La mathématique de la science économique est d’abord littéraire

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Par Dominique Michaut Modifié le 5 janvier 2017 à 6h51
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La mathématique de la science économique est d’abord littéraire - © Economie Matin

Les échanges de services et de biens contre de l’argent ou par troc existent. La grande place qu’ils occupent dans la vie sociale est on peut plus concrète. Il en va de même des transferts d’argent et de biens échangeables contre de l’argent.

Convenir de dire de ces échanges et transferts qu’ils sont économiques est d’autant plus acceptable que l’économie qui compte au premier chef pour tout un chacun est circonscrite à ses affaires d’argent ou d’éventuelles contreparties troquées. Partant de là, comment aller voir si ce qui est spécifique à ces échanges et transferts procure la matière d’une science utile ? L’énoncé de la question comporte la stipulation « spécifique à », autrement dit « n’appartenant qu’à », souvent utilisée en mathématiques.

Convenons

Qu’est-ce que les hommes ont, en définitive, le plus intérêt à ce que leurs docteurs ès sciences conviennent de dire « économique » ? Explorons où conduit de répondre : à ce qui est spécifique aux échanges par de l’argent ou en troc ainsi qu’aux transferts d’argent et de biens échangeables contre de l’argent. Voyons si cette focalisation facilite l’évitement d’erreurs et le comblement d’injustices. Si la récolte est assez substantielle, l’un de ses plus heureux effets sera de rendre ridicule d’attendre encore et encore de la théorie et de la politique économiques qu’elles tiennent respectivement lieu de philosophie et de religion sociales.

Nous pataugeons dans ce ridicule lorsque nous considérons que l’économie a pour objet la satisfaction des besoins des hommes. De cette assertion découle en effet que dans la vie des hommes 1) tout est économique, 2) rien n’est tout à fait hors du champ de compétence des économistes. Quand on prend du recul, cela fait froid dans le dos. Le double attentat à l’esprit scientifique qui met dans cette impasse est mathématique. L’objectivité exige en premier lieu des conventions explicites, en second lieu l’endossement des conséquences logiques de ces conventions.

Affûtons

Aux pseudosciences il faut des conventions de dénomination qui émoussent, amalgament, biaisent, quitte à dissimuler leurs indigences sous un foisonnement exponentiel de formules algébriques, de courbes, de prétendues causalités qui ne sont en réalité que des corrélations. Aux disciplines réellement tendues vers la recherche de vérités, il faut des conventions de dénomination qui affûtent le discernement au-delà de ce qui a pu paraître suffisant.

L’affûtage du scalpel de l’économiste objectiviste est lui-même un exercice mathématique, sans à aucun instant exclure que les vérités à retenir et à débusquer gardent de leur origine concrète une texture triviale. Les erreurs que nos manuels d’économie travestissent en certitudes raisonnables et en déductions apparemment scientifiques procèdent d’une erreur initiale de méthode. La science économique s’autodétruit lorsqu’elle n’est pas construite sur des définitions recevables en logique des ensembles finis. En revanche, elle se rend à une nécessité logique en reconnaissant d’emblée qu’à cause des définitions de la sorte qui vient d’être dite, sa mathématique n’en devient vraiment une qu’à condition d’être d’abord littéraire.

Ouvrons

L’économie politique objective a pour but de soigner ce qui rend défaillant le système des échanges et des transferts d’où elle tire sa spécificité. Cette finalité utilitaire ne met à l’abri ni des élucubrations sur le sexe des anges, ni de la procréation débridée de cocottes en papier. Voyons aussi, c’est comme le nez dans la figure, que les cours d’économie sanctionnés par des examens et promus par des diplômes ont la redoutable caractéristique de s’adresser à des auditoires captifs où se mettent hors-jeu ceux qui n’accréditent pas la ligne enseignée ou qui ne font pas semblant de l’accréditer.

N’ayons donc pas la naïveté de demander aux enseignants-chercheurs de s’affranchir du jugement de membres de comités de lecture de leurs revues, surtout dans leurs éventuelles remises en cause des fondamentaux de la théorisation à laquelle ils ont été formés. En revanche, répétons-leur que l’esprit scientifique oblige à ouvrir au moins quelques-uns de ces comités à des non-universitaires qui ont étudié de façon approfondie une innovation qui n’est pas encore académiquement exploitée. Tant que cela ne se fera que très marginalement, tout se passera comme si la plupart des penseurs universitaires de la concurrence se comportaient au sein de leur profession en fieffés protectionnistes.

Construisons

La construction d’une science et d’une politique économiques dignes de ce nom est parsemée d’embûches. Les plus rapidement fatales sont de s’y montrer naïf ou blasé en matière de méthode. Chaque chapitre de la science économique de base n’est assez solide que s’il est composé d’énoncés dont la plupart sont normatifs. « Au point où nous en sommes, voici l’énoncé que je soumets maintenant à votre sagacité » dit implicitement l’assembleur d’un jeu de propositions premières de science économique puis d’orientations majeures de politique économique.

Je crois de bonne méthode que le premier de ces énoncés soit celui qui traite du point capital de… méthode que ses recoupements ont conduit l’assembleur à sélectionner : la pensée économique doit utiliser des définitions recevables en mathématique des ensembles finis.

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Dominique Michaut a été directeur des études du Centre consulaire de formation de Metz puis conseiller de gestion, principalement auprès d’entreprises. Depuis 2014, il administre le site L’économie demain, dédié à la publication d’un précis d’économie objective (préface de Jacques Bichot).

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