Le pic pétrolier dépendra de la demande

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Par Nick Hubble Publié le 7 juin 2017 à 5h00
Petrole Cours Demande Electricite Energie
@shutter - © Economie Matin
100 millionsD'ici une dizaine d'années, 100 millions de véhicules actuellement en circulation deviendront obsolètes.

A présent nous savons que le peak oil ne se produira jamais. Du moins, pas de la façon dont on s’y attendait.

Peut-on imaginer les hommes de l’Age de Pierre s’inquiéter de manquer de pierres pour fabriquer leurs outils ? Ou les tribus de l’Age de Bronze discutant de ce qui se passerait une fois que tout le bronze serait fondu ? Les civilisations de l’Age de Fer se sont-elles inquiétées de la manière d’aborder le « pic ferreux » ? Ont-elles subventionné des outils moins efficaces fabriqués à partir de bois durable et renouvelable ? Pures fariboles que tout cela – quoique…

En réalité, ce qui est arrivé, c’est que nous avons progressé. A chaque fois, nous avons trouvé quelque chose de mieux. Toute difficulté à se procurer la bonne pierre, le bronze adéquat ou le fer approprié nous a aidés à progresser, en encourageant les efforts de recherche et de développement. Probablement sur fond de découvertes fortuites ou à coup d’essais et d’erreurs. On peut observer aujourd’hui le même phénomène dans le domaine pétrolier. Chaque fois que les prix augmentent fortement, une technologie alternative se développe. Au final, le pétrole provoquera le pic sur lequel il s’empalera lui-même. Une autre source d’énergie deviendra soudainement plus forte, plus efficace, plus propre, plus facile à utiliser et surtout moins chère. Il semble que nous atteindrons ce point de basculement très bientôt. J’y reviendrai plus loin.

Ce qu’il faut comprendre, c’est que le pic pétrolier sera un phénomène déterminé par la demande. Tout comme nous n’avons pas connu de pénurie de pierres à l’Age de Pierre, de bronze à l’Age de Bronze ou de fer à l’Age de Fer, nous n’aurons pas de pénurie de charbon ou de pétrole. Nous passerons à autre chose. C’est la phase de transition qui est intéressante. C’est là que, en tant qu’investisseur, vous pouvez vous positionner pour tirer le plus grand bénéfice. Une seule règle d’or : ne vous fiez pas à l’Etat pour vous conseiller…

La catastrophe du diesel

Car des gouvernements ont gâché l’élan des progrès de l’humanité. De l’éthanol au diesel, dès que l’Etat s’implique dans le processus, c’est la catastrophe. Je n’étais pas au courant du cataclysme écologique que représente le diesel jusqu’à aujourd’hui. Il était masqué sous toutes les infos sur le scandale des émissions de Volkswagen qui ont fait les gros titres des journaux. Ayant incité, par une réduction des impôts, à l’achat de voitures diesel, l’Etat a par la suite découvert que ces voitures ont en réalité un échappement plus polluant que celui des voitures à essence. Quelqu’un aurait quand même pu vérifier ce point avant d’encourager l’achat de voitures diesel. Mais qui voudrait barrer la route à une bonne initiative politique ?

L’organisation de protection de l’environnement ClientEarth a intenté un procès au gouvernement britannique pour les dégâts qu’il porte à l’environnement avec ses politiques favorisant le diesel. Je n’ai pas pu trouver de trace que le gouvernement ait soutenu la réduction d’impôts en faveur du diesel afin de réduire les émissions de CO2 au départ, mais il l’a probablement fait. En tous les cas, la Haute Cour de justice de Londres a statué que les plans pour la qualité de l’air au Royaume-Uni sont si médiocres qu’ils ne se conformaient pas à la réglementation de l’UE, qui exige des gouvernements de mettre en œuvre des mesures adéquates. Voici ma partie préférée de la décision du Juge Garnham sur la manière d’interpréter la loi européenne : « je récuse toute allusion au fait que l’Etat puisse accorder de l’importance au coût. » Voilà une autre bonne raison de quitter l’UE !

Il semble donc que le pétrole et ses dérivés comme le gaz vont être dans le collimateur du gouvernement. Cela fera monter leur coût, ce qui convient aux compagnies pétrolières. Mais leur bonne fortune touche à sa fin car des coûts plus élevés font entrer les alternatives dans le domaine du possible. Imaginez que vous soyez un investisseur dans le bronze à la fin de l’Age de pierre ; ou un investisseur dans le minerai de fer à la fin de l’Age de Bronze ; ou que vous ayez acheté des actions pétrolières avant que Churchill n’ordonne que la Royal Navy ne passe du charbon au mazout, avant la Première Guerre mondiale. Grâce à vos ancêtres, vous seriez probablement encore en train de mener la grande vie. Ce qui soulève la question : qu’est-ce qui viendra après le pétrole ?

Le diesel blanc et l’Age de l’Electricité

Le « diesel blanc » ? C’est la matière première qui alimentera le prochain âge énergétique – l’Age de l’Electricité. Le défi de l’Age de l’Electricité n’est pas la production d’électricité mais sa distribution et son stockage : comment amener l’électricité d’une centrale pour faire tourner une roue ou charger un téléphone lorsqu’on en a besoin ? Nos technologies actuelles pour les infrastructures et les batteries ne sont pas assez efficaces.

La technologie des infrastructures peine encore à décoller. Mais la technologie des batteries progresse – et c’est là que se trouve votre opportunité d’investissement. Un économiste futuriste de Stanford et un investisseur dans les technologies basés à Londres ont créé le think tank ReThink X, qui a récemment publié ses prévisions sur l’industrie automobile aux Etats-Unis. Et ça décoiffe !

Les économistes considèrent que les transports deviendront un service. Au départ, le phénomène se situe dans la location de courte durée comme Uber. Puis, avec l’apparition des voitures électriques sans chauffeur, la tendance s’accélérera fortement. Le coût sera quatre à 10 fois moins cher par kilomètre grâce à des taux d’utilisation beaucoup plus élevés des véhicules, à des coûts de maintenance et de l’énergie plus bas. 10 ans après l’autorisation des véhicules autonomes, 95% des kilomètres parcourus par les voyageurs devraient se faire avec de telles voitures.

Tout ceci détruira le secteur pétrolier tel que nous le connaissons. Selon le rapport de ReThink X :

« Il y aura moins de voitures qui parcourront plus de kilomètres, le nombre de véhicules pour particuliers sur les routes américaines chutera de 247 millions à 44 millions. Cela ouvrira de grands espaces pour d’autres usages, plus productifs. Près de 100 millions de véhicules existants seront abandonnés car ils deviendront économiquement non viables. La demande en véhicules neufs chutera : le nombre de voitures et de camions fabriqués chaque année chutera de 70%. […] La chaîne de valeur des transports fournira 10 000 milliards de kilomètres parcourus par l’ensemble des voyageurs en 2030 (une augmentation de 50% d’ici 2021) pour un quart du coût actuel (393 Mds$ contre 1 481 Mds$). La demande de pétrole atteindra son apogée à 100 millions de barils par jour d’ici 2020, et chutera à 70 millions de barils par jour d’ici 2030.[…] Cela aura un effet catastrophique sur l’industrie du pétrole avec l’effondrement des prix (avec un coût d’équilibre de 25,4 $ par baril). […] »

De quoi ont besoin tous ces véhicules électriques autonomes pour fonctionner ? De batteries remplies de diesel blanc, c’est-à-dire de lithium. ReThink X pense que le lithium est assez important pour être mentionné dans sa synthèse de rapport :

« La géopolitique du lithium et d’autres minéraux essentiels pour les Véhicules Électriques Autonomes est totalement différente de celle du pétrole. Il n’y aura pas ‘d’Arabie Saoudite du lithium.’ Le lithium est une matière première solide, tandis que le pétrole est un fluide. Une perturbation dans la production de lithium n’aura pas d’effet sur sa distribution. »

Imaginez le Moyen-Orient sans l’argent du pétrole. Ou l’indépendance de l’écosse sans l’argent du pétrole. Comment les états américains du pétrole de schiste vont-ils s’en sortir ? Qu’adviendra-t-il de la mainmise de la Russie sur l’Europe orientale si celle-ci n’a plus besoin du gaz russe ? Bienvenue dans l’âge de l’Électricité.

Pour plus d’informations et de conseils de ce genre, c’est ici et c’est gratuit

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Diplômé de la prestigieuse université Bond en Finance, Economie et Droit, Nick Hubble est aujourd'hui chroniqueur pour différentes publications financières en ligne telles que "The Daily Reckoning Australia" et "The Money Life Letter".

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