En remportant l’Euro 2016 contre la France, l’équipe de football du Portugal a fait une publicité exceptionnelle à son pays. Le trophée de l’Euro, est bien plus qu’une histoire sportive… pour Ronaldo et ses coéquipiers. Ce résultat améliorera l’image du Portugal dans le monde. Les touristes et les investisseurs étrangers y sont sensibles et continueront de s’intéresser au pays. La victoire de l’Euro 2016 pourrait redonner également de l’optimisme aux Portugais qui vivent avec la crise et l’austérité depuis 2008.
Selon l’Institut de gestion et de marketing de Lisbonne (l’IPAM), les retombées économiques directes pour le pays sont estimées à 609 millions d’euros. Cette étude a pris en compte les gains versés à l’équipe par l’UEFA (25,5 millions d’euros), la publicité, la vente de produits officiels et de journaux, mais également les voyages par avion, les paris en ligne et la consommation dans les bars et les restaurants. Ces sommes ne sont pas négligeables dans un pays surendetté, connaissant des déséquilibres budgétaires. L'effet macroéconomique de cette victoire représenterait seulement 0,34% du PIB. Ce pourcentage n’est pas assez élevé pour relancer l’économie portugaise à court terme. Malgré des mesures économiques contraignantes, le Portugal n’a toujours pas répondu aux exigences de la commission européenne, puisque le déficit public en 2015 a représenté 4,4% de son produit intérieur brut (PIB) au lieu des 3% prévus par le traité européen. Dans ces conditions, la situation économique va-t- elle s’améliorer à moyen terme ?
Une qualité de vie
Le Portugal devient l’une des destinations européennes préférées des Français. En effet, en 2015, plus d’un million de nos concitoyens ont visité le Portugal. Ce chiffre devrait continuer d’augmenter dans les prochaines années. Le journal américain Usa Today a élu le Portugal meilleure destination européenne en 2016. Lisbonne a été classée 42e sur 230 villes du monde offrant la meilleure qualité de vie dans l'enquête « Quality of Living ranking 2016 » de Mercer. Paris arrive 37e et Lyon en 38e position de ce classement. Selon le ministère du tourisme, 80% des touristes ayant visité le Portugal sont très satisfaits et souhaitent y revenir.
Le Portugal bénéficie d'une excellente situation géographique puisqu’il faut seulement 2h30 de vol pour relier Paris ou Londres. Le pays est long de 650 km, sur 200 km de large et offre une grande diversité de paysages : 850 km de littoral bordé de plages, un arrière-pays pittoresque niché entre les montagnes des Açores et l’Algarve, à une heure de Lisbonne, non loin des côtes africaines. Le système de santé portugais répond aux normes et aux exigences des pays européens en s’appuyant sur des structures privées performantes. Le dernier résultat du World Health Report a placé le système de santé portugais en 12 e position dans la classification de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS).
Le Portugal est un pays sécurisé. On peut ainsi se promener sans problème, tard le soir, dans Lisbonne ou dans des villes du nord comme Porto. Le pays dispose d’un des plus bas taux de criminalité d’Europe et du monde : 5e sur 163 pays (France : 46e ) selon Global Peace Index 2016. Selon le même organisme, il est également le moins exposé au terrorisme en étant classé 110 e sur 162 (162 étant le pays le moins risqué). Dans le sud, la qualité de vie est exceptionnelle avec plus de 300 jours d’ensoleillement, soit plus de 80% d’heures de soleil par an, l’un des taux les plus élevés en Europe.
Comme la Californie, Lisbonne peut compter jusqu’à 225 jours d’ensoleillement par an. Le pays compte plusieurs aéroports internationaux. Lisbonne, Faro et Porto enregistrent des vols réguliers à destination des principales villes du monde. L'aéroport de Lisbonne, principal aéroport national, propose des liaisons quotidiennes avec toutes les capitales européennes, notamment Madrid, Paris et Londres ainsi que des vols intercontinentaux vers les États-Unis, l'Afrique et le Brésil. Plus de 480 vols hebdomadaires relient l’hexagone au Portugal. L'aéroport de Faro connaît un trafic très important en raison de ses liaisons low cost avec les principaux marchés européens, particulièrement le Royaume-Uni, l'Allemagne et l'Irlande. Les européens peuvent donc s’y rendre régulièrement à faibles coûts.
Une économie en transition
Le taux de chômage est passé de 16% en 2013 à 12,3% fin 2015. En mai 2016, le taux de chômage en données corrigées des variations saisonnières s'est situé à 11,6%, soit 0,8 point de moins qu'en mai 2015. Cette variation n’est pas liée à des créations d’emplois (13 900 emplois créés sur cette période) mais aux conséquences de l’émigration et à un retour à l’inactivité. De nombreux Portugais ont des emplois à temps partiel et perçoivent 600 euros par mois (salaire mensuel minimum : 530 euros). Le chômage touche fortement les jeunes de moins de 25 ans.
L’investissement public a fait défaut ces dernières années au Portugal. Le pays a subi des phénomènes de désinvestissement massif des emprunts d’état en raison des inquiétudes de restructuration de sa dette publique. Dans cet environnement de marché compliqué, ses taux ont augmenté, entraînant un coût de la dette plus élevé pour le pays comme pour les entreprises et les ménages. L’économie portugaise est en pleine mutation. Afin de diminuer son taux de chômage et améliorer sa croissance, elle doit atteindre les objectifs suivants : moderniser l’économie, relancer l’investissement public, augmenter l’investissement privé, améliorer la compétitivité des entreprises, diminuer les déficits budgétaires et stabiliser la dette publique.
Grâce à la mise en œuvre du programme de privatisations, les investisseurs étrangers sont sensibles, dans cet environnement difficile, à l’attractivité de l’économie portugaise et à la capacité du pays à diversifier ses ressources en capital et en liquidité. L’inflation portugaise est aujourd’hui maîtrisée. En effet, le Portugal a enregistré une inflation de 0,4% en 2015, après avoir connu une inflation à -0,36% en 2014. Les mesures d’austérité que le gouvernement a mises en place pour répondre aux exigences de la troïka et des créanciers ont fait baisser la demande intérieure.
Il serait contreproductif de mettre en place de nouvelles mesures d’austérité, comme le souligne l’économiste Paul Krugman, prix Nobel 2008 : « C'est dans l'intérêt de l'Europe de donner des marges de manœuvre aux pays comme le Portugal. Il n'y a pas de raison de paniquer si les objectifs en matière de déficits ou dette ne sont pas respectés pendant un an ou deux … Nous ne parlons pas d'une augmentation massive de la dépense publique mais d'une politique visant à alléger l'austérité à la marge ». En attirant les particuliers aisés (retraités européens lourdement fiscalisés sur le revenu et sur le capital) et les investisseurs étrangers, le gouvernement précédent a souhaité relancer l’économie du pays avec l’arrivée d’argent frais.
Les prévisions économiques
Dans ses dernières prévisions, l’OCDE prévoit une croissance du produit intérieur brut (PIB) de 1,2% en 2016 et de 1,3% en 2017. Des progrès ont été fournis dans le cadre des réformes visant à favoriser la compétitivité, la croissance, et l'emploi qui reste un handicap majeur avec un taux de chômage élevé. L’amélioration de l’économie passera par la reprise des exportations mises à mal par la récession des pays voisins. En effet, 61 % des exportations de marchandises portugaises se réalisent uniquement vers la zone euro, et 25% à destination de l’Espagne. Cet état a également connu une profonde crise économique depuis 2008. La situation portugaise est loin d'être si négative puisque l’agence de notation canadienne DBRS a maintenu une note acceptable sur les emprunts d’états portugais.
Aujourd’hui, cette note lui permet de se financer à faibles taux grâce à la politique de la BCE et malgré une dette qui représente encore près de 130% du PIB. L’endettement des entreprises demeure élevé (118% du PIB fin septembre 2015) et pèse au final sur l’investissement. Ce dernier sera un élément clé pour la relance économique du Portugal. La solvabilité du secteur bancaire s’améliore depuis 2012 et bénéficie de meilleures conditions de financement. Par ailleurs, l’augmentation des prêts risqués ou non performants affecte sa rentabilité et limite sa capacité à prêter aux entreprises saines. Enfin, s’il est vrai que remporter l’Euro dope rarement l’économie du pays vainqueur et n’impacte pas directement la consommation des ménages de façon significative. Il n’en demeure pas moins qu’une victoire envoie toujours, à la population et à l’étranger, des signaux positifs.