Nouvelle réforme de l’épargne salariale : abandon, statu quo, évolution ou révolution ?

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Par Stéphane Huillet Publié le 28 mai 2014 à 2h44

Stéphane HUILLET, membre et administrateur de la CNCEF, conseil aux entreprises, accompagne les chefs d’entreprise depuis de nombreuses années, dans leur réflexion sur les dispositifs de rémunération les plus efficaces et les plus pertinents qu’ils doivent mettre en place. Il livre une analyse de l’épargne salariale en France à l’heure de sa réforme et propose des pistes de travail pour améliorer ce dispositif.

Le Président de la république a souhaité, fin 2012, qu’une actualisation des dispositifs de l’épargne salariale soit effectuée afin de la pérenniser, de la conforter voire de l’élargir et de la rendre plus stable sur le plan fiscal et social.

La feuille de route établie lors de la Conférence Sociale de juin 2013 a posé le principe d’une négociation interprofessionnelle en 2013 sur les dispositifs de participation financière et d’épargne salariale visant à en simplifier l’économie générale, à en favoriser l’accès aux TPE/PME.

Au 2ème semestre 2013, une mission a été confiée à l’Inspection générale des finances et à l’Inspection générale des affaires sociales afin à évaluer la pertinence du cadre réglementaire, fiscal et social de l’épargne salariale avec les parties prenantes.

Le COPIESAS (Conseil d’orientation de la participation, de l’intéressement, de l’épargne salariale et de l’actionnariat salarié) institué par la loi du 3 décembre 2008 et son décret du 30 mars 2009, pour se substituer au Conseil Supérieur de la Participation (CSP) devait faire partie intégrante de la réflexion. A ce jour, le il n’a toujours pas été installé.

Le rapport établi par l’Inspection générale des finances et à l’Inspection générale des affaires sociales a été remis aux autorités mais n’a pas été rendu public. Faute de savoir ce qu’il contient, il convient de rappeler combien les dispositifs de l’épargne salariale sont vertueux.

Quelques pistes pour une réforme pertinente et efficace :

- Revenir à un forfait social moins pénalisant :

L’augmentation du forfait social devrait avoir un impact sur les dispositifs d’épargne salariale. Il est passé de 2% en 2009 à 4 % en 2010, à 6 % en 2011 et de 8 % à 20 % en 2012. Cette hausse de 1000 % en 4 ans, probablement unique dans les annales de la fiscalité a largement contribué, en plus d’une conjoncture morose, à la pusillanimité des entreprises sur ces sujets. Revenir à un taux compris entre 6 et 8 % donnerait un signal positif fort de la volonté, bien comprise, des pouvoirs publics de développer l’épargne salariale. On pourrait également imaginer une modulation du taux en fonction de la destination des flux générés par les dispositifs (consommation versus épargne) voire une exonération totale pour les entreprises de moins de 50 salariés

- Accélérer la diffusion de l’épargne salariale dans les PME de façon incitative et non contraignante.

L’accord d’intéressement est le dispositif le plus approprié pour les PME, alors même que 89% des salariés ayant accès à un des dispositifs d’épargne salariale travaillent dans des entreprises de plus de 50 salariés.

Inciter les PME consisterait à leur accorder un régime particulier pour le forfait social, voire imaginer un taux d’impôts sur les sociétés spécifique pour les entreprises qui mettraient en place un dispositif d’épargne salariale.

D’autres mesures seraient opportunes : la reconduction de la possibilité de mise en place d’un accord d’intéressement d’une durée d’un an pour les entreprises de moins de 50 salariés, le choix, entre participation et intéressement pour celles entre 50 et 250 salariés et la prorogation, en l’aménageant, du crédit d’impôt institué par la loi du 8 décembre 2008.

- Favoriser une épargne longue pour soutenir l’investissement des entreprises.

Afin de renforcer les fonds propres des PME françaises, les PEE pourraient proposer des supports spécifiques dont les fonds seraient investis dans des PME. Compte tenu des publics concernés, une attention toute particulière devra être portée aux problèmes d’évaluation du risque financier et de liquidité de l’épargne.

- Favoriser une épargne retraite pour les salariés.

Le développement des PERCO confirme la volonté des entreprises d’aider leurs salariés à se constituer une épargne longue et la prise de conscience des salariés de la nécessité de se constituer une épargne complémentaire en vue de la retraite. De fortes incitations, fiscales et sociales, à développer l’épargne retraite devraient être mises en place, tant pour les entreprises que pour leurs salariés.

- Rendre l’épargne salariale plus lisible.

Aujourd’hui, les dispositifs sont nombreux : la participation, le PEE, le CET, le PERCO, la distribution d’actions gratuites et le dividende du travail… Cette densité génère un sentiment de complexité. Un état des lieux confié à l’Inspection générale des finances et à l’Inspection générale des affaires sociales permettrait d’envisager une simplification des dispositifs. Pour une évolution pertinente et efficace, tous les acteurs de l’épargne salariale devraient être partie prenante à la réflexion.

- Stabiliser les dispositifs.

La législation sur l’épargne salariale a évidemment évolué, donnant un sentiment, avéré, d’insécurité tant sur le plan fiscal que social. Soit un frein au développement de l’épargne salariale, notamment dans les PME et plus particulièrement dans les TPE. Sauf quelques aménagements en matière d’épargne longue et de développement des fonds propres des entreprises, la palette des dispositifs existants semble suffisante. Par contre, faire évoluer favorablement les règles fiscales et sociales et décider de les stabiliser serait une excellente nouvelle. C’est également l’un des volets de la mission confiée à l’Inspection générale des finances et à l’Inspection générale des affaires sociales.

Quelques chiffres significatifs :

94% des salariés sont couverts par au moins un dispositif d’épargne salariale dans les entreprises de + de 500 salariés, 74% dans celles de 50 à 499 salariés et de 17% dans celles de moins de 50 salariés. Globalement cela représente 8,8 millions de salariés qui ont accès à au moins un dispositif.

Le montant moyen de la participation est de 1 482 €, celui de l’intéressement de1 505 €, celui de l’abondement dans le PEE de 629 € et celui dans le PERCO de 504 €. Le montant total des sommes distribuées, tous dispositifs confondus a été, en 2011, de 15,515 millions d’€ (source : DARES novembre 2013 N° 068, chiffres 2011).

On compte 3,8 millions de salariés actionnaires en France. Le taux de démocratisation, c’est-à-dire le pourcentage de salariés actionnaires par rapport au nombre de salariés total, est de 51,5% en France, contre 30,1% en Europe. Les salariés français, hors dirigeants, détiennent en moyenne 3,87% de leur entreprise, contre1,68% en Europe (source : Capital Ingenium rapport 2013 épargne salariale).

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