Mais au fait, qu’est-ce que la monnaie ? (2/2)

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Par Jean-Pierre Chevallier Publié le 1 août 2019 à 5h57
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@shutter - © Economie Matin

Quand est-ce que la dette et la monnaie tournent mal ? Et surtout… nos autorités comprennent-elles bien les problèmes auxquels elles sont confrontées actuellement ?

Nous avons vu dans la première partie que les fondamentaux de la monnaie elle-même. Aujourd’hui, nous abordons un deuxième point nécessaire pour comprendre les problèmes monétaires : le crédit.

D’abord, beaucoup de gens continuent à croire que les banques créent de l’argent (à partir de rien donc) lorsqu’elles octroient des crédits, par exemple à des ménages pour acheter leur logement !

C’est là une faute grossière qui dénote un manque total de culture économique élémentaire…

En effet, même les pires des banksters ne prêtent que l’argent qu’ils ont, en particulier l’argent qui est déposé par d’autres ménages qui ne dépensent pas tout l’argent qu’ils ont gagné.

Un exemple concret

Ainsi par exemple, pour simplifier, BNP Paribas dispose de l’ordre de 800 milliards d’euros de dépôts de ses clients (dettes envers la clientèle, au passif) qui sont prêtés à d’autres clients pour globalement le même montant (prêts et créances sur la clientèle, à l’actif).

Les banques de dépôts fonctionnent (théoriquement) sur ce principe. Cependant, ces banques sont aussi obligées d’emprunter sur les marchés financiers à des taux inférieurs à ceux qu’elles accordent à leurs clients, la différence entre ces taux générant pour les banques leur rémunération normale pour le travail effectué.

Les prêts accordés par les banques sont donc toujours financés obligatoirement par de l’argent dont elles disposent préalablement, dans tous les pays fiables dans lesquels ce principe de comptabilité en partie double est respecté, c’est-à-dire dans tous les pays développés.

Les crédits ne sont donc pas à l’origine d’une création monétaire indue mais d’une circulation monétaire, ce qui stimule la croissance du PIB.

Dettes : une nuance importante

Un autre point important concernant les crédits doit être précisé : les dettes des uns sont toujours financées par des capitaux apportés par des créanciers qui possèdent donc de l’argent gagné préalablement qu’ils prêtent à des emprunteurs (désargentés) qui veulent investir.

Là encore, ces dettes ne génèrent aucune création monétaire ni aucun autre dysfonctionnement.

En accordant des prêts, donc en générant des dettes pour les uns, les banques ne font que faire circuler l’argent des autres (les titulaires de capitaux disponibles non investis) aux premiers, ceux qui veulent emprunter pour investir.

Les limites de la dette

Les dettes ont donc naturellement des limites (du moins dans une économie relativement fermée) : les capitaux disponibles, là encore en vertu du principe élémentaire de comptabilité en partie double.

Evidemment, les dettes des uns ont aussi pour limite l’appréciation par les prêteurs de la fiabilité des emprunteurs, car les prêteurs veulent bien entendu être remboursés à l’échéance des prêts qu’ils ont accordés.

Compte tenu de la croissance, c’est-à-dire de l’augmentation de la richesse créée dans beaucoup de pays développés, il est normal que les dettes augmentent car les capitaux disponibles augmentent !

C’est ainsi que les dettes des ménages, des entreprises et des Etats augmentent depuis… quasiment toujours, et surtout depuis l’après-guerre sans créer de problèmes majeurs.

Les prêteurs imprudents qui ont prêté de l’argent à des emprunteurs qui sont finalement insolvables sont les seules victimes de leurs erreurs. Tant pis pour eux.

Normalement, ces défauts de paiement ne devraient pas avoir d’autres conséquences.

Qu’en est-il de l’argent sain ?

L’argent sain est le premier pilier des Reaganomics, dixit Arthur Laffer, ce que (presque) personne ne comprend en Europe et encore moins en France, alors que tout est simple !

Les économistes qui conseillent Donald Trump sont dans la lignée de ceux qui conseillaient Reagan : les Reaganomics qui sont avant tout de bons monétaristes pour lesquels l’essentiel est de conserver une monnaie saine, c’est-à-dire sans hypertrophie monétaire.

Pour comprendre ces concepts, il suffit de reprendre notre exemple du paysan de Böhm-Bawerk : si jamais, pour une raison ou pour une autre, la quantité d’argent qui circule dans le village est supérieure à ce qu’elle doit être normalement, alors une grave crise s’y produira inévitablement un jour…

Historiquement et classiquement, presque partout dans le monde, les personnes qui gèrent les établissements financiers importants (et centraux) font toujours la même erreur : ils mettent en circulation de l’argent qui ne devrait pas y circuler.

La solution de facilité qui a été souvent adoptée a été de mettre en circulation dans un premier temps de la monnaie-or, c’est-à-dire des pièces de monnaie contenant une quantité certifiée d’or, ce que fit déjà… le père de Crésus.

Ensuite, l’émetteur de ces pièces commence à diminuer la quantité d’or contenue dans ces pièces ce qui fait que la masse monétaire en circulation est alors supérieure à la norme, ce que fit déjà Crésus. Dès lors, l’hypertrophie monétaire de son royaume est devenue létale.

Quand la confiance en une monnaie disparaît à cause d’une création monétaire indue, c’est alors la crise fatale. Ainsi ont disparu des royaumes et des empires prospères au cours de ces derniers millénaires.

L’Histoire se répète ainsi quand les autorités monétaires ne comprennent pas ces problèmes.

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Jean-Pierre Chevallier est un analyste financier indépendant. Il est une des rares personnes en dehors du système capable d'analyser et de décrypter un bilan bancaire. Il s'est spécialisé dans l'analyse des masses monétaires, un talent rare en France, qui lui permet de suivre au plus près les grands cycles économiques. Ses compétences et son acuité lui ont d'ailleurs valu d'être plusieurs fois attaqué par l'establishment bancaire pour ses analyses aussi précises que dérangeantes.

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