « Les salariés débloquent toujours moins que prévu et cela creuse le déficit commercial.» Toujours dans le JDD, le rapporteur du Budget, Christian Eckert reconnait qu'« on risque de favoriser les produits importés comme les téléviseurs. Mais il faut donner un peu d'oxygène aux ménages qui ont du mal à boucler les fins de mois ».
Cette mesure pourrait entrer en vigueur dès le 1er juillet.
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