RSI : entre incurie et ras-le-bol fiscal

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Par Charles Sannat Publié le 16 mars 2015 à 11h15
Rsi Cotisations Grone Sociale Independants Assurance Maladie
@shutter - © Economie Matin
6,1 MILLIONSEn France près de 6,1 millions de personnes sont au RSI (directement ou indirectement)

Il y a actuellement un fort mécontentement populaire de la part de nos « petits » patrons, de nos artisans, de nos commerçants qui, pour l’écrasante majorité d’entre eux, subissent les affres kafkaïens d’un organisme stalinien à savoir le RSI… le régime social des indépendants !

Essayons de voir et de comprendre ce qu’il se passe précisément sur ce sujet. À mon sens, il s’agit en l’espèce d’un cas exemplaire de « choc de simplification » totalement foiré par nos grands mamamouchis pleins de bonnes idées mais oubliant que le diable se cache dans les détails avec en particulier une fusion informatique de 3 systèmes différents qui n’a jamais réussi à aboutir à un résultat satisfaisant avec de multiples pertes de données et des erreurs à répétition.

Il s’agit aussi de citoyens de l’an 2015… qui ne supportent plus, et à juste titre, l’autisme de certaines administrations au fonctionnement tout stalinien. Je note d’ailleurs à ce sujet que si j’ai un problème d’impôts, je peux me rendre à mon centre des impôts, rencontrer un être humain, avec qui je vais pouvoir lire « mon » dossier et mes papiers et que globalement les choses se passent convenablement et qu’une solution est généralement trouvée… Pourtant, les impôts ce n’est pas simple ! Il y a donc une incurie dans la capacité du RSI à tout simplement assurer une qualité de service convenable à ses usagers… Et vous noterez l’usage du mot « usagers… En général, quand on est l’usager d’une administration quelconque, il faut oublier toute notion de qualité de service. En gros, être usager c’est être sous-considéré et c’est, en 2015, insupportable alors qu’à tous les niveaux, les gens sont de plus en plus soumis à des obligations de résultats très exigeantes. C’est encore pire pour les « indépendants » qui jouent leur avenir financier tous les jours sans filet de protection et qui savent ce que signifie la « responsabilité » personnelle.

Il y a donc à ce niveau une incompréhension totale et le dialogue est évidemment impossible.

Mais il s’agit aussi de ras-le-bol fiscal car les charges du RSI ont, ces dernières années, considérablement augmenté. Pensez donc ! Les indépendants votent à droite… Il est donc peu risqué politiquement parlant pour un gouvernement de gôche d’augmenter les charges sociales. Pourtant, c’est techniquement moins cher en charges sociales d’être indépendant… que d’être un salarié !! Le net touché sera nettement plus important ! Pourtant, l’agacement des indépendants est évident. Et pour cause. Lorsqu’un salarié est payé, il raisonne en net et ne s’occupe pas vraiment de ce qu’il coûte à son entreprise. Or l’indépendant, lui, il va signer chaque chèque un par un et voir à chaque fois son tas de sous diminuer un peu plus. En clair, il voit chaque euro partir et cela lui semble monstrueux, ce qui est vrai. Mais il le vit nettement plus mal qu’un salarié car les éléments psychologiques et l’affectif rentrant en jeu sont ici totalement différents.

Il est parfaitement normal que le citoyen puisse exiger aussi bien un niveau de qualité qu’une réforme de fond du RSI notamment sur les appels de cotisations. Car les cotisations appelées par le RSI le sont avec des délais trop longs et désuets et donnent lieu à des rattrapages l’année suivante que de plus en plus d’indépendants ont du mal à provisionner ou à prévoir. Il s’agit-là uniquement de problème de gestion et une taxation trimestrielle serait évidemment, pour nos indépendants, bien plus facile à gérer …

Enfin, si les cotisations sociales d’un indépendant coûtent nettement moins que celles d’un salarié pour le même montant, il est très important de préciser que la couverture sociale au sens le plus large, c’est-à-dire qu’il s’agisse des aspects médicaux ou du montant de la pension de retraite, n’a rien à voir avec ce que peut obtenir un salarié, ce qui là encore n’arrange pas le sentiment d’exaspération et d’injustice de nos travailleurs indépendants qui se voient lourdement taxés là où les grands groupes du CAC 40 eux… paient en moyenne 8 % d’impôt sur les sociétés !

Je vous propose donc de partager cette petite synthèse ensemble afin que chacun de nous puisse nourrir sa réflexion.

Rappel, qui est dirigeant TNS ? Qui est dirigeant assimilé salarié ?

Pour clarifier les choses, rappelons que les dirigeants :

1/ entrepreneurs individuels, gérants majoritaires de SARL et gérants d’EURL ont le statut de TNS (travailleur non-salarié) ;

2/ de SAS ou SASU et les gérants minoritaires ou égalitaires de SARL ont le statut de dirigeant assimilé salarié.

Historique (citation Wikipédia vérifiée par mes soins et c’est bon !!)

Le régime social des indépendants (RSI) est un organisme français de protection sociale, administré par des représentants de ses assurés — les travailleurs indépendants et particulièrement représentés par les artisans, commerçants et professions libérales.

Il a été créé en juillet 2006 par le gouvernement Dominique de Villepin, dans le cadre de la fusion des caisses de protection sociale des chefs d’entreprises :
- AVA (Assurance Vieillesse des Artisans) ;
- CANAM (CAisse Nationale d’Assurance Maladie des professions indépendantes) ;
- Organic (Organisation Autonome Nationale de l’Industrie et du Commerce).

Il effectue une mission de service public en gérant la protection sociale obligatoire de plus de 6,8 millions de chefs d’entreprise indépendants et de leurs ayants droit, ce qui le place comme deuxième régime de protection sociale en France par le nombre de personnes assurées.

Est-ce qu’un TNS au RSI paie plus de charge qu’un salarié ? Eh bien non !!

Comparatif, rémunération de TNS ou de gérant assimilé salarié (citation votre expert comptable en ligne)

Pour une enveloppe de départ identique, on s’aperçoit rapidement que les rémunérations des gérants TNS sont moins ponctionnées que celles des gérants assimilés salariés.

Enveloppe de rémunération de départ

Enveloppe de rémunération de départ
(coût global)*

Salaire net annuel du dirigeant salarié

Rémunération nette annuelle du gérant TNS

Ecart
en valeur

Ecart en %
sur coût global

10 000

5 457

6 669

1 202

12,12 %

15 000

8 336

10 035

1 699

11,33 %

20 000

11 508

13 401

1 892

9,46 %

30 000

17 263

20 132

2 870

9,56 %

50 000

28 771

33 595

4 825

9,65 %

75 000

43 700

52 307

8 607

11,48 %

100 000

58 655

71 501

12 846

12,85 %

200 000

118 576

148 288

29 712

14,86 %

*

Attention :
ce comparatif ne concerne que les coûts et pas les droits associés. Il n’inclut donc pas les rémunérations différées des TNS ou gérants assimilés salariés, comme les droits en terme de pension de retraite. Il répond simplement à la question « quel type de rémunération sera le moins ponctionné en fonction du niveau de rémunération versé ? ».

Mais attention… désormais les dividendes sont taxés comme… du salaire !! Ce qui veut dire qu’un TNS n’a plus le droit à dividendes ! (citation droit et finances)

Depuis le 1er janvier 2013, les dividendes peuvent être assujettis aux charges sociales quand un travailleur indépendant non-salarié (TNS) exerce son activité au sein de l’entreprise soumise à l’IS, ce qui est essentiellement le cas des gérants majoritaires de SARL.

Les dividendes perçus par le TNS, son conjoint, son concubin pacsé et leurs enfants mineurs sont soumis aux cotisations sociales personnelles RSI pour la part qui dépasse 10 % du capital social, des primes d’émission et des sommes versées en compte courant détenu en toute propriété ou en usufruit par ces mêmes personnes.

Exemple :
une SARL a un capital social de 10 000 €, réparti à parts égales entre M. et Mme Martin et leurs deux enfants mineurs. M. Martin, gérant majoritaire, perçoit une rémunération mensuelle de 2 000 €, soit 24 000 € par an. Les quatre associés perçoivent chacun 5 000 € de dividendes chaque année. En 2012, M. Martin devait payer des charges sociales sur 21 600 €, montant de sa rémunération après la déduction forfaitaire pour frais de 10 %. Depuis 2013, il doit cotiser sur le montant total de sa rémunération (24 000 €) + la part des dividendes distribués (20 000 €) qui dépasse 10 % du capital social (1 000), soit 19 000 €.

Touraine propose une mission parlementaire sur le RSI (citation article du Monde)

« La ministre des Affaires sociales, Marisol Touraine, a proposé, mardi 10 février, à l’Assemblée nationale une mission parlementaire pour réfléchir à des réformes du régime de protection sociale des indépendants (RSI) – la sécurité sociale des commerçants, artisans et professions libérales –, décrié pour ses dysfonctionnements.
« A la suite des décisions prises en 2008 [notamment le rapprochement du RSI avec l'Urssaf], [les] travailleurs indépendants ont été confrontés comme l’a dit la Cour des comptes à une véritable “catastrophe industrielle” », a rappelé la ministre, précisant qu’« il a fallu mettre en place des dispositions pour améliorer la prise en charge des situations des indépendants ».

Manifestation à Paris

Parmi les mesures déjà prises par le gouvernement, la ministre a cité la baisse des cotisations depuis deux ans « qui vont jusqu’à 400 euros pour ceux qui ont un revenu inférieur à 20 000 euros par an ».

Environ 7 000 travailleurs indépendants ont manifesté lundi à Paris pour dénoncer les multiples problèmes de gestion du RSI et protester contre les hausses de charges.

Le même jour, le secrétaire d’État à la simplification, Thierry Mandon, s’était montré favorable à « une mission d’urgence » sur ce régime pour résorber les retards de dossiers et améliorer l’accueil, soulignant au-delà un besoin de « transparence » sur les prélèvements et prestations du RSI. »

Il est déjà trop tard, préparez-vous.

Au coffre Le Contrarien Charles Sannat

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Charles SANNAT est diplômé de l'Ecole Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d'Etudes Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information-(secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Economique d'AuCoffre.com en 2011. Il rédige quotidiennement Insolentiae, son nouveau blog disponible à l'adresse http://insolentiae.com Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.

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