PIB, dette, déficit : Un peu d’arithmétique incroyable mais indiscutable

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Par Simone Wapler Publié le 22 septembre 2014 à 2h30

François Hollande va laisser filer les déficits pour mieux regagner en compétitivité. Il fait partie des croyants de l'église keynésienne : un gouvernement peut lisser les cycles économiques en évitant les récessions ou les dépressions. Il suffit de prendre à ceux qui ont de l'argent (les riches, les rentiers) et qui sont capables d'encaisser cette perte sans broncher pour distribuer cet argent à ceux qui n'en ont pas (les chômeurs, les pauvres). Ainsi la consommation reprend et la récession est surmontée. Cette théorie revient à croire que la consommation crée la richesse.

A l'échelle individuelle, un enfant comprend aisément que ce n'est pas vrai. C'est l'activité qui -- éventuellement -- crée la richesse. "Eventuellement" car certaines activités se révèlent stériles et tout investisseur ou entrepreneur a le droit de se tromper. C'était justement le rôle sanitaire des dépressions que d'éliminer des activités stériles lorsqu'elles étaient en trop grand nombre. Le capitalisme est un système cohérent : pour qu'il fonctionne bien, il faut la faillite.

Mais une théorie aussi belle que "qui consomme s'enrichit" a la peau dure. Le néo-keynésianisme a raffiné cette idée politiquement séduisante. Lorsqu'il n'y a plus eu d'argent à distribuer, il a été remplacé par le crédit ; puis pour augmenter le crédit, il a fallu détacher la monnaie de toute contrainte matérielle (parité par rapport à une marchandise telle que l'or ou l'argent le plus souvent). La quantité de crédit et donc de monnaie-dette laissée à la disposition de l'économie par les grands planificateurs néo-keynésiens est régulée par le taux directeur de la banque centrale.

Mais même quand on les complique, les idées fausses n'en deviennent pas pour autant vraies. Qui consomme, encore plus à crédit, ne s'enrichit pas, contrairement à ce que croit toujours M. Hollande. Même si le crédit n'est pas cher.

Entre 2002 et 2007 aux Etats-Unis, le crédit public et privé a augmenté de 21 000 milliards de dollars. Dans le même temps, l'activité, le PIB, s'est accru de 2 100 milliards. Un dollar de dette supplémentaire a donc acheté 0,10 $ de PIB supplémentaire. On peut tenter de vouloir noyer le poisson mais cette arithmétique est incontestable. La baisse des taux de la Fed a simplement permis de gonfler la bulle du crédit hypothécaire durant cette période.

Si une entreprise voulait contracter 1 $ de dette pour se procurer 0,10 $ de chiffre d'affaires, elle ne trouverait pas facilement de prêteurs.

Mais le keynésianisme a la peau dure, très dure...

Fin 2008, l'expérience "crédit gratuit illimité" reprend. Nous en sommes à 5 800 milliards de dollars de dette supplémentaire. Entre temps, le PIB a augmenté de 1 100 milliards. Jusqu'ici, 1 $ de dette supplémentaire a donc acheté 0,19 $ de croissance. C'est toujours idiot, seulement un peu moins qu'en 2001-2007. Cette fois toutes sortes de bulles sont gonflées : crédit étudiant, crédit automobile, prêts à des entreprises surendettées (high yield), mais la plus grosse est celle de la dette publique...

Au total, depuis 30 ans, la masse de crédit a augmenté de près de 60 000 milliards de dollars, la dette publique fédérale de 17 000 milliards et le PIB de seulement 11 000 milliards.

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[Légende ligne bleue:] Tous secteurs, instruments du marché du crédit, Dette, niveau
[Axe des ordonnées :] (En milliards de dollars)
[Sous la source : ] Les zones grisées indiquent des récessions US
Il faudrait remplacer les virgules par des espaces dans les chiffres : 10 000, 20 000 etc.

En moyenne, en trente ans, 1 $ de dette supplémentaire – publique ou privée - achète 0,18 $ de croissance. Le keynésianisme ne crée pas de richesse, il crée simplement de la dette.
C'est la même chose en France, en pire car le secteur public représente 57% de l'économie.

Pourquoi continuer, me direz-vous ?

Imaginez une petite ville avec une seule banque. La masse de crédit accordée par la banque ne cesse d'augmenter. L'activité de notre petite ville augmente un peu mais beaucoup moins que la masse des crédits. Les salaires de ses habitants ne suivent pas. Personne ne s'enrichit. Personne sauf... la banque bien sûr. La banque y gagne une rente perpétuelle achetée sur le dos des habitants avec la complicité des élus locaux qui se font mousser avec quelques installations payées à crédit. Il semble que M. Hollande soit finalement tombé amoureux de la Finance sans Visage...

Ce graphique du Financial Times vous montre qu'aux Etats-Unis, les bénéfices des entreprises financières augmentent plus vite que le PIB -- et qu'en revanche, les bénéfices des entreprises non financières augmentent moins vite que le PIB.

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Titre du graphique : Profits US financiers et non-financiers/PIB nominal (Rebasé à 100 en 1970)
Ligne bleu foncé : PIB nominal
Ligne bleu ciel : Profits totaux
Ligne bleu clair : Profits financiers
Ligne grise : Profits non-financiers

Le keynésianisme n'est pas une théorie économique valide, c'est simplement une astuce pour enrichir les politiciens et les financiers. J'ai pris l'exemple des Etats-Unis, mais rassurez-vous, en France. Contrairement à ce que pense notre Président, la dette supplémentaire ne produit que de la pauvreté supplémentaire.

On peut toujours discuter de ce qui arrive en premier, l'œuf ou de la poule. Mettre la charrue avant les bœufs, en revanche, ne se discute pas : c'est une crétinerie.

Croire que la consommation crée la richesse, c'est tout simplement stupide. Mais comme le dit Bill Bonner, "les gens finissent par croire ce qu'ils ont besoin de croire quand ils ont besoin de le croire"... Plus d'analyses et d'opinions de ce genre ? C'est ici et c'est gratuit.

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Simone Wapler est directrice éditoriale des publications Agora, spécialisées dans les analyses et conseils financiers. Ingénieur de formation, elle a quitté les laboratoires pour les marchés financiers et vécu l'éclatement de la bulle internet. Grâce à son expertise, elle sert aujourd'hui, non pas la cause des multinationales ou des banquiers, mais celle des particuliers. Elle a publié "Pourquoi la France va faire faillite" (2012), "Comment l'État va faire main basse sur votre argent" (2013), "Pouvez-vous faire confiance à votre banque ?" (2014) et “La fabrique de pauvres” (2015) aux Éditions Ixelles.

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