Scandale Volkswagen : une mise au point s’impose

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Par Jacques Marlot Publié le 6 octobre 2015 à 5h00
Automobile Volkswagen Scandale Chiffres Pollution
@shutter - © Economie Matin
6,55 millionsVolkswagen a vendu 6,55 millions de véhicules depuis le début de l'année.

Le consommateur est actuellement submergé d'informations dans lesquelles il ne se retrouve plus, parce qu'elle mélangent deux choses différentes : la pollution et la consommation.

Pour les mesurer, des tests sont nécessaires et pour que les résultats obtenus pour différentes voitures soient comparables, il faut que la procédure des tests soit normalisée. Actuellement, en Europe, c'est toujours la norme NEDC de 1973 qui est utilisée et dont on peut trouver tous les détails ici .

Que cette norme soit dépassée est un autre débat, mais il n’est pas pertinent de comparer les résultats de tests normalisés en laboratoire avec ceux de tests sur route, parce que les tests sur route ne peuvent pas être normalisés, dépendants qu’ils sont de la façon de conduire.

Et sur la route, on ne conduit JAMAIS comme dans la norme NEDC qui comprend notamment 4 accélérations de 0 à 50 km/h en 26 secondes et une accélération de 0 à 70 km/h en 41 secondes. PERSONNE ne conduit comme çà sur la route à une époque où toutes les voitures peuvent accélérer de 0 à 50 km/h en 4 ou 5 secondes.

«?New European Driving Cycle?» par Orzetto

S'il est évident que plus on roule vite, plus on consomme, il est encore plus évident que plus on accélère fort, plus on consomme aussi : il suffit de comparer le bruit que fait le moteur ! C'est pourquoi les consommations sur route sont toujours nettement supérieures aux résultats des tests de laboratoire.

Dans les essais actuellement publiés, on ne donne plus que deux chiffres ; par exemple, dans le Moniteur Automobile n° 1611 de ce 30/09/2015, page 52, à propos de la Toyota Avensis Touring Sports 1.6 D-4D :
- Consommation moyenne de l’essai : 6,8 l/100 km
- Consommation mixte normalisée : 4,5 l/100 km.
La première est 51 % plus élevée que la seconde et, dans le contexte actuel de tricherie, d’aucuns pourraient accuser le constructeur de tricherie. Mais ce n'est pas de la tricherie, c'est un défaut d'information : on omet de préciser que la consommation de 6,8 l/100 km correspond à un essai sur route d'une Toyota qui met 5,2 s pour accélérer de 0 à 60 km/h tandis que la consommation de 4,5 l/100 km correspond à un test de laboratoire composé - entre autres - d'accélérations de 0 à 50 km/h en 26 secondes.

Autrefois, le lecteur pouvait un peu s'en souvenir (!?) ; je reprends au hasard un essai de la Peugeot 406 1.6 SL en page 175 du Moniteur Automobile n° 1103 du 22/3/1996 ; à cette époque, la norme NEDC existait déjà, mais les consommations publiées étaient présentées comme suit :
- Consommations conventionnelles (selon normes ECE) :
- à vitesse stabilisée à 90 km/h : 5,7 l/100 km
- à vitesse stabilisée à 120 km/h : 7,2 l/100 km
- en cycle urbain : 10,2 l/100 km
- Moyenne ECE : 7,7 l/100 km

- Consommation de l’essai : Moyenne 9,4 l/100 km

La consommation moyenne de l’essai était 22 % plus élevée que la moyenne ECE, mais tout le monde voyait pourquoi, vu qu’on donnait les 3 consommations ayant conduit à la moyenne de 7,7 l/100 km.

On peut comprendre que beaucoup de gens s’intéressent plus aux mesures de consommation qu’aux mesures de pollution, parce qu’ils peuvent vérifier les premières et pas les secondes. Mais en voulant vérifier les mesures de consommations, ils oublient de rouler comme le font les pilotes qui commandent la voiture pendant les tests normalisés (au cours desquels ces pilotes sont maintenant remplacés par des logiciels, pour assurer une concordance parfaite avec la norme et une meilleure reproductibilité).

La seule relation qui pourrait être faite (à tort) entre consommation et pollution se trouve au niveau de la mesure du CO2 émis par la voiture, à tort, parce que le CO2 n’est pas un gaz polluant, mais un gaz générateur de l’effet de serre (comme d’ailleurs la vapeur d’eau). En effet, la quantité de CO2 émis par la voiture est proportionnelle à la consommation de carburant (le nombre de grammes de CO2/km est généralement 26 fois plus élevé que la consommation exprimée en l/100 km). Si le logiciel espion mis au point par Bosch pour VW avait une influence sur la mesure du CO2 rejeté par la voiture, j’attends qu’on publie les résultats des tests réalisés en laboratoire suivant la norme NEDC et présentés comme suit :

Mais l'affaire VW n'a pas démarré sur une tricherie relative aux consommations, mais relative à la pollution ; voir à ce sujet https://www.customercare.dieteren.be/fr/service/ : « Le groupe Volkswagen a récemment déclaré avoir installé sur certains de ses moteurs diesel un software permettant de diminuer le niveau réel d’émissions d’oxyde d’azote lorsque ces véhicules sont testés ». Alors, pour bien faire la différence entre les mesures de consommations et les mesures de pollution, VW devrait présenter un tableau comme suit :

Ainsi on ferait une claire distinction entre les tests de consommation et les tests de pollution. Certes les clients peuvent mesurer leur consommation et pas leur pollution, mais si celle-ci les préoccupe tant, ils n'avaient qu'à acheter une voiture électrique qui ne pollue pas, puisqu'elle est dépourvue de tuyau d'échappement.

Quand je contreviens à une disposition du code de la route, je reçois un PV stipulant que j’ai roulé à 56 km/h au lieu de 50 km/h ; çà, ce sont des chiffres et on comprend. Alors, pour les oxydes d’azote relevés sur les VW, on veut des chiffres aussi. Au lieu de cela, on sort des chiffres américains faisant état d’émissions de gaz nocifs (lesquels ?) 20 fois plus élevées que les normes admises, en oubliant de dire qu’on compare des poires (tests de laboratoire suivant une norme bien définie) avec des pommes (des tests sur route suivant des conditions réelles d’utilisation).

Une autre facette suspecte de cette affaire VW est l’étonnement devant la révélation de ces logiciels espions. Dans L’ÉCHO de ce 26/09/2015, en page 16 il y avait un article de Benjamin Everaert dont je recopie un extrait : En fouillant dans les rapports des institutions européennes, on se rend compte que les «defeat devices» ou «dispositifs d'invalidation», ces logiciels de trucage capables de repérer quand une voiture est sur un banc de test, ne sont pas une nouveauté. Interdits sur le Vieux Continent en 2007, plusieurs recherches en font encore mention depuis. Ainsi un rapport du Joint Research Center (JRC, ou Centre commun de recherche), le laboratoire de re­cherche scientifique et technique de l'Union européenne, …………… , daté de 2013, consacre un encadré d'une pleine page sur l'utilisation de ces dispositifs. «Des capteurs et des composants électro­niques dans les véhicules légers mo­dernes sont capables de détecter le dé­but d'un test d'émissions en laboratoire. Certaines fonctions du véhicule ne peu­vent être opérationnelles dans le labo­ratoire que si un mode prédéfini de test est activé», peut-on ainsi lire dans ce rapport du JRC. Le texte va plus loin en rappelant que ce type d'appareil peut s'avérer un problème d'un point de vue législatif.

Donc tout le monde savait - ou aurait dû savoir - et maintenant on tombe du ciel ; à se demander s’il n’y a pas en-dessous de tout çà une volonté de faire chuter l’action VW pour la racheter à bon prix ; et pour qu’elle chute de beaucoup, il faut donner de l’importance à une nouvelle susceptible de faire un buzz.

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Jacques Marlot est retraité. Il a occupé successivement les fonctions d'ingénieur, puis ingénieur en chef aux Fonderies Marichal-Kétin, à Sclessin, puis de directeur, et administrateur-délégué de la S.A. ÅKERS BENELUX.

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